Fausses citations, mauvais usage et "pas vraiment d'excuses": un avocat sanctionné pour avoir utilisé l'IA dans sa défense par deux fois

Certains n’apprennent décidément pas de leurs erreurs. C’est le cas d’un avocat américain. Comme l’a relayé 404media, Michael Fourte a été sanctionné par la Cour suprême de New York pour avoir soumis des documents juridiques en partie générés par une IA… à deux reprises.
Tout commence par une affaire classique: un litige familial concernant un prêt impayé. Mais la défense de Michael Fourte étonne. Le demandeur et ses avocats auraient en effet découvert "des citations inexactes dans le mémoire d’opposition des défendeurs, qui semblaient avoir été 'hallucinées' par un outil d’IA", précise Joel Cohen, juge à la Cour suprême de New York.
Dans une décision rendue ce mois-ci, le juge Cohen a confirmé que l’avocat avait intégré de fausses citations (des références à des affaires passées) générées par une intelligence artificielle dans son dossier.
Deux fois plus d'erreurs la deuxième fois
Pris la main dans le sac, une demande de sanctions a été faite contre l’avocat en question. Celui-ci n’a cependant pas hésité à réitérer l’expérience en incluant d’autres citations entièrement inventées par une IA dans sa défense devant le tribunal. Et il a même commis deux fois plus d’erreurs que le document initial. Sept affaires citées n’existaient tout simplement pas et trois autres ne soutenaient pas les arguments avancés.
Il n’a d’ailleurs ni nié ni admis avoir utilisé l’IA. Il a seulement reconnu que "plusieurs passages, censés paraphraser ou résumer les principes juridiques, avaient été placés par inadvertance entre guillemets."
Sans surprise, sa récidive a aggravé son cas. Résultat, le jugement a été sans appel. "L’avocat s’est appuyé sur une IA non vérifiée –dans ses déclarations, par l’intermédiaire de collègues insuffisamment supervisés– pour défendre son utilisation d’une IA non vérifiée", déplore le juge. Il a tenu à rappeler que le recours à des outils d’IA ne dispense pas les professionnels du droit de leur devoir de vérification rigoureuse.
Plusieurs cas similaires
"La prolifération de l’utilisation non vérifiée de l’IA crée ainsi le risque qu’une fausse citation se retrouve dans une décision judiciaire, obligeant les tribunaux à consacrer leur temps et leurs ressources limitées pour éviter un tel résultat", note-t-il, visiblement agacé d’avoir perdu son temps.
L’avocat a finalement été condamné à payer les frais d’avocat de la partie adverse et le juge a ordonné que sa décision soit transmise au Bureau de déontologie des avocats du New Jersey.
Face à la sévérité du tribunal, Michael Fourte a fini par reconnaître ses fautes. "Je n’ai pas vraiment d’excuse", a-t-il déclaré, tout en admettant n’avoir pas vérifié chaque citation et s’en être remis à ses collaborateurs. "Lorsque les avocats ne vérifient pas leur travail, qu’il soit généré par l’IA ou non, ils portent préjudice à leurs clients et nuisent à la Cour et à la profession", a simplement rétorqué le juge. "En résumé, le devoir de franchise des avocats envers la Cour ne peut être délégué à un logiciel."
Ce n’est pas la première fois qu’un avocat utilise l’IA. En juin dernier, Richard Bednar, un avocat américain, a été sanctionné par la cour d’appel de l’Utah pour avoir écrit un document juridique à l’aide du logiciel d’intelligence artificielle ChatGPT. L’avocat Steven Schwartz avait eu recours au logiciel ChatGPT lors d’une affaire en 2023, où il avait invoqué des procès inventés de toute pièce.