Massif des Vosges: pourquoi la réouverture de la route des Crêtes fait débat

Fermeture hivernale terminée pour la route des Crêtes. Cette voie très touristique de plus de 70 kilomètres située dans le massif des Vosges rouvre ce vendredi, au plus grand bonheur des touristes.
Elle est notamment largement empruntée par les adeptes de moto, qui peuvent profiter du paysage vosgien sur une route bien entretenue qui s'étend de Sainte-Marie-aux-Mines à Cernay.
Les motards pointés du doigt
Problème: leur présence fait débat. Les passages incessants des moteurs bruyants sont accusés de perturber la biodiversité du massif, empêchant notamment la réintroduction de grands tétras, oiseaux nichant dans les montagnes.
"Les Vosges attirent tout particulièrement les motards qui veulent faire de la vitesse", explique Dominique Humbert, président de SOS Massif des Vosges, sur le plateau d'Alsace Politiques ce jeudi. "Ce n'est pas une minorité, il y a une concentration de motards bruyants sur les Vosges", martèle-t-il.
La Fédération française des motards en colère se défend et rappelle faire constamment de la prévention: "On fait des opérations de partage de la route et du respect des autres utilisateurs, des opérations de sensibilisation avec la gendarmerie par rapport au bruit", énumère Michel Esselin, coordinateur de la FFMC 67.
"On est en train de transformer le massif en parc d'attractions"
À cela s'ajoutent les incivilités des randonneurs, les dépassements de vitesse sur la route et le tourisme jugé trop massif pour protéger correctement l'environnement vosgien.
"On est dans une politique de loisirs, au-delà d'une politique touristique, dans laquelle on est en train, de façon insensible et de plus en plus rapide, de transformer le massif en parc d'attractions", estime Dominique Humbert.
Les défenseurs du massif des Vosges demandent entre autres la fermeture de certains tronçons de la route des Crêtes pour remédier au problème, bien qu'elle soit déjà fermée la moitié de l'année. SOS Massif des Vosges veut l'instauration de "mesures structurelles" concrètes.
Le Conseil scientifique régional du patrimoine naturel (CSRPN) a par ailleurs rendu un avis dans ce sens en mars dernier. Alors que l'instance rendait un avis sur la demande d’autorisation d’introduction dans le milieu naturel de grands tétras par le comité Grand Tétras Massif des Vosges, elle a estimé que "les conditions indispensables au rétablissement d’une population viable ne sont à l’évidence pas réunies".
D'après le CSRPN, les "dérangements humains" sont l'une des causes qui a conduit au déclin de ces oiseaux dans les Vosges, provoquant un "déséquilibre de l'écosystème".
Les aménagements touristiques en pleine croissance sont également pointés du doigt. Certains usages ne sont "clairement pas compatibles avec des objectifs de conservation", estime l'instance scientifique.
Arriver à faire cohabiter biodiversité et tourisme
Toutefois, il est impossible pour le département de condamner la route des Crêtes: "On n'a pas l'intention de fermer des routes et du réseau", tranche Jean-Philippe Maurer, conseiller d'Alsace en charge des réseaux et mobilités.
"Il y a des endroits avec un calme absolu et des endroits plus circulés. [...] Le massif des Vosges est un massif de liaison, avec une présence humaine, avec une activité économique. Il est attractif."
Néanmoins, l'élu admet qu'il "faut arriver à conjuguer plusieurs usages". Pour Jean-Philippe Maurer, il y a nécessité à évoluer vers "un usage quatre saisons" afin d'éviter un afflux de personnes durant une courte période et ainsi répartir la venue des touristes. "On peut cohabiter dans ce massif des Vosges", ajoute sur le même plateau Christophe Bergamini, directeur de l'office de tourisme de la vallée de Kaysersberg.
VTT, randonnées, activités ludiques... L'office de tourisme explique qu'elle essaie au maximum de réduire l'impact de l'activité humaine sur le massif. Tourisme et biodiversité semblent donc devoir se développer en parallèle dans les Vosges. "Il est important que l'on sache ce que l'on veut faire du massif", conclut le président d'association Dominique Humbert.