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Alpes-de-Haute-Provence: les éleveurs de bovins épuisés par les attaques de loups

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Un veau de trois mois a été tué le week-end dernier à Saint-Geniez. C'est le sixième depuis le début de l'été dans les environs. Pour exprimer leur désarroi ou leur colère, les propriétaires de troupeaux ont élevé la voix ces dernières semaines.

Certains éleveurs sont excédés, d'autres désabusés. D'aucuns envisagent même de quitter la profession. Les attaques de loups se sont multipliées ces derniers mois dans les Alpes du Sud.

Nicolas Gandon, éleveur, montre à l'aide de sa main l'endroit où il a retrouvé la carcasse de son veau de trois mois. "Il était mort, avec les gigots mangés, déplore-t-il au micro de BFM DICI. C'est un animal qu'on a amené ici avec sa mère il y a seulement une semaine."

À l'échelle du pays, les attaques de loups sur des bovins sont très minoritaires. Elles pèsent moins de 1%, contre 94% pour les ovins, selon le ministère de l'Écologie. Mais depuis le début de l'été, pas moins de six bovins ont été tués dans ces communes des Alpes-de-Haute-Provence, à Saint-Geniez et dans les villages avoisinants, comme Authon ou Valavoire.

"On se demande comment ça va finir"

"On se demande comment ça va finir, s'interroge Nicolas Gandon. C'est vrai qu'on subit des attaques depuis une dizaine d'années. On arrive dans des impasses. Ce n'est plus supportable pour nous, pour le troupeau. On est coincés."

Si l'intéressé devrait être indemnisé pour la perte de son veau, le Plan national d'action 2018-2023 sur le loup et les activités d'élevage reste très limité pour les éleveurs de bovins. En cas d'attaque de loups, "des mesures d'accompagnement peuvent être mobilisées dans le cadre de la procédure dite des 'crédits d'urgence'", note le ministère de l'Écologie.

Mais à la différence des éleveurs d'ovins, ces éleveurs ne sont pas éligibles à des aides préventives, permettant par exemple d'acheter un patou, un chien de troupeau, ou encore d'électrifier son enclos. De son côté, Nicolas Gandon a fait une demande de tirs de défense auprès de la direction départementale des territoires.

Pour aider les éleveurs, des municipalités du département des Alpes-de-Haute-Provence ont autorisé les propriétaires de troupeaux à pratiquer l'écobuage -une technique agricole réglementée qui consiste à débroussailler par le feu- dans les parties boisées. Cela a permis de réduire quelque peu le nombre d'attaques, et poussé les élus locaux à interpeller l'Office national des forêts.

Le loup, espèce protégée

Mais plus largement, les éleveurs des Alpes du Sud jugent les dispositifs de protection contre le loup insuffisants.

"C'est un sujet qui préoccupe les éleveurs, les jeunes agriculteurs de Réallon, assure Michel Montabone, maire cette commune haut-alpine. On a beaucoup de gens qui ont des ovins. Il y a eu quelques attaques du côté de Chargès et du côté du vallon, sous la Coupa."

"On va vers l'extinction de l'élevage, vers l'extinction du pastoralisme qui nous permettait d'entretenir ces massifs très montagneux, très boisés", avertit de son côté Gérard Tenoux, vice-président du Conseil départemental des Hautes-Alpes.

Selon Michel Montabone, des "décisions importantes, gouvernementales voire européennes" doivent être prises. Mais que faire, quand l'on sait que le loup est une espèce protégée? Le gouvernement français a reconduit en 2021 un plafond de tirs d'abattage. 110 loups pourront être prélevés sur l'année en cours.

Dans les Hautes-Alpes, Martine Clavel, la préfète, a déclaré à notre micro qu'elle allait "essayer de voir s'il est possible de faire évoluer le régime juridique qui permet le tir des loups". Les éleveurs vont donc devoir patienter, et ce même si certains estiment qu'il y a "urgence".

Antonin Blanc avec Florian Bouhot