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"Il y aura toujours des avions de chasse": le patron de l'innovation au ministère des Armées nous décrit la guerre du futur

Le général Patrick Aufort, directeur de l'AID

Le général Patrick Aufort, directeur de l'AID - AID - 2025

Le directeur de l'Agence de l'innovation de défense revient sur les grands enjeux autour de la guerre aérienne et des perspectives futures.

Le futur commence demain. Et en matière de guerre aérienne, il se prépare dès maintenant. Le général Aufort, patron de l'Agence de l'innovation de défense (AID) explique à BFM Business que la guerre aérienne du futur ne se déroulera pas que dans ciel.

"Le domaine aérien ne sera pas le seul concerné. On se dirige vers des opérations multi-milieux, multi-domaines", énonce le général Aufort.

Du sol à l'espace, tous les moyens militaires peuvent être sollicités: les batteries de défense sol-air à terre pour contrer des menaces comme des missiles, les drones dans les airs pour surveiller des zones ou espionner les moyens ennemis, les satellites en orbite qui servent de relais de communication.

L'ère du combat collaboratif

Le chef de l'AID est affirmatif: "la guerre aérienne du futur sera une guerre de combat collaboratif. Dans 30 ans, il y aura toujours des avions de chasse, des hélicoptères, mais ils seront complétés par des objets de tout type, comme des drones. Il va donc falloir être capable de relier tous ces appareils entre eux."

Quant aux nouvelles menaces, comme les ballons espions chinois, elles sont surveillées de près. Les investissements annoncés au deuxième jour du salon du Bourget par le ministre des Armées Sébastien Lecornu, pour "muscler" les capacités dans la "très haute altitude", contribuent à faire de la France "un acteur dans le domaine, pour l'investir de manière permanente, avec des objets qui restent en l'air longtemps", précise le général Aufort.

L'IA, l'aide du pilote

L'AID travaille activement sur le cockpit du futur, celui du Rafale, mais aussi celui de l'avion de combat du futur. Le déploiement de l'intelligence artificielle pose beaucoup de questions sur la manière de concevoir ce futur cockpit et sur l'usage qui sera fait de l'IA.

"Tout l'enjeu de l'IA, le gros défi, c'est la capacité à présenter au pilote toutes les informations disponibles, mais sans le noyer dans la masse ni provoquer de surcharge mentale et cognitive. L'IA doit être une aide à la décision, mais ne remplace pas l'homme dans la machine", prévient le général Aufort.

Des travaux sont en cours pour développer une IA "frugale", c'est-à-dire qu'elle ne soit pas trop gourmande ni en consommation électrique, ni en consommation de données. Elle devra bien évidemment être "résiliente", c'est-à-dire qu'il faudra la protéger des cyberattaques, mais aussi des tentatives de brouillage.

Des développements rapides

Dans tous les cas, les innovations, les logiciels et les équipements qui sont en cours de développement ou qui le seront dans le futur devront être "très faciles à faire évoluer dans le temps", avertit le patron de l'AID. Car les matériels et les logiciels évoluent vite, et même de plus en plus rapidement – comme c'est le cas en Ukraine par exemple avec de nouvelles technologies de drones qui arrivent tous les deux à trois mois sur le champ de bataille.

"On sait très bien qu'on ne va pas livrer un matériel pour 10-15 ans, il faudra être capable de le faire évoluer dans le temps, et il faut que ce soit très facile", affirme le général Aufort.

C'est tout l'enjeu de l'AID, qui travaille à la fois sur le court, le moyen et le long terme. Les projets présentés au salon du Bourget d'ailleurs la part belle au domaine spatial: du lanceur Dephys au projet Toutatis pour surveiller les satellites, en passant par le projet Keraunos pour les communications satellitaires, la guerre aérienne prend de l'altitude.

Helen Chachaty