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En Chine, des influenceurs créent leur clone numérique pour vendre des produits nuit et jour

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De plus en plus de marques chinoises utilisent des deepfakes générés par IA pour faire la publicité de leurs produits à toute heure. Le tout pour seulement 1000 dollars et quelques minutes d’enregistrement.

En Chine, ils ne s’arrêtent jamais. Inlassablement, sur les plateformes d’e-commerce comme Taobao, une armée d’influenceurs continue de promouvoir des produits à toute heure du jour et de la nuit. Comment font-ils pour tenir? Ils ne sont tout simplement pas humains – littéralement: de plus en plus de marques utilisent des deepfakes générés par intelligence artificielle pour remplacer les influenceurs humains et promouvoir leurs produits, raconte le site spécialisé MIT Technology Review.

Dans le pays, le streaming est depuis plusieurs années un canal de diffusion incontournable pour les marques qui voudraient faire la publicité de leurs produits. Sur des plateformes comme Taobao, JD.com, Douyin (l’équivalent chinois de TikTok) ou Kuaishou, les influenceurs recommandent des produits devant des milliers de spectateurs.

Les plus populaires peuvent même vendre plus d’un milliard de dollars de produits en une soirée, particulièrement lors d’événements commerciaux nationaux comme la “fête des célibataires” (le 11 novembre). Mais pour atteindre ce niveau, il faut beaucoup de temps, d’entraînement, de préparation, de moyens techniques… Un travail digne d’un acteur de haut niveau qui peut vite être épuisant pour les influenceurs, et coûter cher aux entreprises voulant utiliser leurs services.

Les géants de la tech s'y mettent

Depuis 2022, de plus en plus d’entreprises chinoises proposent donc aux entreprises de leur créer un “influenceur virtuel” sur mesure – et beaucoup moins cher qu’un vrai. Visage humain, voix presque naturelle, mouvements des lèvres et des mains… Tout y est, en échange de seulement 8.000 yuans (soit environ 1.100 dollars) et une minute de vidéo pour donner un modèle au logiciel.

Il suffit ensuite d’entrer les informations basiques sur le produit et d’écrire le texte désiré pour que l’avatar numérique le reproduise. Un texte qui peut lui aussi être généré par une IA comme ChatGPT.

Pour un modèle de plus haute qualité, la facture peut atteindre plusieurs milliers de dollars. Un prix qui permet par exemple à l’avatar de réagir à des commentaires laissés par les spectateurs du direct, pour paraître encore plus humain, explique à MIT Technology Review le fondateur d’une de ces entreprises, Silicon Intelligence.

Et l’intérêt des marques a encore augmenté cette année, selon l’entreprise Xiaoice, citée par MIT Technology Review. L’entreprise revendique plus de 100 clients, pour lesquels ces influenceurs virtuels ont déjà généré plusieurs millions de dollars de ventes. Mais les géants chinois de la tech comme Alibaba, Tencent et Baidu ont eux aussi lancé une variante de ce service cette année.

Des usages inquiétants

Si le développement des deepfakes peut donc apparaître comme une opportunité pour les marques, cette technologie peut aussi servir à d’autres usages plus inquiétants. Par exemple pour de la désinformation politique, en reproduisant la voix et le visage d’un candidat pour lui faire dire des choses qu’il n’a jamais dites.

En France, le gouvernement espère encadrer la question via le projet de loi sur la sécurisation du numérique, qui sera bientôt examiné par l'Assemblée nationale. En Chine, les plateformes aussi s’emparent de la question: Douyin recommande que toutes les vidéos générées par IA soient indiquées comme telles, à l’image des recommandations de sa version occidentale TikTok.

Luc Chagnon