"Il souffrait énormément": la mère de Lucas, mort après 10 heures aux urgences de Hyères, porte plainte

Lucas, 25 ans, est mort des suites d’une infection méningocoque aux urgences de l’hôpital de Hyères (Var). Les faits remontent à la nuit du 30 septembre au 1er octobre.
Dans un article, nos confrères de Mediapart ont recueilli le dossier médical du jeune patient et plusieurs témoignages, qui révèlent une série de dysfonctionnements dans la prise en charge de Lucas. Sa mère, Corine Godefroy, a déposé plainte pour homicide involontaire contre l’hôpital et sa direction.
Dans l’après-midi du samedi 30 septembre, Lucas est pris de crampes à l’estomac et vomissements. Ses côtes sont douloureuses, ses poumons aussi. "Il avait d’abord appelé SOS Médecins en fait. Et l’état de Lucas se dégradait, donc ses lèvres sont devenues bleues", rapporte sa mère à nos confrères de France Bleu Provence.
Lucas respire de plus en plus difficilement. Les médecins du 15 décident d’envoyer immédiatement le jeune homme aux urgences pour accélérer sa prise en charge.
"On ne l'a pas vu vivant"
Lucas arrive à l'hôpital à 15h50. Son rythme cardiaque est élevé, sa tension artérielle très basse, relate Mediapart. L’état de santé du jeune homme ne serait pourtant pas une urgence pour le personnel. "Il est classé 'high''', affirme sa mère à la radio locale. "C’est-à-dire un léger cas. Pas grave, il est mis de côté."
Corine Godefroy suit l’évolution de son fils à distance. Son unique lien avec son enfant malade est un échange de messages.
"On n’a jamais pu rentrer. On ne l’a pas vu vivant", détaille la mère de famille. "Ils nous ont jamais laissés le voir. On n'a pas pu l’accompagner."
Dans ses messages, le jeune homme confie sa détresse, "qu’il souffre énormément", ajoute sa mère. "Il se plaint. Il dit qu’il n’arrive pas à respirer, mais que personne ne s’occupe de lui. Qu’il ne sait plus quoi faire."
"Il soufflait, il gémissait"
Rongé par la douleur, Lucas patiente seul sur un brancard calé dans un couloir d’hôpital. Arrive 18h20. Un anti-vomitif lui est administré et une prise de sang est ordonnée. Soit deux heures et demie après son entrée aux urgences. Il verra un médecin quatre heures après son admission.
"Lucas n’arrêtait pas de souffrir. Il soufflait, il gémissait, se retournait sur son brancard. Il disait aux infirmiers qu’il n’allait pas bien", rapporte un témoin au site d’investigation. "La seule précision que le médecin a demandée à Lucas, c’est s’il fumait de l’herbe."
Aux alentours de 21h30, Lucas est pris d’un malaise vagal. Il multiplie les arrêts cardiaques. Le jeune patient est placé en salle de déchoquage puis transporté en salle de réanimation. Son état se dégrade à grande vitesse. Le massage cardiaque de 45 minutes ne suffira pas. Lucas meurt d’une infection méningocoque, une bactérie logée au sein de son abdomen, à 2 heures du matin.
Un courrier déposé dans la boîte aux lettres
Les signes anormaux de la prise en charge de leur enfant suscitent néanmoins la préoccupation de ses parents qui reçoivent plusieurs alertes. "La première fois, on a vu le médecin du Smur qui avait fait le dernier massage cardiaque à Lucas", explique sa mère à France Bleu Provence. "Il nous a dit de demander le dossier médical." Un autre médecin leur conseille de déposer plainte.
Au domicile de Lucas, la famille découvre un courrier déposé dans sa boîte aux lettres. À l’intérieur, "une enveloppe venant de l'hôpital de Hyères, et derrière, avec le cachet des urgences, avec des résultats originaux de gaz, du sang, le CD-ROM du scanner, un compte-rendu médical de sa prise en charge", détaille-t-elle. "Donc on s'est dit, il y a quelque chose qui ne s’est pas bien passé."
Corine Godefroy pense que son fils aurait pu être sauvé. Auprès de nos confrères de France Bleu Provence, la mère de famille affirme vouloir se battre. "C'est déjà en cours", confie-t-elle.
L'hôpital invoque le secret médical
Contacté par BFM Toulon Var, l’hôpital de Hyères ne souhaite pas communiquer sur cette affaire "en raison du secret médical".
"La direction de l’établissement n’est pas autorisée à divulguer les détails du dossier du patient", rapporte-t-il. "Dans le cadre de la plainte déposée, nous collaborons pleinement à l’enquête menée par l’autorité compétente."
L’établissement de santé affirme avoir présenté ses "sincères condoléances" à la famille.