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Violences à Strasbourg: des pillards condamnés à des peines allant de 4 à 10 mois de prison ferme

Le tribunal de Strasbourg (image d'illustration).

Le tribunal de Strasbourg (image d'illustration). - PATRICK HERTZOG © 2019 AFP

Tous les prévenus étaient présents à Strasbourg vendredi lorsque des pillards s'en sont pris à un magasin Zara, l'Apple Store ou encore une boutique Lacoste.

"À situation exceptionnelle, peines requises exceptionnelles" : en comparution immédiate lundi au tribunal de Strasbourg, le parquet a requis des sanctions conséquentes à l'égard de plusieurs personnes ayant pris part aux attroupements ayant dégénéré en pillages dans des magasins du centre-ville vendredi.

Ils s'appellent Steve, Johanna, Rayane ou Adrien. Tous étaient présents dans la capitale alsacienne lorsque des pillards s'en sont pris à un magasin Zara, une boutique Lacoste ou à l'Apple Store. Interpellés dans la foulée, ils comparaissent après deux nuits en garde à vue et une nuit en détention provisoire.

"Je ne sais pas ce qui m'a pris, j'ai fait une erreur"

Steve, 37 ans, est chauffeur-livreur en CDI. Tee-shirt noir, cheveu ras, il est poursuivi pour vol. Sa concubine, Johanna, 29 ans, vendeuse sur une aire d'autoroute, est à ses côtés dans le box vitré. Elle répond de complicité de vol.

Vendredi, le couple était venu se balader en centre-ville. Steve a ramassé des vêtements neufs qu'un pillard avait abandonnés sur la chaussée et en a distribué à Johanna et à sa fille, ainsi qu'à des passants. "C'était un acte hautement éducatif et pédagogique pour votre fille", raille le président, Philippe Schneider.

"Je ne sais pas ce qui m'a pris", répond le prévenu. "Je sais, c'est un mauvais exemple. J'ai fait une erreur".

"Dans cette affaire, on vole en famille. Quel exemple !", attaque le procureur, Alexandre Chevrier. Il requiert six mois d'emprisonnement ferme pour monsieur, et quatre mois de détention à domicile sous bracelet pour madame.

"Ces gens ne détruisent pas, ne cassent pas", souligne l'avocate, Me Laure Fitoussi. "On est sur une scène jamais vue, extraordinaire, qui amène des gens insérés à avoir des comportements incohérents. Mais dans un contexte plus normal, nous n'aurions jamais eu des peines requises aussi lourdes", estime-t-elle, réclamant une peine de semi-liberté.

De fait, le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, a réclamé une réponse "rapide, ferme et systématique" après les émeutes consécutives à la mort de Nahel, tué par un policier à Nanterre.

Le tribunal suit les réquisitions du parquet. Steve repart en détention pour six mois, sa compagne portera un bracelet électronique jusqu'à l'automne.

Un homme qui a renvoyé un palet de gaz lacrymogène

Dossier suivant. Adrien a 19 ans, il reconnaît avoir fait une "grosse connerie" en renvoyant vers les policiers un palet de gaz lacrymogène projeté par les forces de l'ordre. Il s'est légèrement brûlé à la main au passage.

Face aux pillages, "pourquoi vous restez ?", l'interroge M. Schneider. "Je ne sais pas trop. L'effet de groupe je pense", lui répond le prévenu.

"À quel moment vous vous servez de votre cerveau ?". Aucune réponse du jeune homme. "La foule se jette dans l'eau, vous vous jetez aussi ?", ajoute-t-il. "Oui", avoue le prévenu, qui admet que les policiers n'ont fait "que leur travail", qu'il a "rajouté de l'huile sur le feu".

"Il fait partie des émeutiers", soutient le procureur. "Quand on lance un projectile, on prend le risque de blesser grièvement. Socialement, ce comportement n'est pas acceptable". Il demande douze mois d'emprisonnement à l'égard du jeune homme, dont six ferme.

"À contexte exceptionnel, peines requises exceptionnelles. Mais le code pénal reste le même", se répète Me Fitoussi, qui préférerait des travaux d'intérêt général.La sanction tombe. Relaxé des faits d'attroupement avec arme, Adrien est condamné pour violence à douze mois de prison, dont quatre ferme. Mandat de dépôt, le bruit des menottes résonne dans la salle.

"C'était cassé, je n'ai pas réfléchi, je suis entré"

Rayane, 26 ans, est entré dans le magasin Zara . Il en est ressorti "avec un gros paquet de vêtements sous le bras", remarque le président, vidéosurveillance à l'appui.

"Vous avez pris le temps de prendre des vêtements à votre taille ?", demande le magistrat. Réponse négative de l'intéressé. "Vous comptiez en faire quoi ?", ajoute-t-il. "Rien", lui répond le prévenu.

Le prévenu souligne quand même qu'il n'a commis aucune dégradation. "C'était un vol opportuniste : c'était cassé, je n'ai pas réfléchi, je suis entré".

Compte tenu de ses dix mentions au casier, le procureur requiert 10 mois ferme, "pour prévenir le renouvellement des faits". Malgré les contestations de l'avocate, qui réclame une peine "proportionnée aux faits" pour un jeune qui n'a "plus rien fait depuis cinq ans, qui travaille", les juges suivent les réquisitions. Rayane repart en prison.

M.Re avec AFP