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"Vous ressortirez par la cheminée": le témoignage d'un rescapé du camp nazi du Struthof âgé de 100 ans

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Une partie des cérémonies commémorant les 80 ans de la Libération de Strasbourg ce samedi 23 novembre se déroulent dans l'ancien camp nazi du Struthof où ont disparu 17.000 hommes. Henri Mosson, aujourd'hui âgé de 100 ans, est encore en vie pour témoigner de cet enfer.

Henri Mosson fait parti des 50.000 hommes qui ont été envoyés dans l'unique camp de concentration nazi installé en France. Le camp de Natzweiler-Struthof a été libéré le 25 novembre 1944 par l'armée américaine, deux jours après Strasbourg dont les commémorations se déroulent ce samedi 23 novembre.

Le centenaire est l'un des derniers déportés français encore en vie. Résistant, il a été arrêté pour "vente et trafic d'armes" relate Gérard, son fils, qui a conservé les minutes du procès lors duquel son père a été condamné à mort, le 29 juin 1943. Emprisonné à Dijon où il passe quatre mois, il est envoyé dans ce camp via la gare de Rothau. Les détenus sont embarqués dans des camions ou des voitures "à coups de crosse et de morsures de chien", décrit Henri Mosson.

"Il n'y avait pas assez de place, alors certains devaient faire les 8 kilomètres restants à pied. Un est mort." À l'arrivée au camp, le commandant leur lance: "Vous êtes entrés par la grande porte. Vous ressortirez d'ici par la cheminée", se remémore le vieil homme.

90 à 100 jours d'espérance de vie

Henri devient un numéro, le 6290. Il le coud de travers sur ses vêtements et va le payer immédiatement en recevant la plus grande claque de sa vie par un officier SS. "Pourquoi?", lance le déporté. S'apercevant qu'Henri Mosson s'exprime en allemand, l'encadrement va l'affecter à la désinfection des vêtements de détenus arrivants. Il a ainsi pu passer l'hiver au chaud.

"Dans la vie, il y a un facteur chance. La durée de vie pour un homme qui ne parlait pas allemand, qui était français, c'était 90 à 100 jours", explique le centenaire. Classé détenu “Nacht und Nebel” (nuit et brouillard), Henri Mosson était voué à disparaître sans laisser de traces mais il a survécu assez longtemps pour que les nazis évacuent face à l'avancée des alliés fin août 1944.

17.000 disparus

Sur les 50.000 détenus internés au Struthof ou dans ses camps annexes, "17.000 sont décédés ou ont disparu, notamment lors des marches de la mort du printemps 1945, ce qui fait un taux de décès d'environ 40%", souligne Cédric Neveu, historien.

Le camp sera le théâtre d'exécutions par pendaison ou par fusillade et d'expériences médicales. En août 1943, 86 Juifs sont ainsi assassinés dans une chambre à gaz dans le but de constituer une collection de squelettes juifs.

Adrien Beaujean et Florent Bascoul avec AFP