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Lyon: la mairie du 7e arrondissement investie par un collectif de soutien aux travailleuses du sexe

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Les camions ont été évacués du quartier de Gerland jeudi après la publication, la veille, d'un arrêté préfectoral.

Ils sont venus dire leur colère. Après l'expulsion jeudi des travailleuses du sexe du secteur de Gerland, les membres d'un comité de soutien ont investi la mairie du 7e arrondissement de Lyon ce vendredi. Le collectif demande des solutions pour ces femmes qui se trouvent dans des situations fragiles.

"Il faudrait amener les camions jusque-là et faire les clients ici pour qu'ils comprennent. On ne jette pas les gens dans la précarité, dans les rues comme ça", déplore Maria, travailleuse du sexe à Lyon depuis plus de quarante ans, à notre micro.

Celle qui a participé à l'occupation de l'église Saint-Nizier en juin 1975 -pendant huit jours, les prostituées avaient investi l'édifice avec la complicité du clergé local pour dénoncer la répression policière dont elles faisaient l'objet- s'inquiète de la situation.

"On a des enfants à nourrir, un loyer à payer. Nous sommes mal vues par la société. (Les gens) ne savent pas qu'on est des êtres humains, comme eux", argue-t-elle.

Des femmes à la rue

Les camions confisqués faisaient non seulement office de lieu de travail, mais aussi de domicile pour certaines des travailleuses du sexe qui officiaient dans le secteur de Gerland.

Selon Maria, "presque tous les policiers de Lyon" ont été mobilisés pour cette opération: "Il ne manquait plus que les canons à eau pour nous jeter de là-bas".

"Des camions ont été emmenés hier à la fourrière. Les récupérer coûte très cher. Elles seront obligées de continuer à se prostituer, alors qu'elles n'ont plus de clientèle pour se sortir de là", explique une responsable associative.

"Si les filles ne récupèrent pas leurs camions, certaines vont continuer à dormir dehors. Leurs conditions de travail vont se compliquer puisqu'elles vont se prostituer à pied alors qu'elles n'en ont pas l'habitude, s'endetter et donc risquer d'accepter des rapports sans protection à cause de cette précarité", ajoute-t-elle.

Quelles solutions?

Une délégation du collectif de soutien des travailleuses du sexe a été reçue par la maire écologiste du 7e arrondissement, Fanny Dubot. Cette dernière s'est engagée à ce que les camions emmenés hier soient rendus -s'ils le sont- gratuitement.

C'est un arrêté préfectoral, et non municipal, pris ce mercredi qui est à l'origine des expulsions. Il interdit le stationnement de tous les véhicules dans les lesquels s'exerce une activité de prostitution à Gerland. La préfecture y dénonçait notamment "la multiplication des faits de violences et la dégradation des conditions sanitaires par la multiplication des déchets abandonnés (seringues et préservatifs usagés)".

Aux yeux de Maria, cette situation n'est rien d'autre qu'un éternel recommencement. "Ça fait dix ans que ça se passe comme ça. C'est le jeu du chat et de la souris. On était à Perrache, on s'est fait jeter de Perrache. On était à Jules-Carteret, on s'est fait jeter de Jules-Carteret. De Jules-Carteret, on est passées au stade de Gerland", énumère-t-elle.

Pour le moment, les prostituées, qui souhaitent rester ensemble par souci de sécurité et de solidarité, ne savent pas quels lieux elles pourraient investir. Si elle est consciente de "gêner les enfants" qui fréquentent la Plaine de jeux, ce qu'elle juge "pas bien" (sic), Maria compte tout de même retourner dans le quartier, tant qu’une solution pérenne, et qui lui convienne, ne lui sera pas proposée.

Jade Theerlynck et Sarah Boumghar