Comment Renault veut déjà durcir son plan d’économies

Renault fera plus que les 2 milliards d’euros d'économies prévues sur 3 ans. C'est Luca De Meo lui-même qui l'affirme dans un document interne, document révélé hier par l’agence Reuters. Dans ce document d’une quinzaine de pages, discuté lundi avec les syndicats du groupe selon l’AFP, le nouveau patron recruté chez Seat (groupe Volkswagen) donne un nouvel axe: la rentabilité au détriment des volumes. Et cette rentabilité, Luca de Meo compte bien la trouver à tous les étages de Renault.
Revoir la taille comme le fonctionnement de l’ingénierie
Luca de Meo s'appuie déjà sur une refonte complète de l'ingénierie. Par exemple, le technocentre de Guyancourt (Yvelines) - le cœur de la R&D chez Renault - va se concentrer sur les chantiers à forte valeur ajoutée, comme les nouveaux moteurs. Tandis que d'autres tâches, telles que le contrôle qualité ou les essais, seront délocalisées à l'étranger, en Roumanie ou au Brésil.
Autre source d'économies: les effectifs. "Il y a trop de managers", nous dit aussi un proche de Luca de Meo qui s'apprête à revoir drastiquement les organigrammes. D’un manager pour 7 personnes aujourd’hui, le groupe voudrait atteindre un objectif d’un manager pour 12 personnes.
"Le principe des ombres chinoises"
Luca de Meo veut également revoir les gammes de modèles et la manière de développer les véhicules. Le nouveau dirigeant compte ici s'appuyer sur l'Alliance, pour de grands projets comme l’hydrogène ou les services de mobilité, mais surtout pour produire ces nouveaux modèles. L'idée est de décliner sur toutes les marques une même silhouette de voiture.
"C'est le principe des ombres chinoises", nous explique un des stratèges de Renault. Cette approche permet de mutualiser les lignes de production. Et à l'arrivée, selon nos informations, d'avoir 75% des composants d'une voiture en commun entre le groupe Renault et ses partenaires Nissan et Mitsubishi, mais aussi de revoir les coûts de validation des nouveaux modèles, coûts que la direction juge aujourd’hui trop élevée.
Le but est d’améliorer la rentabilité par véhicule. Aujourd’hui, selon le directeur de la R&D de Renault, venu de PSA, Gilles Le Borgne, le coût de développement d’une Renault est "360 euros supérieur" à celui d’un véhicule produit chez PSA.
A côté de cette baisse des coûts de développement, les prix des véhicules pourraient bien eux augmenter. Pour le segment de la Mégane (segment C) par exemple, on peut "envisager une hausse de 25-30% du prix de transaction moyen" d'ici à 2025, explique le document interne de Renault. Luca de Meo souhaite aussi une plus grande qualité perçue et une plus grande durabilité.
Un appel au dialogue social
Une stratégie qui rappelle furieusement le plan de relance de Carlos Tavares chez PSA. Les syndicats appellent eux au dialogue social. Renault "a récupéré un dirigeant qui respire l'automobile (...) Il y a des choses cohérentes mais il va falloir mesurer les difficultés et le dialogue social qu'on aura en face", déclare à l’AFP Guillaume Ribeyre, pour la CFE-CGC.
Luca de Meo "reste avec les mêmes recettes de réduction des coûts", a critiqué Fabien Gâche, délégué CGT, dénonçant un tour "à 360 degrés pour rester au même endroit".
Le nouveau directeur général de Renault doit officiellement présenter son plan stratégique pour le Groupe en janvier prochain.