BFM Business
Economie et Social

"Conclave" sur les retraites: top départ de négociations minées et sous haute surveillance

Les partenaires sociaux se réunissent en conclave ce jeudi.

Les partenaires sociaux se réunissent en conclave ce jeudi. - AFP

Les partenaires sociaux doivent essayer de se mettre d'accord sur une nouvelle réforme des retraites. Alors que tout les oppose, et que le gouvernement fait déjà entendre sa voix.

À partir de ce jeudi après-midi et jusqu'à fin mai, syndicats et patronats se retrouveront toutes les semaines en "conclave" pour rouvrir le dossier des retraites, et tenter d'accoucher d'une nouvelle réforme. Problème: les partenaires sociaux s'opposent sur tout, et ne sont même pas d'accord sur l'objectif des discussions.

Côté patronat, les retraites sont en grand danger, chiffres de la Cour des comptes à l'appui, et l'objectif est de pérenniser le système. Pas question donc d'abroger la réforme de 2023. Le Medef veut a minima préserver les 64 ans, et considère même qu'il faudrait "pousser l'âge légal un peu plus loin". De son côté, la CPME est prête à discuter des 64 ans, mais à condition de trouver des alternatives, comme introduire une dose de capitalisation dans le système, indexer l'âge de départ sur l'espérance de vie, ou encore limiter la revalorisation annuelle des pensions.

Les syndicats ont un autre agenda

Des propositions qui ne passent absolument pas côté syndicats, pour qui la priorité n'est pas le financement, mais la justice sociale. Les organisations syndicales considèrent que l'avenir financier du système reste sous contrôle.

Pour la leader de la CGT Sophie Binet, l'abrogation coûterait "10 milliards d'euros" à horizon 2030, un chiffre "tout à fait soutenable". Pour combler le trou, la CGT veut pousser l'égalité salariale entre les femmes et les hommes, et taxer davantage les revenus des entreprises, l'intéressement et la participation.

Même son de cloche à la CFE-CGC, pour qui "si on restaure un peu de justice, il n'y a pas de problème de financement". Quant à la CFDT elle-même, la priorité est de "sortir les yeux des tableaux Excel, et de regarder la situation réelle des individus". Marylise Léon fait du retour à 62 ans "la base des discussions".

La Carte blanche : Dominique Carlac'h - 25/02
La Carte blanche : Dominique Carlac'h - 25/02
6:14

L'exécutif reste aux aguets

Quant au gouvernement, il donne déjà de la voix. Censé pourtant rester en retrait et laisser les partenaires sociaux rouvrir les discussions "sans tabou", plusieurs poids lourds de l'équipe Bayrou se font déjà entendre, et une lettre a été envoyée aux participants par le Premier ministre, ce mercredi, veille du début des négociations.

Le ministre de l'Économie et des Finances Eric Lombard considère par exemple qu'abroger la réforme de 2023 serait "extrêmement coûteux et (qu') on n'en a absolument pas les moyens". Jugeant que le niveau de vie des retraités est "en moyenne, supérieur" à celui des actifs, le patron de Bercy se dit "plutôt" favorable à une contribution accrue de leur part.

Même son de cloche rue de Grenelle, au ministère du Travail: pour la ministre Astrid Panosyan-Bouvet, "rien n'est gratuit: si on veut revenir sur les 64 ans, encore faut-il trouver les ressources qui vont avec. Les retraites, ça ne doit pas être la pyramide de Ponzi". La ministre considère également que l'introduction d'une part de capitalisation "doit faire partie des discussions".

Et sa ministre de tutelle Catherine Vautrin a presque clos le débat avant même qu'il ne commence. "Notre seul objectif est de trouver les moyens d'aller vers l'équilibre financier". À quel horizon? Voilà au moins un objet de discussion entre partenaires sociaux.

Mais la Cour des comptes a été claire: plus le temps passe, plus le retour à l'équilibre sera difficile à atteindre. Les magistrats ont évalué le déficit des retraites à 6 milliards cette année, à 15 milliards d'euros en 2035, et à près de 30 milliards en 2045.

Thomas Sasportas