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Var: une professeure de droit cyberharcelée par l'extrême droite après avoir été filmée à son insu

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Depuis la publication par une députée du Rassemblement national d'une vidéo captée pendant un cours, mardi 4 février, Hélène Hurpy fait l'objet de messages haineux. Elle bénéficie à présent d'une sécurité fonctionnelle mise à disposition par l'Université de Toulon.

Insultes, accusations, menaces: Hélène Hurpy, maîtresse de conférence à l'Université de Toulon, subit de plein fouet une vague de harcèlement en ligne. Au point de bénéficier, depuis vendredi 7 février, d'une sécurité fonctionnelle l'accompagnant dans son cadre privé et juridique, mise à disposition par son établissement, rapporte le journal Le Monde.

Trois jours plus tôt, les élections étudiantes battent leur plein. Dans l'après-midi, l'enseignante s'apprête à dispenser un cours en amphithéâtre, sur le campus de Draguignan, où se situe la faculté de droit. Elle aperçoit sur les pupitres des tracts siglés "La Cocarde étudiante, l'alternative patriote", un syndicat d'extrême droite.

Il est en principe interdit de distribuer une telle documentation dans le cadre d'un cours, quelle que soit la couleur politique du syndicat. C'est pourquoi, après avoir jeté un œil aux tracts, Hélène Hurpy les fait retirer des pupitres et se lance dans un propos liminaire.

Devant ses étudiants, la maîtresse de conférence rebondit sur une proposition du syndicat d'extrême droite, appelant à la suppression d'une aide boursière d'excellence versée aux élèves étrangers, au profit d'une allocation qui serait distribuée aux étudiants français dans le besoin.

Cette mesure s'avèrerait discriminatoire au regard de la Convention européenne de droits de l'Homme et de la Constitution, pointe Hélène Hurpy. "Il y a des partis politiques qui sont à traiter différemment d’autres courants politiques: tous ceux qui vont à l’encontre de cet article 1er de la Constitution française qui pose les caractères de notre République", fait-elle notamment remarquer, sans cibler précisément de parti. 

"Pas consciente de tomber dans un piège"

Vers 17 heures, alors que le cours a pris fin, une vidéo apparaît sur le compte X de Laure Lavalette, députée Rassemblement national (RN) du Var. Une séquence d'environ une minute trente, tournée lors du propos liminaire d'Hélène Hurpy.

Dans sa publication, Laure Lavalette fustige les propos "anti-RN" qu'aurait prononcés l'enseignante et l'invite à "revoir sa définition de la citoyenneté et à s’intéresser à l’article 10 de la DDHC (la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, nldr)". Sous le tweet, les commentaires incendiaires à l'encontre de la maîtresse de conférence déferlent, émanant autant d'anonymes que de membres du RN.

"J’avais lu les premières dispositions du tract et il m’était apparu important de rappeler certains fondamentaux du droit", relate Hélène Hurpy au Monde. "En faisant cela, je n’avais pas conscience de tomber dans un piège. Je ne m’étais pas aperçue que j’étais enregistrée par un étudiant."

Laure Lavalette a, depuis, supprimé sa publication. L'élue frontiste dit ne pas vouloir alimenter le cyberharcèlement et assure, en parallèle, que la vidéo partagée sur son compte lui avait été remise par des étudiants scandalisés par les propos d'Hélène Hurpy. Auprès du Monde, "La Cocarde étudiante" nie avoir transmis le fichier au parti d'extrême droite.

Une mobilisation prévue jeudi

Dans son entretien au quotidien du soir, le 7 février, Hélène Hurpy partageait son intention de porter plainte et d'effectuer un signalement auprès des plateformes qui ont relayé l'enregistrement.

La professeure de droit bénéficie du soutien de l'Université de Toulon, laquelle insiste sur la liberté académique dont doivent jouir les enseignants dans le cadre de leurs fonctions. Elle peut également compter sur l'appui de plusieurs dizaines d'étudiants en deuxième année de master.

Selon France 3 Côte d'Azur, une mobilisation est programmée à 17 heures, jeudi 13 février, devant la faculté de droit. Le mot d'ordre: défendre la liberté académique et dénoncer les tentatives d’intimidation.

Laura Berlioz, avec Florian Bouhot