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Peut-on rouvrir la centrale nucléaire de Fessenheim?

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Marine Le Pen, Eric Zemmour ou encore Nicolas Dupont-Aignan ont plaidé pour la réouverture de la centrale de Fessenheim, fermée par Emmanuel Macron. Une solution face à la crise énergétique?

L'équation énergétique se complique pour la France. Dans un contexte de tensions diplomatiques avec le principal fournisseur de gaz en Europe – la Russie -, le pays fait face aux déboires de son parc nucléaire vieillissant. "On a quasiment la moitié de la puissance nucléaire indisponible" explique sur BFM Business Nicolas Goldberg, senior manager chez Colombus Consulting et spécialiste de l'énergie. "Parce qu'on recharge les réacteurs, qu'on a des maintenances qui avaient été repoussées par le Covid-19, parce qu'on prolonge le parc nucléaire donc il y a plus de travaux…"

A cela s'ajoute les problèmes de corrosion découverts l'année dernière sur les centrales les plus récentes, qui doivent être examinées les unes après les autres. Et donc les réacteurs doivent être mis à l'arrêt. Résultat, EDF prévoit une production d'électricité au plus bas en 2022.

Un démantèlement sur 15 ans

Alors l'idée de remettre en service la centrale de Fessenheim fait son chemin pour certains candidats à la présidentielle. Marine Le Pen plaidait, en novembre dernier, pour sa réouverture tout comme Eric Zemmour l'a récemment souhaité sur BFMTV. Nicolas Dupont-Aignan réclame aussi sa remise en service.

Une solution crédible? La centrale de Fessenheim produisait plus de 12 TWh annuel. On est loin des centrales les plus puissantes de France mais dans un contexte de tension énergétique, le manque s'ajoute aux autres.

Reste que la décision de fermer date désormais de 2019 et que l'abrogation de l’autorisation d’exploiter a été actée par décret du 18 février 2020. Voilà donc deux ans qu'EDF s'emploie à préparer le démantèlement de la centrale. Des préparatifs de plusieurs années tandis que le démantèlement total prendra ensuite une quinzaine d'années.

Déjà les deux réacteurs ont été mis à l'arrêt et d'ici l'été tout le combustible usé (radioactif) aura été évacué. Dès la lors, la centrale ne sera plus qu'une coquille vide. Plusieurs "opérations techniques majeures" ont aussi été réalisées, indique la Société française d'énergie nucléaire (Sfen) sur son site internet. "Le retrait de tous les rotors basse pression des turbines et d’un rotor alternateur a été effectué."

La sécurité prime

Peut-on relancer la production d'énergie? Techniquement oui. A condition de remplacer les pièces manquantes. Selon EDF, 180 pièces ont été récupérées dont d'immenses rotors qu'on ne peut pas remplacer facilement. En clair, il faudrait des années pour fabriquer et installer toutes les nouvelles pièces.

Surtout, il existe un ensemble de mesures règlementaires dont on ne saurait se passer pour des raisons de sécurité. Par exemple, la centrale n'était pas équipée avec le diesel d’ultime secours (DUS), une sécurité supplémentaire imposée après la catastrophe de Fukushima. La fermeture de Fessenheim ayant été actée, EDF avait renoncé à ce dispositif pour ce site. Son implantation "représente plusieurs années d’études et de travaux non réalisés" indique la Sfen.

La réouverture ne pourra donc pas être immédiate et l'Etat a probablement plus intérêt à avancer sur la nouvelle génération de réacteurs nucléaires, que ce soit les EPR ou bien les mini-centrales (SMR).

Thomas Leroy Journaliste BFM Business