Porno, arnaques, cyberharcèlement: comment le gouvernement veut "sécuriser" internet

Portée par le ministre délégué à la Transition numérique, Jean-Noël Barrot, la proposition de loi visant à "sécuriser et réguler l'espace numérique" veut mieux sécuriser le Web. De la haine en ligne à l'accès aux sites pornographiques en passant par la prévention des arnaques, le texte sera présenté ce 10 mai en Conseil des ministres, puis proposé avant l'été au Sénat, avant une éventuelle adoption définitive à l'Assemblée nationale.
Bannissement numérique
Une condamnation dans la vie réelle, mais aussi sur les réseaux sociaux. Le texte propose que des faits de harcèlement sur un réseau social entraînent une interdiction d’accéder à la plateforme concernée.
"Je propose que le juge, lorsqu’il condamne des personnes pour des faits de cyberharcèlement, comme dans le cas de Mila ou Eddy de Pretto, puisse aussi condamner les personnes à une peine supplémentaire de bannissement des réseaux sociaux", a expliqué le ministre au micro d'Europe 1, ce 9 mai.
La responsabilité de bannissement serait confiée aux plateformes. Ainsi, Twitter, Facebook ou encore Instagram pourraient être contraints de bloquer le compte utilisé, mais également de bloquer les anciens comptes et la possibilité d'en créer de nouveaux. La sanction, ordonnée par un juge, sera valable pour six mois et jusqu'à un an en cas de récidive.
Toute la question reste le mode opératoire choisi. Une liste noire d'utilisateurs bannis, comportant leur adresse mail, pourrait être dressée. Avec toutefois un risque de contournement élevé, quelques secondes suffisant à créer une nouvelle adresse mail. Tandis qu'un blocage via l’adresse IP condamnerait l'ensemble du foyer plutôt que la personne visée. Une sanction déjà abandonnée à l'époque de la Hadopi.
Protection des mineurs face à la pornographie
Afin de renforcer la protection des mineurs face aux contenus pornographiques, le gouvernement confie de nouveaux pouvoirs à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom).
L'Autorité pourra bloquer ou déréférencer des moteurs de recherche un site pornographique qui n'interdit pas les mineurs d'accéder à ses contenus, et ce, sans passer par un juge. Ainsi, si le site n'a pas vérifié l'âge de l'utilisateur, celui-ci sera bloqué et encourt une amende qui peut aller jusqu'à 4% du chiffre d'affaires.
Pour Jean-Noël Barrot, il s'agit "d'aller plus vite" sur les déréférencements. "Un enfant de 12 ans a une chance sur trois d'avoir été exposé à ce type d'images", souligne-t-il auprès d'Europe 1.
Une procédure judiciaire est déjà en cours, visant notamment les géants du secteur Pornhub ou XVideos. Elle doit aboutir à une décision de la justice le 7 juillet. Avec l'adoption du nouveau texte, de telles décisions de justice ne seraient plus nécessaire: l'Arcom aurait les mains libres pour bloquer tout les sites diffusant des contenus pornographiques sans vérification de l'âge... à commencer par Twitter.
Filtre anti-arnaque
Ce dispositif a pour objectif d'agir en amont de la menace. Au moment où un utilisateur s'apprête à cliquer sur un lien identifié comme malveillant, un message d'avertissement apparaîtra sur l'écran.
Ce sont particulièrement les SMS frauduleux qui sont visés. Le but affiché est de lutter contre les arnaques de type Comptes personnel de formation ou fausse connexion à des sites comme Ameli.
Pour que le dispositif fonctionne, les opérateurs télécoms seront chargés de créer une liste rouge des sites frauduleux, de collecte de données à caractère personnel ou encore des arnaques au paiement.
Ce seront ensuite aux acteurs de l'écosystème de remplir leur mission. Les adresses des sites frauduleux pourront être transmises aux fournisseurs d'accès Internet pour mettre en place le blocage des sites concernés. Avec une principale question: comment se montrer suffisamment réactif pour empêcher les escrocs de commettre leurs méfaits.