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La fiscalité, grande absente du discours de politique générale de François Bayrou

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Le Premier ministre n'a pas donné beaucoup d'indications sur les économies à faire pour redresser les finances publiques.

Le choc fiscal n'a pas eu lieu. Alors qu'à l'approche du discours de politique générale de François Bayrou, des économies étaient attendues - un retour de l'ISF étant même évoqué de façon répétée - aucune n'a été véritablement annoncée par le Premier ministre.

Le nouveau locataire de Matignon a pourtant commencé son discours par une litanie rappelant les dépenses consenties au fil des décennies par les différents gouvernements, et les points de dette sur PIB accumulés avec ces politiques. Le "surendettement" a même ouvert le discours, signe de la centralité du thème.

"J’affirme que tous les partis dits de gouvernement ont une responsabilité dans la situation créée ces dernières décennies. Et j’affirme que tous les partis d’opposition, demandant sans cesse des dépenses supplémentaires, ont dansé aussi le tango fatal qui nous a conduits au bord de ce précipice. Cette dette est une épée de Damoclès au-dessus de notre pays et de notre modèle social", a évoqué François Bayrou.

Pourtant, aucune piste de fiscalité supplémentaire concernant les hauts revenus n'a été évoquée. Ce n'est qu'en soirée, après le discours, qu'il a esquissé une taxation portant sur les hauts patrimoines. La question de la taxation des entreprises n'a elle pas été abordée, si ce n'est pour fustiger, au contraire, leur taxation surabondante.

"Il existe chez nous un vieux réflexe : cibler les entreprises et plus spécialement les entreprises françaises, et en particulier celles qui réussissent le mieux à l’exportation", a insisté le Premier ministre.

"Ma conviction est que, nos entreprises, nous devons leur faciliter la tâche, dans des conditions fixées par la démocratie sociale. Elles doivent être prémunies contre des augmentations exponentielles d’impôts et de charges", a-t-il tranché, semblant exclure a priori toute hausse massive d'impôt sur les sociétés. Ce, alors que son prédecesseur Michel Barnier avait lui souhaité cibler 300 grandes entreprises, de façon temporaire.

Concessions pour le PS

Pire, dans le discours de politique générale de Michel Barnier, de nouvelles dépenses semblaient possibles. Pas sur le volet des retraites, où le Premier ministre a fixé en loi d'airain la préservation de la stabilité financière, mais sur la santé, notamment.

Le mot fiscalité n'a pas été évoqué, à part pour mentionner que les entreprises ne devaient pas subir des prélèvements exponentiels. Mais on a senti beaucoup de dépenses nouvelles", constatait ainsi Denis Ferrand, directeur général de Rexecode, sur le plateau de BFM Business.

Impression confirmée par le sénateur PS Philippe Brun peu après le discours, sur BFM Business là encore. L'élu avançait les concessions faites par Matignon pour s'assurer du soutien du parti de gauche. "Nous avons obtenu une augmentaton de l’ONDAM [objectif national des dépenses d'assurance maladie, NDLR] avec 2 milliards d'euros de plus pour l’hôpital, et l’amoindrissement de l’effort dans l'enseignement, avec 2.000 postes supprimés et pas 4.000", a-t-il listé.

L'outre-mer devrait aussi de recevoir des fonds importants, selon le PS ; seules rentrées fiscales concédées, une augmentation de 0,1% de la taxe sur les transactions financières, et un amoindrissement de 400 millions d'euros du crédit impôt-recherche (CIR).

Les finances publiques devraient donc s'alourdir encore un peu plus - d'autant que François Bayrou a aussi annoncé la fin du déremboursement des médicaments et consultations, une ligne rouge du RN cette fois. Charles de Courson, député Liot et rapporteur général de la Commission des finances de l'Assemblée nationale, a critiqué le flou autour du futur budget.

"Ce discours de politique générale est resté très vague. On nous a dit qu'on visait 5,5% de déficit public en 2025, mais la question, c'est comment on y revient", a-t-il asséné.

Il a également attaqué la rigueur annoncée : le ministre de l'Economie, Eric Lombard, avait annoncé 50 milliards d'euros d'effort budgétaire à réaliser. 20 milliards environ proviendraient de recettes supplémentaires, 30 milliards d'euros d'économies. "Est-ce que c'est bien raisonnable, alors que Bruxelles ne demande d'atteindre les 3% qu'en 2029 ? Cela ne fait que 0,6% d'efforts à réaliser par an, sur 5 ans. Et 0,6 point de déficit, c'est 18 milliards d'euros", a rappelé le rapporteur général. Pour rappel, la France accusait en 2024 un déficit de 6,1%.

Valentin Grille