Amazon a 30 ans: comment Jeff Bezos est passé de libraire dans son garage à bodybuilder richissime

1994. Lunettes rondes vissées sur le nez, premiers signes de calvitie et polo noir sur le dos, le jeune Jeff Bezos fait visiter à son père son modeste garage de Seattle. Au programme, un simple ordinateur et un télécopieur enseveli sous une montagne de documents.
"Je vis à Seattle depuis 1994, date à laquelle j'ai créé Amazon dans mon garage", écrivait Jeff Bezos en novembre dernier, dans une publication Instagram. "Dans cette vidéo, c'est mon père qui est derrière la caméra et qui visite le premier 'bureau' d'Amazon." Cette dernière fête ses 30 ans ce 5 juillet 2024.
Qui aurait cru alors qu’une librairie en ligne, fondée aux débuts d’internet se transformerait en un géant tentaculaire qui satisfait les moindres désirs de centaines de millions de clients? Car en trente ans, l'entreprise de Jeff Bezos a bien grandi... et son fondateur aussi.
Aujourd'hui, le crâne dégarni de Jeff Bezos est aussi connu que les lunettes de Bill Gates ou le col roulé noir de Steve Jobes. C'est simple, Jeff Bezos est devenu un mythe. Celui d'un businessman américain, l'une des premières fortunes mondiale qui, après avoir fondé son empire depuis un garage, a su étendre son emprise bien au-delà de la seule activité de distribution.
Un intello devenu "roi d'internet"
Mais l'histoire de Jeff Bezos, c'est d'abord celle d'un passionné d'informatique et de lecture. En parallèle de son lycée à Miami, dont il sort major de promo, l'adolescent suit des cours de sciences à l'université de Floride. Le parcours sans faute de l'étudiant continue, puisqu'il sort diplômé en 1986 d'un Bachelor en sciences de l'informatique à l'université de Princeton.
Ce bagage lui permet de démarrer une carrière à Wall Street et de devenir le plus jeune vice-président du fond d'investissement D.E Shaw & Co. Jeff Bezos, alors âgé de 29 ans, commence déjà à se dégarnir. Son visage un peu pâle est caractéristique des accros au travail. Car malgré sa belle trajectoire d'analyste financier qui semble toute tracée, l'appétit du jeune Bezos n'est pas satisfait. Il en veut plus. Et il veut surtout entreprendre.
En s'intéressant aux balbutiements du e-commerce, le trentenaire flaire le bon filon. En 1994, la Cour suprême américaine vient d’annoncer que les commerçants en ligne échapperont à la taxe sur leurs ventes dans les Etats où ils ne sont pas physiquement présents. Tout naturellement, ce fou des livres choisi, donc, de créer une librairie en ligne baptisée Amazon.
L'objectif? Créer la "plus grande librairie du monde". Un an plus tard, il vend son premier livre: Fluid concepts and Creative Analogies, de Douglas Hofstadter... un ouvrage d'informatique. Rapidement, la machine s'emballe. Dès la première année, le site engrange 20.000 dollars de chiffre d'affaires. En 1997, Amazon.com fait son introduction en bourse. Et deux ans plus tard, Jeff Bezos est sacré "homme de l'année et roi d'internet" par le magazine Time.
Diversification tout azimut
Pour faire face à la concurrence qui commence à vendre en ligne, Jeff Bezos pense son site en "everything store", un magasin qui propose tous les produits. Avant de se lancer, le jeune patron questionne 1.000 clients sur ce qu’ils aimeraient pouvoir acheter en ligne. Et conclut qu’il pourrait vendre... de tout. Ce qu'il fait. Là encore le succès est au rendez-vous puisque le groupe connaît une croissance continue depuis 30 ans.
Aujourd'hui, aucun produit n'échappe à la mainmise d’Amazon. L'entreprise distribue aussi bien des aspirateurs et des meubles que les courses de tous les jours ou des médicaments génériques. Un choix infini qui ravit ses 310 millions de clients.
Pourtant, la plus grande partie des bénéfices d’Amazon ne provient pas de l’e-commerce. Netflix, Linkedin, la SNCF ou encore Décathlon: tous dépendent d’Amazon, via les millions de serveurs internet que l’entreprise a déployés plus tôt et plus vite qu’aucune autre entreprise. En parallèle, le groupe a massivement investi dans le divertissement à travers Prime Vidéo ou l'acquisition du studio hollywoodien MGM.
Cette diversification, couplée à une organisation hyper optimisée, a permis à la firme de Seattle de devenir l'une des entreprises les plus influentes au monde. L’ex-librairie en ligne est aujourd’hui valorisée à 2.000 milliards de dollars en Bourse et compte 1,5 million de salariés. Un succès qui profite à Jeff Bezos. Le multimilliardaire truste régulièrement le top 3 des personnalités publiques les plus riches du monde.
Un joli pactole que le milliardaire s'emploie à faire grossir, un peu plus chaque jour. Au cours de sa carrière, Jeff Bezos a personnellement pris des participations dans des dizaines de sociétés. Il est ainsi actionnaire de Google, Uber et Airbnb. Mais son plus gros chèque, c'est en 2013 qu'il l'a signé en s'offrant pour 250 millions de dollars un prestigieux quotidien américain: le Washington Post. De quoi lui permettre d'acquérir une influence dans les milieux politiques.
Alien, muscles et poulpe au petit déjeuner
Jeff Bezos n'oublie pas de dépenser son argent afin de réaliser ses fantasmes les plus fous, comme la construction d'une horloge capable de fonctionner pendant 10.000 ans ou le financement d'une start-up pour inverser le vieillissement. En 2000, il part aussi à la conquête de l'espace avec sa société Blue Origin qui met au point des fusées pour développer le tourisme spatial.
Entre deux projets dantesques, le milliardaire chauve au rire tonitruant joue le rôle d'un alien dans le film Star Trek Beyond, embarque régulièrement sa famille en sous-marin pour partir à la recherche des restes des fusées de la Nasa tombés dans les océans et mange parfois du poulpe au petit-déjeuner pour rester en forme.

Il faut dire qu'au fil des années, le gringalet à lunettes des années 1990 a laissé place à un bodybuilder chauve, adepte des régimes protéinés et des entraînements de sport. Un physique impressionnant, qui a connu la même métamorphose que son compte en banque.
Un divorce à 38 milliards de dollars
Mais le richissime sportif cache aussi son lot de frasques et de scandales. Le chef d'entreprise, qui a délaissé ses fonctions de PDG d'Amazon en 2021, a longtemps été critiqué pour son organisation du travail, aussi efficace que controversée. Une énième enquête du New York Times en 2015 avait notamment jugé le climat interne chez Amazon "exécrable".
En 2019, c'est son divorce qui fait couler beaucoup d'encre dans les journaux. Après 25 ans de vie commune, le mariage de Jeff Bezos et MacKenzie Bezos a volé en éclats après la révélation de sa liaison avec Lauren Sanchez, une ancienne présentatrice de télévision. Le divorce lui aura coûté près de 38 milliards de dollars.
Pas de quoi freiner la fortune du milliardaire qui était en mars dernier la personnalité la plus riche du monde, devant le patron de Tesla Elon Musk. D'après le classement de Bloomberg, la fortune de Jeff Bezos s'élève désormais à 219 milliards de dollars.