Prendre l'argent des autoroutes et surtout taxer les camions: le patron de la SNCF met la pression sur le gouvernement pour sauver le rail français

C'est le dernier combat de Jean-Pierre Farandou alors qu'il doit quitter la présidence du groupe SNCF dans les prochaines semaines: assurer le financement de la régénération du réseau ferré hors TGV, un sujet évoqué depuis des années mais qui devient aujourd'hui une urgence absolue.
Sur BFMTV ce jeudi, il a répété les menaces qui pèsent sur l'infrastructure.
"Il faut prendre les décisions maintenant, on est à un moment critique. Si on le fait pas, c'est la spirale négative avec 4.000 kilomètres de lignes abimées dès 2028, 10.000 en 2032. Cela veut dire des pannes, des retards, des ralentissements, c'est un cercle vicieux".
Concrètement, le réseau a besoin de 4,5 milliards d'euros par an, le contrat de performance sur dix ans entre l'Etat et SNCF Réseau prévoit 3 milliards d'euros par an, tandis que le groupe promet 500 millions supplémentaires. Il manque donc un milliard par an.
Le PDG propose depuis des années plusieurs pistes de financement, notamment capter une partie de la manne de dispositifs fiscaux européens de compensation carbone pour l'aérien et le transport routier (ETS) ou sur les Certificats d’économie d’énergie (CEE). Des pistes qui ne semblent pas avoir la faveur de Bercy.
"On a que les nuisances: les camions en transit polluent, défoncent les routes"
Jean-Pierre Farandou souhaite également qu'une partie des revenus des concessions autoroutières soit fléchées vers le rail. Les concessions arrivent à échéance entre 2031 et 2036 et génèrent environ 13 milliards d'euros de chiffre d'affaires par an.
Le PDG met également en avant la taxation des camions en transit en France. "Les Allemands qui sont confrontés à un énorme besoin de financement (du réseau ferré, NDLR) ont décidé de mettre en place une taxe poids lourd qui leur rapporte 8 milliards d'euros par an".
L'idée serait donc de réssuciter la fameuse écotaxe, dont la mise en place avait été vivement contestée en France, faisant plier le gouvernement.
"La France est un grand pays de transit, ces camions nous traversent, sans faire le plein chez nous, on a que les nuisances: ils polluent, ils défoncent les routes, on a que les nuisances, pas les gains. Est-ce qu'il n'y pas une forme de correction à apporter, il ne serait pas anormal qu'il y ait une forme de contribution? Il n'est pas anormal que lorsqu'on pollue, on finance le monde non polluant qu'est le ferroviaire", juge ainsi Jean-Pierre Farandou.
La balle est désormais dans le camps de Bercy, c'est d'ailleurs l'objet d'"Ambition France Transports", une série d'ateliers visant à reposer les bases d'un système de financement durable, robuste et pérenne des transports publics jusqu'en 2040, mais sans grever davantage les finances de l'Etat.