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10.000 postes à pourvoir: pourquoi les salons de coiffure n'arrivent pas à recruter

Le secteur de la coiffure pèse 6 milliard d'euros et 180.000 actifs.

Le secteur de la coiffure pèse 6 milliard d'euros et 180.000 actifs. - AFP

Les difficultés de recrutement dans le secteur de la coiffure ont été amplifiées par la crise sanitaire.

La France manque… de coiffeurs. Dans les villes et les villages, les salons de coiffure peinent à recruter des salariés: la pénurie de main d'œuvre, ancienne, a été amplifiée par la crise sanitaire, et embaucher une nouvelle personne relève parfois de la mission impossible. Le secteur aurait besoin d'au moins "10.000 collaborateurs" supplémentaires pour répondre à la demande, soit 15 à 20% d'effectifs manquants dans les salons, avance Christophe Doré, président de l'Union nationale des entreprises de coiffure (Unec).

La pandémie est passée par là: les salons de coiffure ont été fermés pendant de longs mois en 2020, puis ont fonctionné en sous-régime lors des couvre-feux. Lorsqu'ils ont rouvert leurs portes, certains de leurs salariés ont préféré ne pas revenir, ne voulant plus retrouver les horaires contraignants du métier, à l'image de ce que l'on observe dans la restauration.

"La coiffure est un métier qui peut être difficile: c'est physique, on est debout toute la journée, on travaille le samedi", souligne Franck Provost, fondateur du géant français de la coiffure Provalliance et également à la tête du Conseil national des entreprises de coiffure (Cnec). Après les confinements successifs, "certains salariés ont décidé de trouver un autre rythme de vie, parce qu'ils s'étaient habitués à passer leurs soirées et leurs weekends en famille", poursuit-il.

Pas assez d'apprentis

Même si cela ne concerne qu'une petite partie des effectifs des salons, ce phénomène s'invite dans un secteur déjà en tension depuis plusieurs années. En cause, la réforme de l'apprentissage, menée en 2013 sous le quinquennat Hollande. Le gouvernement avait taillé dans les aides à la formation, ce qui a eu pour effet de diminuer le nombre d'apprentis dans les salons de coiffure. "Il faut cinq ans pour former un coiffeur", ce qui explique que l'on manque de candidats aujourd'hui, précise Christophe Doré.

Une concurrence plus forte, aussi, des "freelances" et des coiffeurs à domicile. Parmi ceux qui quittent les salons de coiffure, tous n'abandonnent pas le métier: ils sont de plus en plus nombreux à se lancer en indépendant ou en micro-entreprise. Plus de flexibilité qu'en étant salarié et moins de charges qu'en ouvrant un salon. Selon les dernières données de l'Unec, les activités de coiffure à domicile représentent aujourd'hui 27% du secteur, un chiffre qui a été multiplié par 3,3 entre 2009 et 2020.

Or, ce sont les salons de coiffure qui forment les apprentis. "Si le nombre de freelances et de coiffeurs à domicile continue d'augmenter, on pourrait manquer d'apprentis" dans les années à venir, bien qu'Emmanuel Macron ait redonné une "dynamique" à l'apprentissage en renforçant les aides à la formation, craint Christophe Doré.

"Un problème de charges"

Pour redonner de l'attractivité aux salons de coiffure, faut-il augmenter les salaires ? "C'est surtout un problème de charges qui pèsent sur les entreprises", estime Franck Provost, appelant le gouvernement à s'y attaquer. "Si elles augmentent les salaires, les charges vont suivre, et elles risquent de se retrouver dans une situation difficile" car une hausse des prix n'est pas envisageable. "Le pouvoir d'achat des clients, lui, n'augmente pas". L'Unec, de son côté, réclame une baisse de la TVA de 20 à 10% pour les entreprises du secteur.

Jérémy Bruno Journaliste BFMTV