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Violences au village d'enfants de Riaumont: deux députés dénoncent "l'inaction" face aux "sévices"

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Deux députés sont en visite au village d'enfants de Riaumont, à Liévin, ce vendredi 4 avril. Ils vont y recueillir des témoignages concernant les violences qui y étaient perpétrées, et tenter d'identifier si il y a eu des dysfonctionnement dans le contrôle de l'état.

La communauté catholique traditionaliste de Riaumont (Pas-de-Calais), qui a accueilli puis scolarisé des enfants, était "un bagne" où avaient lieu des "sévices" facilités par "l'inaction" des autorités, ont regretté vendredi les corapporteurs de la commission d'enquête parlementaire sur le sujet.

"Une atmosphère de bagne"

Les députés Violette Spillebout (Renaissance) et Paul Vannier (LFI), étaient en visite à Liévin ce vendredi 4 avril. Ils ont participé en préfecture du Pas-de-Calais, à une réunion de près de deux heures avec les services de l'Etat, laquelle a permis selon Violette Spillebout de "se rendre compte de l'atmosphère de bagne, de prison" qui régnait à Riaumont.

Violette Spillebout a dénoncé "les trous dans les archives", "les non-décisions" et "l'inaction" observés pendant plusieurs années, "alors que tous les signaux étaient là pour faire part non seulement de violences, mais de sévices sexuels et de danger pour les enfants, de danger imminent".

Tout cela "pose question sur la façon dont, finalement, peut-être une partie de ces sévices étaient connus et acceptés dans la société", a-t-elle ajouté.

Paul Vannier a notamment évoqué l'envoi au ministère de l'Education, à la mi-2017, de deux courriers, l'un par le préfet du Pas-de-Calais, l'autre par le rectorat de Lille, prônant la fermeture de l'établissement. S'écoulent ensuite "18 mois durant lesquels, ici dans le Pas-de-Calais, dans l'académie de Lille (...), on attend une réponse du ministère et cette réponse ne vient pas".

Six religieux mis en examen

Des investigations sont en cours depuis 2013 pour des faits de viols, agressions sexuelles et violences, dans cet ancien village d'enfants religieux. En 2010 déjà, un ancien élève avait donné l'alerte en rapportant des coups de pied, des gifles, des coups de bâton et également l'interdiction de se rendre aux sanitaires la nuit.

Ils sont également plusieurs anciens pensionnaires de l'institution, à affirmer avoir été victimes de violences sexuelles ou physiques dans les années 1970 et 1990. Une enseignante avait notamment fait un signalement au parquet de Béthune, dès la fin des années 1970

Par ailleurs, un ancien prieur de Riaumont comparaissait, le 11 mars dernier, pour détention d'images pédopornographiques. Deux ans de prison, dont un an ferme, ont été requis. Le jugement doit être rendu au mois de mai.

Ce procès était très attendu car il est le premier à concerner un religieux de Riaumont. Ils sont cinq autres à avoir été mis en examen, en mars dernier, pour des violences volontaires sur mineur de 15 ans, par le parquet de Béthune.

Deux autres encadrants de Riaumont sont mis en examen pour agressions sexuelles. Une information judiciaire sur ce volet est en cours, comme pour l'affaire de viol, dans laquelle l'auteur présumé était mineur.

Des enfants placés en "esclaves"

Juchée sur une vaste colline boisée près de Lens, Riaumont a démarré dans les années 1960 comme foyer d'accueil pour enfants placés par les services sociaux, aux côtés d'enfants envoyés par des familles traditionalistes.

Les premiers étaient des "esclaves" tandis que les seconds étaient "bien vus" par l'encadrement, affirme Charline Delporte, présidente de l'association Centre national d'accompagnement familial face à l'emprise sectaire (Caffes), qui suit Riaumont depuis 30 ans.

Après de premières remontées de sévices, Riaumont a perdu en 1982 son agrément pour enfants placés. La communauté a ensuite lancé une école privée hors contrat, qui n'a fermé qu'en 2019 sur décision administrative, après la révélation des mises en examen. La préfecture a aussi interdit à la communauté d'accueillir des séjours de scouts cette année.

Des liens avec l'affaire Émile

Ce village d'enfants a également fait parler de lui pour ses liens avec le grand-père d'Émile, disparu en juillet 2023, au Haut-Vernet (Alpes-de-Haute-Provence). En 2018, Philippe Vedovini, placé sous le statut de témoin assisté, avait été entendu par les enquêteurs de la police judiciaire de Lille, dans le cadre de l'affaire de Riaumont.

Dans les années 1990, Philippe Vedovini avait dispensé des cours au sein de l'institution catholique. Bien qu'il ait été autrefois entendu par les enquêteurs, il n'a jamais été mis en examen dans cette affaire.

Maïwenn Furic