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La République Tchèque veut son train à grande vitesse, Alstom sur les rangs

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Début juin, un TGV de la SNCF a réalisé une tournée dans le pays alors que le gouvernement entend lancer les travaux afin de déployer des lignes à grande vitesse. Des contrats en perspective pour des acteurs français?

Son arrivée n'est pas passée inaperçue. Le dimanche 5 juin, un TGV est entré en gare de Prague en République Tchèque afin d'entamer une tournée de six jours dans le pays. Cette rame TGV Sud-Est 16 est particulière: le 26 février 1981, elle battait le record du monde de vitesse sur rail à 380 km/h.

L'objectif de cette tournée n'est pas seulement de faire briller les yeux des ferrovipathes. Ce TGV illustre un pan de l'histoire de la SNCF et la volonté des chemins de fer tchèques et du gouvernement de déployer dans le pays un réseau de lignes à grande vitesse pour moderniser un réseau ferré vieillissant et peu utilisé.

Des lignes lancées en 2035

Interrogé par Radio Prague International, Jiří Svoboda, directeur général de l'administration des chemins de fer tchèques précise le calendrier voulu par le gouvernement.

"Nous prévoyons que la construction des premiers tronçons commence en 2025. Les premiers trains transporteront des passagers sur les nouvelles lignes vers 2030".

Cinq tronçons de lignes à grande vitesse sont prévus; Praha (Prague) Běchovice-Poříčany, Přerov-Ostrava-Svinov et Brno, Modřice-Vranovice, ainsi que deux tronçons entre Prague et Dresde en Allemagne. Vitesse commerciale prévue: 320 km/h.

Le TGV de la SNCF en gare de Prague
Le TGV de la SNCF en gare de Prague © Michal Kamaryt, ČTK

Il s'agira également de s'interconnecter à un futur réseau à grande vitesse déployé par les pays du groupe Visegrad, à savoir la Hongrie, la Pologne, la Tchéquie et la Slovaquie.

Ce grand projet pourrait profiter à la France, grand spécialiste des trains à grande vitesse. La tournée de ce TGV orange n'est pas anodine.

SNCF Réseau impliqué dans le projet

Toujours selon Radio Prague International, "le gestionnaire du réseau ferroviaire tchèque Správa železnic coopère donc avec son homologue français SNCF Réseau pour la préparation des lignes à grande vitesse dans le pays, les Français apportant leur expertise stratégique et technique". Un contrat de 6 à 8 ans aurait été passé entre les deux entités.

Mais c'est surtout Alstom, le fabricant des TGV, qui pourrait profiter de ce projet. Interrogé, l'industriel nous explique que "du fait de son expérience dans la construction de systèmes ferroviaires complets (infrastructure, matériel roulant, etc.) et de sa présence locale, Alstom est évidemment en contact avec les acteurs locaux en République Tchèque à ce sujet. Mais nous n’avons aucune annonce à faire à ce sujet pour le moment."

Le groupe souligne néanmoins que "les trains à grande vitesse d’Alstom ont été conçus dès le départ en conformité avec les normes d’interopérabilité, notamment européennes: dès la phase de conception, les spécificités locales ont été prises en compte afin d’accélérer la mise à disposition des trains aux opérateurs le cas échéant. Donc, il est tout à fait possible d’imaginer d’autres trains à grande vitesse Alstom (autres que la rame TGV Sud-Est 16 du record du monde) rouler en République Tchèque, cette prédisposition de nos trains à l’interopérabilité fait même partie de leur ADN".

TGV: une réussite qui a du mal à s'exporter

Les opportunités d'exportation du TGV sont assez rares. Contrairement à ses métros et à ses trains régionaux, Alstom n'a jamais vraiment réussi à vendre le TGV à l'international malgré ses qualités uniques, ses records du monde de vitesse et son succès en France.

Outre un contrat en Corée du Sud (sous le nom KTX) et au Maroc, Alstom a signé un contrat important de 2 milliards de dollars aux Etats-Unis en 2016 avec la compagnie Amtrak (pour la création d'une ligne à grande vitesse entre Washington et Boston en passant par Philadelphie et New York). Plusieurs facteurs peuvent expliquer ces difficultés.

Mais Alstom devra certainement composer avec une concurrence agressive. On peut évoquer l'allemand Siemens, l'espagnol CAF, le coréen Hyundai, sans oublier le géant chinois CRRC. Tous ces industriels se battent dans les appels d'offre et sont prêts à d'importantes concessions pour emporter les lots.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business