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Frelon asiatique, concurrence internationale: les apiculteurs des Hautes-Alpes inquiets

Joël Béraud, apiculteur à Savines-le-Lac le 20 mars 2024.

Joël Béraud, apiculteur à Savines-le-Lac le 20 mars 2024. - BFM DICI

Souffrant de contraintes toujours plus grandes, peu reconnu par les instances, le secteur peine à attirer la relève. Et dans les Hautes-Alpes, l'installation du frelon asiatique n'annonce rien de bon pour cette activité si vitale à l'agriculture.

Sur les hauteurs de Savines-le-Lac, Joël Beraud a installé 54 ruches en 2014. Apiculteur passionné, ancien cadre à la retraite, il a décidé de se consacrer entièrement à l'abeille en créant ce "rucher pédagogique" où il initie des enfants et adolescents à la pratique.

"Il y a plus de têtes blanches que de têtes blondes ou brunes dans ce métier", soupire-t-il, faisant allusion au manque d'attrait du secteur pour les jeunes et les néoruraux.
Joël Béraud et son jeune élève apiculteur, Alan, le 20 mars 20254 dans les Hautes-Alpes.
Joël Béraud et son jeune élève apiculteur, Alan, le 20 mars 20254 dans les Hautes-Alpes. © BFM DICI

Aujourd'hui, il se dit entravé par la mairie de Savines qui l'empêche de développer son activité sur son terrain. "Dernièrement j'ai même reçu une mise en demeure pour 'construction illicite', explique-t-il en désignant le container orange dans lequel il stocke son matériel. Symbole pour lui d'un manque de considération pour son activité, pourtant vitale à l'écosystème.

Des terrains difficiles à obtenir

Des cas comme celui de Joël, le syndicat de la Société des apiculteurs alpins et son président Jean Galdino en voit beaucoup. "La difficulté, c'est pour les non-ruraux, ceux qui ne sont pas fils d'agriculteurs, d'accéder au foncier, avec une possibilité de construire une miellerie. Ceci oblige certains de nos collègues à s'installer dans des zones industrielles, un non-sens".

Selon Jean Galdino, les terrains d'apiculture ne sont pratiquement pas pris en compte dans la distribution des terres agricoles. La priorité est donnée à l'agrandissement des exploitations existantes, ce qui rend difficile l'installation de nouveaux apiculteurs, malgré l'importance de leur activité pour la production alimentaire.

"40% de ce que nous retrouvons dans nos assiettes viennent des abeilles et de la pollinisation, et les pollinisateurs naturels sont devenus quasiment inexistants", explique de son côté Joël Beraud.

Contraintes naturelles et concurrence internationale

Le varroa, acarien destructeur de ruches, est l'ennemi de toujours des apiculteurs, et se fait de plus en plus dévastateur. "On a des taux de mortalité que l'on aurait jamais imaginé il y a 20 ans, s'alarme Jean Galdino, en PACA on parle de 30% de pertes dans le cheptel!". 

A cela s'ajoute le frelon asiatique, déjà présent dans toute l'Europe mais qui commence à envahir le département des Hautes-Alpes, jusqu'à présent préservé. "Les bergers ont le loup et nous le frelon asiatique". Autre préoccupation, le tumida, un coléoptère dévastateur qui sévit en Italie toute proche. Une question de temps avant qu'il débarque en France, selon Joël Beraud.

Enfin, comme une grande partie du secteur agricole, l'apiculture souffre depuis longtemps de la concurrence mondiale. "Quand un miel arrive de l'étranger à deux euros le kilo alors que le coût de production en France est supérieur à cinq euros, je vous laisse imaginer..." calcule Jean Galdino.

La France produit aujourd'hui 20.000 tonnes de miel et en consomme 60.000, ce qui devrait faire monter les prix, mais les importations les poussent à la baisse.

Jules Boudier