Catastrophe de Brétigny: la SNCF veut négocier à l'amiable

La catastrophe de Brétigny aurait-elle pu être évitée? Les compte-rendu d'inspection de la SNCF montreraient que des anomalies avaient été repérées dès février. - -
Sept morts, une dizaine de blessés, le déraillement du Paris-Limoges survenu le 12 juillet en gare de Brétigny-sur-Orge a dramatiquement mis en lumière certaines insuffisances du réseau ferroviaire français. Alors qu'un rapport interne fait parler de lui dans la presse, une association d'usagers dénonce une tentative "d'achat du silence des victimes".
Les familles des victimes, justement, doivent être reçues samedi après-midi à Paris en présence du procureur d'Évry et de Philippe Cèbe, coordonnateur national du dispositif d'aide aux victimes de l'accident. Leurs motifs d'inquiétude sont nombreux. BFMTV.com fait le point avant cette importante réunion.
> Quel est l'objet de la réunion avec les familles de victimes?
Un courrier a été envoyé le 26 août aux familles des victimes du déraillement du train par Philippe Cèbe, coordinateur national du dispositif d'aide aux victimes de l'accident, précisant la procédure pour une indemnisation à l'amiable.
Alors qu'une information judiciaire a été ouverte le 24 juillet dernier, plusieurs familles ont porté plainte pour "sabotage en bande organisée". Pour maître Xavier-Philippe Gruwez, avocat de treize familles de victimes, le manque d'entretien du réseau résulte d'"une entente (...) entre la SNCF et RFF (Réseau ferré français)". Poussant son raisonnement plus avant, l'avocat a déposé plainte pour "assassinats". Pour lui l'absence d'invervention sur l'éclisse supposée défectueuse est un "acte criminel".
La réunion de samedi entre les passagers du train et les autorités judiciaires doit permettre d'informer les victimes sur l'enquête et sur la mission de Philippe Cèbe. Et surtout leur proposer de signer une convention d'indemnisation à l'amiable.
> Pourquoi la procédure d'indemnisation est contestée avant d'avoir commencé?
"On veut étouffer l'affaire. On veut acheter le silence des victimes", a déclaré Willy Colin, porte-parole de l'Avuc (l'Association des voyageurs usager de chemin de fer), lors d'un point de presse à Paris vendredi, à la veille de la réunion avec les familles des victimes.
"La justice n'est pas passée. L'instruction n'est même pas terminée et on commence à indemniser à l'amiable", a déclaré Willy Colin. "On a le sentiment que la SNCF est en train de se dérober." Selon lui, avec cet accord, la SNCF veut limiter le nombre de plaignants lors d'un éventuel procès. "On veut faire en sorte qu'il y ait le minimum de personnes au procès".
L'Avuc demande par ailleurs que toute la lumière soit faite sur l'état du système ferroviaire, jugeant le réseau ferré "vulnérable".
"Le système de maintenance est défaillant, il y a des carences. Donc on demande que toutes les données sur la sécurité, l'état des voies, la signalisation soient rendues publiques", a déclaré Willy Colin. Il a ajouté que l'association souhaitait la création d'une commission d'enquête parlementaire sur la maintenance du réseau.
> Sur quels points précis la SNCF est-elle mise en difficulté?
La SNCF, par la voix de son patron Guillaume Pepy, a toujours expliqué qu'"à aucun moment nous n'avons dissimulé quoi que ce soit", y compris un possible "défaut de maintenance". Mais dans un rapport interne remis à la justice avant même l'ouverture d'une information judiciaire, la compagnie fait preuve d'une extrême prudence. Elle semble concéder l'absence d'un boulon sur une éclisse, cette pièce qui relie deux rails longitudinalement, mais laissent le soin aux deux enquêtes en cours, celle, technique, du bureau enquête sur les accidents de transports terrestres (BEA-TT) et celle de la justice, pour établir le lien formel avec l'accident.
Jeudi, Le Figaro a ravivé la polémique, pointant des anomalies repérées dès février, soit des mois avant l'accident au niveau de l'aiguillage mis en cause. "Les comptes rendus d'inspection des voies de Brétigny-sur-Orge réalisés entre février 2013 et le 4 juillet, soit huit jours avant le déraillement (...) pointent très clairement des problèmes d'entretien et de maintenance", assurait le quotidien qui avait pu consulter ces documents. Ce alors que la SNCF avait indiqué que rien d'anormal n'avait été détecté lors de la dernière inspection visuelle de la voie le 4 juillet.
De manière plus anecdotique, malgré son opération "transparence", la SNCF elle, a dégringolé à l'avant-dernière place du dernier baromètre Posternak-Ifop sur l'image des entreprises.