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Gap: crispations autour de l’achat d’un terrain agricole par la municipalité

Le maire de Gap, Roger Didier (illustration).

Le maire de Gap, Roger Didier (illustration). - Jeff Pachoud

Le conseil municipal a donné son accord au maire de Gap, Roger Didier, pour l'achat d'un terrain de 67 hectares à plus de 2 millions d'euros. L’opposition et les syndicats agricoles dénoncent un prix "exorbitant".

67,47 hectares pour 2,1 millions d'euros. Un prix "surestimé", d'après la Confédération paysanne, qui l'évalue à 1.624.200 euros. Fin septembre, le maire de Gap, Roger Didier, est arrivé devant son conseil municipal avec une délibération qui n'a pas fini de faire parler.

Neuf conseillers s'opposent à la délibération

Roger Didier a demandé aux élus d’approuver l’acquisition en pleine propriété de l'ensemble du tènement foncier, soit 67,47 hectares. La demande du maire a fait mouche. Neuf conseillers municipaux se sont opposés à cette délibération.

Le premier problème pour l'opposition n’est autre que le prix de ce terrain qui s'élève à 31.000 euros l'hectare quand la moyenne des terrains labourables est de 10.000 euros l'hectare. Cette parcelle n'est d'ailleurs pas totalement labourable puisqu'il y a des taillis et des bois.

"Vous connaissez mon attachement pour l'agriculture sur cette commune", a lancé Marie-José Allemand, membre de l’opposition, pour démarrer les débats au conseil municipal. "Les bras m'en tombent de voir le prix annoncé pour des bois et des taillis."

Le terrain pourrait accueillir les boues de la station d'épuration

Le maire de Gap s'est expliqué sur le contenu de cette parcelle sans jamais détailler ce qu'il souhaitait en faire. Rapidement, l'opposition a soupçonné Roger Didier de vouloir y mettre les boues de la station d'épuration. Le principal intéressé ne répondra jamais précisément sur le sujet tout au long du conseil municipal. "Qui vivra verra", a lancé ironiquement le maire de Gap.

Actuellement, les boues de la station d'épuration sont stockées route de la Luye à côté du futur abattoir alors que la loi interdit d'avoir tant de déchets au même endroit, pour des raisons environnementale et sanitaire.

Élie Cordier de Gap Autrement a accusé le maire d'acheter ce terrain à "une copine de dix ans". Une relation qui pourrait expliquer, pour l'opposition, le prix exorbitant de ce terrain. Sur ce sujet, le contrôle légalité a été lancé. Un service de la préfecture doit vérifier cette délibération avant le mardi 5 décembre. Il devra regarder si le prix a été gonflé par rapport au reste du marché.

L'inquiétude des agriculteurs

Les élus d'opposition, rejoints sur ce point par la Confédération paysanne, se sont également inquiétés des répercussions sur le prix du foncier agricole dans le gapençais.

"Les prix font référence pour les ventes suivantes, si des terres sont achetées à ce prix-là on peut s'attendre à ce que d'autres terres soient vendues au même prix", a expliqué la co-porte-parole du syndicat dans les Hautes-Alpes, Anne Aït-Touati. "Ça n'est pas vrai", a balayé le maire en conseil municipal.

"Cette vente entraîne de facto l'impossibilité à tous les agriculteurs de la commune de Gap de mettre sur la table de telles sommes", a clamé Marie-José Allemand qui a fini par ironiser: "À ce prix-là je vous vends ma ferme". "Elle ne m’intéresse pas votre ferme", lui a répondu Roger Didier.

"Il fait dans son coin sans concertation"

L'opacité du maire autour du projet agace les élus du conseil municipal ainsi que ceux du conseil communautaire, puisque le traitement des déchets est une compétence communautaire.

"C'est toujours pareil avec le maire de Gap. Il fait dans son coin, sans concertation et finit par se planter", déclare un conseiller communautaire qui accuse le maire de ne pas tenir informé les élus de l'intercommunalité. Plusieurs élus municipaux et communautaires remettent même en cause la possibilité de ce projet d'arriver à son terme.

Lors de l'inauguration de la maison des agriculteurs à Gap, l'édile a laissé sous-entendre qu'il s'expliquera sur ce projet le mardi 5 décembre prochain, date du prochain conseil communautaire qui crédibilise encore plus sa volonté d'accueillir les boues sur ce nouveau terrain à 2 millions d'euros.

Loïc Guerringue