8.000 euros par mois, 36 heures par semaine mais un métier stressant: les contrôleurs aériens sont-ils des privilégiés?

La grève des contrôleurs aériens menée par deux syndicats minoritaires provoque ce vendredi de nombreuses perturbations. La DGAC a ordonné une réduction du nombre de vols de 40% à Paris et Paris-Beauvais et de 50% à Nice. Ailleurs, les réductions atteindront au minimum 30%. Ce sont des dizaines de vols qui sont annulés, provoquant la colère de nombreux Français qui devaient partir en vacances.
"272 personnes dans notre pays vont impacter le bien-être de centaines de milliers de personnes", s'étrangle Philippe Tabarot, le ministre des Transports qui entend ne "pas céder au chantage".
Comme souvent, la polémique commence à enfler au sujet de ces professionnels, dont la mission est essentielle pour assurer la sécurité des décollages et des atterrissages, mais qui sont perçus par l'opinion et certains politiques comme des privilégiés. Il faut rappeler que ces "ingénieurs du contrôle de la navigation aérienne" ou ICNA ne sont que 3.400 en opération en France. Ce sont par ailleurs des fonctionnaires de catégorie A. Ils ont suivi au moins quatre ans de formation.
Salaires
Comme ce sont des fonctionnaires, leurs rémunérations sont encadrées par la loi. Leur salaire brut moyen est "de l'ordre de 96.000 euros par an, soit environ 8.000 euros bruts mensuels" en moyenne, selon un rapport du Sénat d'octobre 2024. En début de carrière, il tourne autour de 5.500 euros brut par mois et peut grimper à 9.000 euros net en fin de carrière, grâce aux primes.
Une prime de flexibilité allant jusqu’à 550 euros mensuels est offerte aux aiguilleurs qui choisissent de travailler en période de pointe. C'est un niveau très élevé qui place cette population tout en haut de l'échelle sociale. Tous les trois ans, un protocole social permet de négocier de nouveaux avantages. En échange, le principal syndicat de la profession s'était engagé à ne plus faire grève, mais ce n'est pas le cas des minoritaires.
Temps et conditions de travail
Sur le papier, les aiguilleurs du ciel sont des chanceux. Sur une semaine, ils travaillent en moyenne 32 à 36 heures. Par ailleurs, pour chaque jour travaillé, ils bénéficient d'un jour de repos en plus des 25 jours de congés payés légaux, soit 18 jours par an. Pendant la journée, ils doivent prendre des pauses (obligatoires) de 30 minutes après 2h30 maximum à leur poste, soit 8 heures de pauses par semaine.
Beaucoup rêveraient de ce rythme. Pour autant, il a été conçu pour préserver la concentration de ces professionnels qui rappelons-le est essentielle pour la sécurité de milliers de passagers. Il faut bien comprendre que le métier est difficile, pénible, pointu, stressant, exige une concentration maximale, une capacité à gérer la tension, et des capacités intellectuelles importantes. Par ailleurs, les plannings impliquent des horaires décalés, les opérations dans les grands aéroports s'étendent jusqu'à 23h30-minuit et débutent à 6h.
Retraite
Considérée comme une profession à haute pénibilité, les contrôleurs aériens bénéficient d'un régime de départ anticipé à 59 ans. Ils échappent donc à la réforme voulue par le gouvernement. En avril 2024, une revalorisation des pensions et une augmentation des primes ont été actées.
Mais des abus
"Dans les plus grands centres de contrôle, ils ont tenté d'imposer la badgeuse pour contrôler les temps de travail. Pour contrer cela, on s'organise pour passer les badges des uns et des autres, avec des astuces variées selon les équipes", explique au Point un contrôleur aérien.
C'est ce type d'abus qui est dénoncé par l'aviation civile qui entend mieux contrôler la présence des agents à leurs postes. Il s'agit d'éviter la quasi-catastrophe à l'aéroport de Bordeaux où deux avions ont frôlé la collision car un seul aiguilleur était actif. Chaque avion est en effet géré par trois agents: le premier s'occupe des opérations au sol, un autre des décollages, un autre des atterrissages.