"Ma vie a changé en tout point": deux ans après, le témoignage d'un lyonnais rescapé de l'incendie de la montée Bonafous

Presque deux ans après l'incendie qui a ravagé un immeuble de la montée Bonafous, dans le 4e arrondissement de Lyon, la vie n'a toujours pas repris son cours pour les habitants. L'immeuble, fragilisé par le feu, a été complètement rasé.
"Aujourd'hui, mon immeuble, c'est quelques photos sur un téléphone", déclare Colin Arnaud, un rescapé de l'incendie, ce mardi sur le plateau de BFM Lyon.
Désormais âgé de 36 ans, Colin Arnaud vit chez ses parents, avec sa femme, en attendant que son immeuble et son appartement soient reconstruits. Ils n'ont plus leurs affaires personnelles, seulement les quelques objets qu'ils ont pris avec eux au moment de l'évacuation. "Aujourd'hui, ma vie tient en trois sacs de courses."
"Un nuage de fumée qui sortait de l'appartement"
Colin Arnaud et sa femme étaient chez eux avec un ami, ce soir du 30 avril 2020. Peu avant vingt heures, alors que la France est confinée à cause du Covid-19, ils entendent du bruit dans la rue.
"On pensait que c'était pour applaudir les soignants, les éboueurs, comme ça se faisait chaque soir", explique Colin. "Je me suis dit, 'ils ont un petit peu d'avance aujourd'hui'." En passant la tête par la fenêtre, il réalise alors que le bruit vient d'un habitant de l'étage supérieur, qui crie au feu.
"Quand j'ai levé la tête, j'ai vu un nuage de fumée qui sortait de l'appartement. Et là, j'ai compris tout de suite. J'ai dit 'on évacue'", continue-t-il..
Colin attrape immédiatement son chat, son ami prend l'ordinateur sur lequel ils travaillaient alors que sa femme récupère toutes les clés sur la commode. Ils quittent l'appartement et se retrouvent avec le reste des voisins dans la cage d'escalier.
L'incendie ne fera heureusement pas de victime, même si les pompiers mettent deux jours à maîtriser le feu. Quelques voisins seront évacués par la grande échelle, mais la majorité auront réussi à sortir par leurs propres moyens.
"Ça se serait passé plus tard dans la nuit, ça n'aurait pas été le même bilan, déclare Colin. Il y aurait eu beaucoup plus de dégâts humains."
"C'est un peu de la survie, parfois"
L'enquête attribue l'incendie à un accident domestique. Colin explique qu'il s'agit d'un enfant qui a fait "une expérience de chimie" avant que son père ne crie pour donner l'alerte. "Je ne leur en veux pas, parce que c'est un accident. Un accident bête qui a des conséquences lourdes, mais ça reste un accident."
Cela ne faisait que quatre mois que Colin vivait dans cet immeuble. Il avait acheté et rénové l'appartement avec sa femme. "On avait construit notre vie, on avait travaillé pendant des années, on avait économisé, acheté un appartement. Ce qui a changé, c'est qu'on n'est plus dans notre cocon, on n'est plus chez nous."
Après l'incendie, le couple a vécu quelques mois dans un hôtel, puis a été relogé par leur assurance. Ils vivent désormais chez les parents de Colin, en attendant que l'immeuble soit reconstruit.
Un lourd impact
Le permis de construire a mis longtemps à être accepté, car l'immeuble se trouvait sur les pentes de la Croix-Rousse, quartier classé au patrimoine mondial de l'Unesco. Les assurances travaillent désormais à chiffrer le montant de la reconstruction. "Ce n'est pas pour demain qu'on réintégrera notre chez nous", déplore Colin.
Aujourd'hui, avec le recul, il se qualifie comme un "rescapé". "Je me dis rescapé parce que ma vie a changé en tout point. Mais sur le coup, on ne sait pas dire si on est rescapé, si on a eu de la chance, parce qu’il n’y a eu aucune victime, on a tous eu le temps de sortir par nos propres moyens. (...) Quand on voit la vie qu’on a aujourd’hui, on est rescapé parce que c’est un peu de la survie, parfois."
Quand il voit des gyrophares ou des camions en intervention dans la rue, qu'il entend le bruit de talkies-walkies, Colin repense à ce soir-là. C'est dans les mois qui ont suivi l'incendie qu'il s'est rendu compte de l'impact de cet événement sur sa vie.
"C'est plus tard, quand on reprend le travail, quand on se rend compte qu'on n'a plus nos vêtements, nos affaires personnelles, nos souvenirs... C'est là qu'on prend conscience", termine-t-il.