INFO BFMTV. Violences à Riaumont: plongée dans une "atmosphère moyenâgeuse", dans le viseur des autorités depuis 2001

BFMTV a eu accès aux témoignages recueillis par les enquêteurs, concernant la communauté religieuse de Riaumont dans le viseur des autorités depuis 2001. Le parquet de Béthune vient de demander le renvoi de six religieux devant un tribunal correctionnel pour être jugé pour violence sans incapacité sur mineur de 15 ans.

Fin février, le parquet de Béthune a demandé le renvoi de six religieux de la communauté catholique traditionaliste de Riaumont à Liévin (Pas-de-Calais) devant un tribunal correctionnel pour violence sans incapacité sur mineur de 15 ans.

Cette institution religieuse est dans le viseur des autorités depuis 2001. L'établissement avait déjà fait l'objet d'une inspection, notamment par les services de la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS) cette année-là.

Des années plus tard, une enquête a été ouverte en 2010 après le signalement d'un ancien élève du village d'enfants de la commune du Pas-de-Calais.

Coups de pied, gifles, interdiction de se rendre aux sanitaires la nuit...

Coups de pied, gifles, coups de bâton, interdiction de se rendre aux sanitaires la nuit, nourriture avariée, périmée... Le 30 janvier 2010, un adolescent ayant été scolarisé au village d'enfants de Riaumont, contacte le 119, le numéro destiné aux enfants maltraités. Au bout du fil, il raconte alors les violences physiques et psychologiques régulières infligées aux enfants hébergés à Riaumont.

Agressions sexuelles, violences physiques: l'enfer derrière les portes du pensionnat traditionaliste de Riaumont

19:37

Une enquête préliminaire est alors ouverte dans la foulée par le parquet de Béthune.  Le 7 avril 2010, le jeune homme en question a été entendu par les enquêteurs. Il a expliqué avoir été scolarisé à Riaumont par sa mère.

Il a décrit un niveau d'enseignement particulièrement bas, des comportements racistes sur de jeunes pensionnaires d'origine étrangère. Il a aussi renouvelé ses accusations de mauvais traitements, évoqué des punitions, comme celle des "minutes": à chaque manquement, les internes se voyaient retirer des minutes d'un capital octroyé chaque semaine. Parvenus à zéro, ils étaient privés de retour dans leur famille le week-end. 

Ce même jeune homme a par ailleurs relaté des comportements pouvant s'apparenter à de la pédocriminalité de la part de deux religieux de Riaumont: les frères N. et F., qui ont été accusés de rester dans les chambres pendant que des internes se déshabillaient. 

Une inspection en 2001

En juin 2001, après la mort par pendaison d'un jeune pensionnaire, l'établissement avait déjà fait l'objet d'une inspection, notamment par les services de la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS).

"L'enfant porte en toute saison une culotte courte en cuir", "rudesse des conditions d'accueil des mineurs", "problème d'hygiène", "lacune du personnel en matière éducative"... Le rapport était alors très critique, évoquant également "une organisation autarcique" ou encore une "atmosphère moyenâgeuse".

D'autres manquements, sur le plan de la sécurité, ont aussi été remarqués au fil de l'instruction judiciaire. Un élève s'était cassé le bras à cheval, avant d'être victime d'une infection à staphylocoque dorée et de subir une ablation d'une demi-vertèbre. Un autre s'était planté une hachette dans la cuisse. Des scouts, quant à eux, avaient évoqué un jeu consistant à lancer un couteau au plus près des pieds d'un autre scout.

Des problématiques de racisme ont aussi été remontées. Un élève de confession juive ayant été rebaptisé, en "Paul David" au lieu de "David". Même chose pour un jeune "Mohamed" rebaptisé en "Jean-Baptiste". 

Des auditions de pensionnaires dès 2011-2012

Les langues ont commencé à se délier dès 2011-2012. Port du bermuda par seulement 6 degrés, denrées moisies ou périmées, étranglement, claques, élèves conduits de nuit sur un terril, bâillonnés et mains attachées, trimballés dans la boue, retour d'enfants dans leur famille avec des bleus ou des coquards... De nombreuses situations graves et inquiétantes ont été révélées.

Souvent, les récits des élèves auditionnés se ressemblent, notamment sur les comportements violents de certains religieux. Parmi les élèves auditionnés, certains ont en revanche déclaré "avoir beaucoup reçu de Riaumont". D'autres ont changé de version au fil des auditions ou ont expliqué ne jamais avoir assisté à des violences. 

Au total, six religieux de Riaumont sont mis en examen dans cette affaire. 

Matthias Tesson