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"Un compagnon formidable": Bernard Pivot enterré à Quincié-en-Beaujolais, le monde de la littérature lui rend hommage

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Les obsèques du journaliste et écrivain ont eu lieu ce mardi 14 mai en l'église de Quincié-en-Beaujolais, où il a vécu une partie de son enfance. De nombreux habitants et élus de la commune, mais aussi des représentants du monde de la littérature sont venus rendre hommage à Bernard Pivot.

Un homme qui sera resté, jusqu'à la fin, "simple". Les obsèques de Benard Pivot ont eu lieu ce mardi 14 mai à Quincié-en-Beaujolais (Rhône), petite commune dans laquelle il a passé une partie de son enfance, sa famille ayant fui Lyon pendant la guerre.

Une commune où il a laissé sa trace, donné son nom à la bibliothèque à laquelle il donnait plusieurs fois par an des centaines de livres, et où une cuvée de vin porte chaque année son nom.

Si on le connaissait en tant que journaliste et homme de lettres, à la présentation d'émissions littéraires telles qu'Apostrophes, qu'il a tenue pendant 15 ans, il est resté "Bernard" pour beaucoup dans ce village du Beaujolais.

"Il représentait quelqu'un de simple, qui avait su devenir célèbre par son travail, par sa persévérance, par sa culture", relate Richard Saint-Didier, conseiller municipal de Quincié-en-Beaujolais, au micro de BFM Lyon.

Des obsèques "à l'image de sa personnalité"

Si l'église de Quincié-en-Beaujolais a pu accueillir plusieurs centaines de personnes pour la cérémonie, qui a même été retransmise via des haut-parleurs installés sur le parvis, c'est tout de même dans l'intimité que les proches de Bernard Pivot lui ont fait leurs derniers adieux, au cours d'une cérémonie imaginée par l'homme de lettres lui-même.

Des textes à la musique, il avait tout choisi. Seule sa famille, notamment ses deux filles, ont pris la parole pour lire un texte écrit par Bernard Pivot, se terminant sur les mots "merci Quincié".

"Ses obsèques ont été à l'image de sa personnalité: quelqu'un qui avait de la réserve, du recul, et pourtant beaucoup d'émotions. Je sentais même beaucoup d'amour, de la vraie amitié", déclare Périco Légasse, critique gastronomique avec lequel Bernard Pivot avait fondé le Comité de défense du Beaujolais en 2009.

Son attachement à la région, à son patrimoine viticole et en particulière à la commune de Quincié-en-Beaujolais, où il y a été conseiller municipal de 1977 à 1983, a également marqué les esprits.

"Il y a une âme locale, une âme de territoire, et il en faisait partie", estime Christophe Guilloteau, président du département du Rhône. "C'était quelqu'un d'ici, du cru, comme on dit."

Brigitte Macron lui rend hommage

Aucune figure officielle n'a pris la parole au cours de la cérémonie, mais elles étaient toutefois bien présentes: députés du Rhône, maires et élus locaux venus faire leurs adieux à un homme qui a été une figure du Beaujolais.

"C'était une personnalité extrêmement appréciée dans le Beaujolais. Au fond, si on est nombreux, c'est parce qu'on voulait lui dire merci", affirme Alexandre Portier, député du Rhône. "Merci pour son engagement, merci d'avoir fait rayonner notre territoire."

La Première dame, Brigitte Macron, est également venue rendre hommage à un confrère littéraire auprès duquel elle a elle-même puisé l'inspiration au cours de sa carrière d'enseignante.

"C'était pour moi le passeur par excellence", a-t-elle déclaré à l'issue de la cérémonie, de son "imprégnation dans le texte, et comment passer à l'autre ce texte". "Lui, il le faisait avec une intelligence, une institution, un savoir-faire... Quelque chose de totalement inné."

Le monde de la littérature lui dit adieu

Le monde de la littérature était bien entendu présent aux obsèques pour faire ses adieux à l'un des plus fervents représentants de la culture. L'Académie Goncourt, dont Bernard Pivot avait été membre puis président de 2014 à 2019, lui a ainsi rendu hommage à travers son président actuel, Philippe Claudel.

"L'Académie est présente ici, et c'était absolument normal, pour rendre un dernier hommage à Bernard Pivot, qui a été un de ses membres, qui a été son président. Un président d'une grande jovialité, d'une grande intégrité, d'une grande curiosité. Et il garde chez nous, dans notre académie, le souvenir d'un compagnon de table formidable, un grand amoureux des livres, mais aussi qui avait plaisir à discuter de tout en dehors des livres."

L'ancien maire de Villefranche-sur-Saône, Bernard Perrut, a même profité de cette journée pour lancer au ministère de la Culture un appel à perpétuer l'héritage de Bernard Pivot. Il aimerait voir a minima une journée consacrée chaque année à l'homme de lettres, lui qui avait organisé la finale des championnats de France d'orthographe -surnommée la "dictée de Pivot"- de 1986 à 2005.

"J'ai le souhait que la ministre de la Culture et la ministre de l'Éducation instituent une semaine ou une journée qui s'appellerait 'Dictée Bernard Pivot'. Et que dans toutes les écoles de France, au même moment ou la même semaine, il y ait une dictée -soit rédigée par Bernard Pivot, soit faite par d'autres- qui soit proposée à tous les élèves, à tous les collégiens, à tous les lycéens. Parce que la langue française est véritablement nécessaire, et son respect doit être une priorité", a-t-il déclaré.

Un ami "mieux qu'un frère"

D'autres de ses amis du monde littéraire ont fait le déplacement à Quincié-en-Beaujolais pour dire adieu à Bernard Pivot, dans une cérémonie que beaucoup décrivent comme étant "à son image".

"Il y avait une pudeur qui était celle de Bernard. (...) Comme si, comme toujours, il était discret et simple, comme il a été toute sa vie. C'était d'une justesse absolue", s'émeut l'écrivain Éric-Emmanuel Schmitt.

L'émotion a aussi été grande pour Paul Geoffray, ami d'enfance de Bernard Pivot qu'il a rencontré à l'âge de cinq ans sur les bancs de l'école, celui qu'il décrit comme étant "mieux qu'un frère".

"C'est un ami avec un grand A. On se disait des choses certainement beaucoup plus intimes que si ça avait été mon frère", confie-t-il au micro de BFM Lyon, et confirme que son ami a eu le droit à "une très belle cérémonie".

Bernard Pivot, qui s'est éteint au lendemain de ses 89 ans, a eu le droit à une dernière ovation: son cercueil a quitté l'église de Quincié-en-Beaujolais sous les applaudissements des habitants venus lui rendre hommage, avant de rejoindre le cimetière de la commune, où il a été inhumé aux côtés de ses parents.

Arthur Blet avec Laurène Rocheteau