Qui est responsable du probable arrêt du train de nuit Paris-Berlin? L'Etat charge la SNCF qui n'a pas tenu ses promesses

Le train de nuit entre Berlin et Paris à la Gare de l'Est, à Paris, le 12 décembre 2023 - Alain JOCARD © 2019 AFP
Silence radio. La fin assez probable du train de nuit entre Paris et Berlin relancée fin 2023 et qui devait concrétiser la renaissance des liaisons nocturnes transfrontalières ne suscite pour le moment aucun commentaire officiel, ni de la part de SNCF Voyageurs qui exploite cette ligne avec ses partenaires allemands et autrichiens, ni de la part de l'Etat, à la manoeuvre en tant qu'autorité organisatrice.
Rappelons que, selon le collectif "Oui au train de nuit", l’État français menace de supprimer la subvention annuelle à la SNCF pour ces trains. Sans cette aide, ÖBB et DB n'entendent plus assumer les déficits seuls (car le train de nuit est par essence déficitaire), la liaison pourrait donc s'arrêter net en décembre prochain.
Est-ce la conséquence d'une volonté d'économies budgétaires? Pas seulement. Selon nos informations, l'Etat est assez mécontent de la manière dont SNCF Voyageurs a géré ce dossier.
Une source proche du dossier estime même que l'Etat s'est "fait piéger par SNCF Voyageurs". Lors de l'appel à manifestation d'intérêt pour cette ligne en 2022, la compagnie française aurait été la seule parmi les candidats à demander à l'autorité organisatrice (l'Etat) une aide financière annuelle afin de favoriser le démarrage de l'offre et d'éponger les pertes d'exploitation, inévitables quand on parle de train de nuit.
Promesse non tenue
En choisissant SNCF Voyageurs, l'Etat a donc consenti à verser cette aide au démarrage pour une année (2024), renouvelable éventuellement deux fois. Une aide qui n'avait rien d'automatique puisque cette ligne entre dans le cadre des "services librement organisés" qui normalement ne sont pas subventionnés, à l'image des TGV.
Mais alors que la ligne est opérationnelle depuis presque deux ans, outre une exploitation parfois chaotique, l'Etat a constaté que SNCF Voyageurs n'a pas mis en place le service souhaité (et promis), en offrant notamment avec ses partenaires une desserte quotidienne (contre trois allers-retours par semaine aujourd'hui).
Cette aide était bien conditionnée à cette fréquence, assure notre source. Constatant qu'elle n'existe pas, l'Etat entend fermer le robinet pour 2026. Et de regretter les reproches qui lui sont faits par les associations.
Ces dernières n'épargnent néanmoins pas SNCF Voyageurs. Le collectif "Oui au train de nuit" regrette que "la SNCF ne vend pas les billets sur sa plateforme SNCF Connect, et n'informe même pas sur l'existence de ces trains qu’elle opère pourtant, limitant ainsi les recettes de la ligne".
"Au final, les trains de nuit internationaux sont en 2025 dans la même situation que les trains de nuit nationaux en 2015: la SNCF dégrade le service et encourage ainsi l’État à s’en débarrasser, sur fond d’un cadre réglementaire mal adapté. Ce n’est pas acceptable que les deux seuls trains de nuit internationaux qui desservent la France à l’année disparaissent", poursuit-il.
Le dossier, politiquement sensible, semble bloqué, notamment à cause de l'absence de gouvernement. Reste que la relance des trains de nuit demeure une priorité dans les efforts de décarbonation des transports et que le succès ce train de nuit est plutôt bon avec un taux moyen de remplissage de 70%. Le dernier mot pourrait donc revenir à Matignon quand un nouveau ministre des Transports sera nommé.