Sous-marins nucléaires "repositionnés" par Donald Trump: qu'est-ce que cela change dans le rapport de force avec Moscou?

Donald Trump a déclaré ce vendredi 1er août avoir demandé le "repositionnement de deux sous-marins nucléaires" en réaction à des commentaires "incendiaires" de l'ancien président russe Dmitri Medvedev, qui n'occupe pourtant plus de fonctions officielles.
Il s'agit de la première fois que le président américain évoque l'arsenal nucléaire sur la question ukrainienne alors qu'il a donné un ultimatum à Vladimir Poutine pour entamer des négociations de paix.
Dans le détail, Donald Trump a écrit sur son réseau Truth Social avoir "ordonné que deux sous-marins nucléaires soient positionnés dans les zones appropriées, au cas où ces déclarations idiotes et incendiaires soient plus sérieuses que cela".
Deux types de sous-marins
Le président républicain n'a pas donné de précision quant aux sous-marins concernés. Il y a en fait deux types de sous-marins nucléaires.
"Cela peut d'abord désigner un sous-marin dont le moteur est nucléaire. Un réacteur va propulser le bâtiment mais il n'y aura que des armes conventionnelles à bord", explique sur BFMTV Emmanuelle Galichet, maître de conférences en sciences et technologies nucléaires au Conservatoire national des arts et métiers (Cnam).
Ces sous-marins d'attaque peuvent notamment tirer des missiles Tomahawk, sans tête nucléaire, dont la portée maximale est réputée atteindre 2.500 kilomètres (soit environ la distance entre Paris et Moscou).
Dans la nuit du 21 au 22 juin, "une demi-douzaine" de ces missiles ont été tirés depuis un sous-marin en direction d'installations nucléaires iraniennes.
Des portées très importantes
"Cela peut également être un sous-marin nucléaire lanceur d'engin (SNLE), dont les missiles sont nucléaires", poursuit Emmanuelle Galichet.
Les États-Unis disposent de 14 sous-marins de ce type (la France en a 4). Ils sont aussi propulsés par des réacteurs mais eux emportent des missiles nucléaires. Ces bâtiments sont dédiés à la dissuasion. Ils ont pour mission de se cacher dans les océans et de se tenir prêts à procéder à une frappe atomique.
Ces SNLE tirent le missile Trident II D5, considéré comme "le fer de lance de l'arsenal stratégique états-unien, puisqu’il emporte 970 des 1.770 têtes nucléaires actuellement déployées par le pays", selon une note d'Étienne Marcuz de la Fondation pour la recherche stratégique (FRS), un centre de recherche français.
Selon la FRS, la portée maximale de ce missile est "estimée aux alentours de 11.000 kilomètres et testée pour la dernière fois en juin 2023 en Atlantique (10.600 km)".
Pour avoir un ordre d'idée, New York se trouve à 7.500 kilomètres de Moscou. Un missile Trident II D5 peut donc couvrir une distance presque deux fois supérieure.
"Du fait de cette très longue portée, ils peuvent atteindre n'importe quelle capitale mondiale, quel que soit leur emplacement", observe Emmanuelle Galichet, spécialiste du nucléaire au Cnam.
"Pas de message clair"
Ainsi, l'annonce de Donald Trump sur le fait de "rapprocher" ces sous-marins est difficile à interpréter. Ces derniers n'ont pas besoin d'être repositionnés pour menacer la Russie.
"Cela ne veut pas dire grand-chose et les Russes le savent très bien", estime Romain Mielcarek, journaliste spécialiste des questions de défense pour BFMTV, qui estime que "Donald Trump ne donne pas de message clair".
"Très souvent, la dissuasion nucléaire fait retomber les escalades verbales. La peur de l'arme atomique peut calmer les ardeurs de Poutine", estime toutefois Emmanuelle Galichet.
Cette poussée de fièvre intervient à un moment où Washington durcit le ton envers Moscou sur la guerre en Ukraine. Malgré ses menaces et l'ultimatum qu'il a donné à Vladimir Poutine, Moscou répond en intensifiant ses frappes.
Les forces armées russes n'ont jamais lancé autant de drones contre l'Ukraine qu'en juillet (6.297). Entre janvier et juin, la Russie a triplé le nombre de missiles envoyés sur l'Ukraine (77 contre 239, puis 198 en juillet), selon les données analysées par l'AFP à partir de chiffres fournis par Kiev.