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Contrat du siècle perdu en Belgique: Alstom obtient une victoire contre son concurrent

Un agent de la SNCB sur le quai d'une gare bruxelloise en 2022

Un agent de la SNCB sur le quai d'une gare bruxelloise en 2022 - John THYS / AFP

Le Conseil d'État belge suspend le choix de la SNCB pour ce contrat majeur à plus de 3 milliards d'euros qui a été remporté par l'espagnol CAF.

C'est une victoire de taille pour Alstom en Belgique. La chambre francophone du Conseil d’Etat belge a suspendu le jeudi 17 avril, le choix de la SNCB (la SNCF locale) de négocier exclusivement avec l'espagnol CAF pour un contrat majeur à 3,4 milliards d'euros afin de lui fournir des centaines de trains conventionnels.

La plus haute autorité administrative du pays a estimé que le critère de transparence rendu obligatoire par la législation sur les marchés publics n’a pas été respecté et que la méthode utilisée par l’évaluation des offres n’est pas compréhensible.

Suite à cette décision, la SNCB estime qu'il n'y aura "a priori" pas de nouvel appel d’offres et mise sur une simple obligation de mieux motiver sa décision de choisir l'industriel espagnol.

Contacté, l'industriel indique qu'il ne souhaite pas commenter cette décision favorable pour le moment.

"Décision choquante"

C'est en tout cas une première victoire juridique pour Alstom qui depuis le début conteste le choix de la SNCB. Le groupe français était en effet convaincu d'être le favori, notamment grâce à la carte de la production locale et une offre tarifaire mieux-disante de plus de 100 millions d'euros. Le patron d’Alstom Belgique, Bernard Belvaux, dénonçait alors "la décision choquante" de la compagnie ferroviaire publique.

"Comment peut-on promouvoir une offre plus chère sans différencier la note globale et avec un impact défavorable sur notre site de production à Bruges et sur l’ensemble de l’industrie ferroviaire belge?", s'est-il interrogé.

L'industriel français semble avoir actionné tous les leviers politiques pour remettre en cause cette décision et avait saisi le Conseil d'État belge en déposant un recours.

Lors de l'audience qui a fait suite à cette saisine, l’auditeur de l'institution avait préconisé de suspendre la décision de la SNCB, préconisation donc suivie par le Conseil.

Pour autant, la SNCB s'est attachée il y a quelques semaines à expliquer son choix, rejetant point par point les arguments d'Alstom. Sans jamais nommer Alstom, Vincent Bayer, porte-parole de la Société nationale des chemins de fer belge rappelle qu'elle "ne peut accorder un avantage à la production locale, dans le cadre européen, sous quelque forme que ce soit". Sur la question du prix supérieur qui aurait été proposé par CAF, la SNCB rejette tout soupçon.

"La SNCB a stipulé à l'avance (…) que le choix serait fait sur la base du meilleur rapport qualité-prix. Les offres n'ont donc pas été évaluées uniquement sur base du critère du prix."

"C'est l'application combinée du critère du prix et des critères d'attribution qualitatifs qui a conduit au résultat actuel. De ce point de vue, il est donc logique que le soumissionnaire préférentiel ne soit pas nécessairement le moins-disant."

Soutien du gouvernement belge

Dans cette affaire, Alstom bénéficie du soutien du gouvernement belge. Jean-Luc Crucke, le ministre de la Mobilité a déclaré qu'il ne reprochait pas à la SNCB d’avoir choisi CAF, mais estime que si l'appel d'offres avait inclus dans le cahier des charges une disposition tenant compte de l’empreinte carbone de la construction des trains, la décision aurait été différente.

La SNCB estime au contraire que des "critères d'attribution concernant le lieu de production sont discriminatoires à l'égard des participants d'autres États membres, et le lieu de production n'est pas un critère pertinent pour la qualité de l'offre".

C'est la seconde fois depuis le début de l'année que CAF dame le pion à Alstom. Le groupe a été écarté du contrat portant sur 150 trains classiques pour les chemins de fer marocains pour près de 3 milliards d'euros. Alstom a néanmoins remporté celui pour 18 TGV.

En France, c'"est également CAF qui a été choisi pour fournir de nouvelles rames Intercités (appelées Oxygène) pour les lignes Bordeaux-Marseille, Paris-Toulouse et Paris-Clermont Ferrand.

Olivier Chicheportiche Journaliste BFM Business