ÉDITO. François Bayrou vient de gagner un peu d’oxygène

Le Premier ministre a-t-il passé avec succès l’épreuve du discours de politique générale (DPG)? Sur la forme, on a connu meilleur DPG. François Bayrou a enchaîné les hésitations, s'est perdu dans ses feuilles… Tout cela sur 1h30 d'un discours de politique générale "très général", pour plagier l’expression d’un responsable patronal.
Il faut tout de même souligner l'effort de François Bayou pour replacer tout le monde dans l'hémicycle face à ses responsabilités. Sa longue introduction (15 minutes) sur l'histoire de la dette était une manière originale de débuter l'exercice, ses propos ont sonné juste.
Reste quand même beaucoup de blabla, beaucoup de propos assez vagues… Mais pouvait-il en être autrement? La réponse est non bien sûr.
Le PS déçu, les partenaires sociaux ravis
Non, car François Bayrou est face à une mission impossible: tenir les deux bouts d’une omelette ingérable où se mélangent PS et LR. C'est du jamais-vu dans la Ve République. Le tout, dans un environnement d’instabilité politique digne de la IVe République. Quatre Premiers ministres en un an, on n'a pas connu ça depuis 1934.
François Bayrou n’a pas dit grand-chose, mais il n’avait pas le choix. Et sur les retraites, qui est le gros objet politique du moment, il s’est montré assez habile en réalité.
D’abord, il a "suspendu la suspension" de la réforme Borne, réclamée à les socialistes qui en sont sortis fort maris. Donner trois mois pour trouver un deal sinon on retombe sur la situation actuelle, c’est de la prestidigitation politique. En réalité, il ne touche pas au cours des choses.
Ensuite l'idée de placer le dossier entre les mains, non pas des politiques, mais des partenaires sociaux, est assez habile. Parce qu’en réalité, ils ont envie d’y aller! Souvenez-vous de la tribune inédite cosignée avant les fêtes par l'ensemble des partenaires sociaux (hors-CGT) appelant au retour de "la stabilité, la visibilité et la sérénité".
Droit de veto
Les barrières de sécurité financière posées par Matignon, dont la seule exigence est de ne pas dégrader les comptes des pensions, avec la double sécurité de retomber sur la réforme précédente en cas d'échec des négociations, sorte de droit de veto du patronat, est plutôt bien joué. Toutes les craintes ont été levées.
Pourrait-on trouver un accord? On n'en est pas là pour autant. Simplement, François Bayrou a gagné un peu d’air, au moins jusqu’à l’été. Sans que ce ne soit une assurance-vie pour autant.
Il ne faut pas se leurrer. Ce gouvernement ne pourra pas faire beaucoup mieux que les précédents. Avec un pôle régalien très à droite, et une hausse des dépenses sociales provoquée par la gauche, ce drôle d'attelage va très rapidement faire des étincelles. Jusqu’à mettre le feu à l'exécutif ? Telle est la question.