"J'ai cru que j'allais y passer": le témoignage du médecin agressé lors d'une visite à domicile à Nice

Un pansement sur la joue qui masque en partie les traces d'un œil au beurre noir, et un bandage autour du poignet. Deux jours après sa violente agression à Nice, le docteur Jean-Yves Ollivier dit avoir encore quelques maux de tête, mais avoir "repris [s]es esprits", malgré le traumatisme qui reste présent.
"Sur le moment, j'ai été bien sonné, quand même. J'ai cru que j'allais y passer, sincèrement", déclare-t-il ce vendredi au micro de BFMTV. "Vu l'acharnement que le type a fait sur moi, je me voyais allongé par terre et agoniser assez rapidement."
"Il était dans une rage absolue"
Mercredi, le médecin généraliste de 80 ans a été violemment agressé lors d'un déplacement au domicile d'un patient dont il venait contrôler l'arrêt maladie.
À peine arrivé sur place, l'homme en question se montre déjà hostile, refusant même de laisser le médecin monter dans son appartement.
"Cette personne m'a très mal reçu. Il était manifestement déjà très en colère vis-à-vis de son patron, il m'a expliqué les problèmes qu'il avait avec lui. Je l'ai écouté tranquillement et essayé de le calmer, parce qu'il était très insultant", explique le docteur Ollivier.
Estimant que la condition de l'homme ne justifie pas un arrêt maladie, le médecin lui demande alors de signer un document attestant de son passage et de ses constatations.
"Là, il m'a arraché le papier des mains, et il m'a envoyé directement un coup de poing dans la figure, auquel je ne m'attendais pas du tout. Et il a commencé à s'acharner sur moi, donc j'ai pris la fuite. Heureusement, je me trouvais au rez-de-chaussée de son immeuble."
Dans la rue, le médecin est toutefois poursuivi par l'homme, qui continue de le rouer de coups. "Il m'a poursuivi en me tabassant quand même, parce que moi je ne cours pas très vite. Et j'avais très, très peur, parce que je me dis 'qu'est-ce qu'il va me faire?' (...) Il était dans une rage absolue."
L'agresseur présumé placé en garde à vue
Un passant finit alors par s'interposer entre les deux hommes. "Comme il était assez costaud, l'agresseur s'est arrêté de me poursuivre, tout en continuant de m'insulter de loin", se souvient le docteur Ollivier.
Ce dernier s'est alors rendu dans une pharmacie pour bénéficier des premiers soins, avant de se rendre aux urgences où ses blessures ont nécessité sept points de suture.
Le médecin a ensuite déposé plainte. L'auteur présumé de l'agression a quant à lui été placé en garde à vue, a appris jeudi soir BFM Nice Côte d'Azur auprès du parquet, confirmant une information de Nice-Matin.
Quelques jours après son agression, le médecin s'étonne encore qu'une telle chose ait pu arriver, la première fois en cinquante ans de carrière qu'il est agressé physiquement.
"J'ai parfois eu des personnes qui me recevaient mal ou qui m'insultaient, n'étant pas contents que je constate que leur arrêt n'était pas justifié. Mais on ne m'a jamais menacé."
Il évoque toutefois un phénomène qui devient de plus en plus fréquent dans certains domaines, où les agressions de professionnels se multiplient. "Les gens ne supportent plus la contradiction. (...) On respecte moins le médecin, on respecte moins le maire, on respecte moins le gendarme."
Des élus locaux apportent leur soutien
Plusieurs élus, dont le maire de Nice, ont apporté leur soutien au docteur Ollivier après son agression. "Je souhaite que l'auteur soit sévèrement condamné pour cette attaque odieuse contre un soignant", écrivait jeudi Christian Estrosi sur les réseaux sociaux.
Le médecin et conseiller municipal de Nice, Hervé Caël, affirme de son côté que "tout acte de violence envers un soignant doit donner lieu à une réponse judiciaire rapide, forte et exemplaire" alors que le député des Alpes-Maritimes, Éric Ciotti, a également fait part de son soutien pour la victime.
Un soutien qui fait "chaud au cœur" pour le médecin, qui a également reçu le soutien d'habitants du quartier. L'événement reste toutefois traumatisant pour l'octogénaire, tout comme pour sa fille, qui exerce en tant qu'hypnologue dans le même cabinet. Cette dernière n'a d'ailleurs appris l'agression de son père que le lendemain des faits.
"C'était très choquant et très attristant de le voir rentrer aussi amoché et choqué", relate à BFMTV Laëtitia, la fille du docteur Ollivier. "Mon père est justement quelqu'un qui ne veut déranger personne, qui se fait toujours passer après les autres, qui vit un métier de passion. Pour ne pas me déranger le soir-même, il ne me l'a appris que le lendemain."
Une agression qui va marquer le médecin et ses proches pendant encore quelque temps. "On a demandé à mon père d'être précautionneux, de faire attention, maintenant, de regarder autour de lui, de se faire soutenir, de nous prévenir. On a un regard qui change au quotidien."
L'incident n'aura toutefois pas entaché la passion du médecin pour son métier. Ce vendredi matin, le docteur Ollivier était déjà de retour dans son cabinet.