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Le futur se rapproche: on a testé Orion, les lunettes de réalité augmentée de Meta

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Dévoilées en septembre 2024 lors de la conférence Connect de Meta, les lunettes Orion restent un prototype avec déjà beaucoup d'avancées, une vraie proposition, et quelques améliorations possibles. Tech&Co a pu jeter un oeil sur le futur.

La bataille de la vision connectée sera très vraisemblablement la prochaine guerre des géants de la tech. Google avait pris de l'avance (trop) avec ses Google Glass dans la dernière décennie avant de lâcher l'affaire, mais l'entreprise de Mountain View a déjà teasé son retour ces dernières semaines et notamment lors de sa conférence Android 16, promettant monts et merveilles très vite, sans doute lors de la Google I/O.

Samsung a son projet Moohan, un casque de réalité virtuelle conçu avec Google, mais aussi une paire de lunettes connectées pour aller rivaliser avec les Ray-Ban Meta. Et Apple n'est pas en reste. Même s'il est loin d'être un succès, son Vision Pro - estampillé "ordinateur spatialisé" plutôt que casque de réalité virtuelle en raison des possibilités qui lui sont prêtées - a fait montre d'un savoir-faire technologique sans commune mesure, loué pour son innovation à défaut d'être déjà indispensable.

Les lunettes connectées Ray-Ban Meta
Les lunettes connectées Ray-Ban Meta © JOSH EDELSON / AFP

Mais la marque californienne y croit visiblement et ne limite pas ses ambitions pour autant. Elle aurait cependant, elle aussi, des lunettes de réalité augmentée dans sa besace à dégainer tôt ou tard. Un marché pourtant où les acteurs sont déjà nombreux, d'Oppo à TCL en passant par Huawei et même Lenovo, avec des propositions louables, mais sans pour autant trouver le chemin du succès indiscutables.

Les lunettes connectées, le nouveau terrain de jeu des ténors

C'est sans doute pour cela que Meta mise beaucoup sur son projet Orion. Car il ne va pas aller au choc frontal avec les Ray-Ban Meta. Les lunettes de réalité augmentée veulent surfer sur une autre vague technologique. Orion se rêve plutôt en mélange d'immersion numérique et de simplicité du quotidien. Nous avons pu vérifier, lors d'une courte démo, les premières promesses des lunettes de Meta qui prend le meilleur des Ray-Ban Meta et du casque Meta Quest pour concevoir une vision d'un futur technologique beaucoup plus pratique et polyvalent, pas juste divertissant ou créatif.

Orion se présente comme une paire de lunettes assez légère en carbure de silicium, élégante, même si l'on sait son form-factor encore en cours de réflexion. Cela reste un prototype niveau design qui est encore un peu grossier. Mais la miniaturisation des composants est déjà assez impressionnante.

Pour les faire fonctionner, il faut porter un bracelet connecté façon strap velcro. On le met à son poignet pour pouvoir ajuster les commandes gestuelles qui vous permettront de naviguer dans le menu, valider ou annuler. Pas d'écran sur ce bracelet qui réagit à coup de retours haptiques quand vous décidez de pincer votre pouce et votre index pour valider, retournez votre paume en faisant tapoter votre pouce contre votre majeur pour revenir au menu, ou, poing fermé, faites glisser votre pouce sur votre index replié pour "slider" dans les fenêtres qui s'affichent sous vos yeux.

Les Meta Orion sont encore massives, mais très légères et confortables
Les Meta Orion sont encore massives, mais très légères et confortables © Tech&Co

La prise en main des contrôles est assez facile. Si vous avez déjà utilisé le contrôle gestuel avec un casque de réalité virtuelle, ce sera assez inné. Vos yeux servent de pointeur. C'est d'ailleurs la toute première chose que l'on calibre au démarrage. Les lunettes se montrent très réactives au suivi de notre regard pour pointer vers une application ou un menu avant de valider du bout des doigts.

Il est à noter que si tout se passe sur les deux écrans embarqués - qui profitent d'un champ de vision d'environ 70°, le plus large affiché pour des lunettes AR, nous précise-t-on chez Meta -, les Orion sont accompagnés d'un petit module qui se positionne dans votre intérieur ou bien se glisse dans votre poche, votre sac à dos. C'est lui seul qui va "nourrir" les lunettes en connexion mobile et servir de cerveau au tout. Il a le mérite de faire ainsi économiser de la batterie aux lunettes et de permettre aussi d'avoir une monture plus compacte, débarrassée d'une partie de l'architecture électronique nécessaire.

Le pack de fonctionnement des lunettes Meta Orion
Le pack de fonctionnement des lunettes Meta Orion © Tech&Co

Une navigation réactive et intuitive

Une fois les lunettes chaussées, le bracelet au poignet, l'aventure peut commencer. Un menu s'affiche sous vos yeux sans vous couper de votre environnement, puisque tout se fait en réalité augmentée. Il n'y a pas l'effet waouh du menu "flottant" du Vision Pro, mais ce dernier reproduit la réalité et ne s'y superpose pas vraiment. On serait un peu plus proche de l'affichage d'applications que l'on a déjà vu par le passé auprès d'autres constructeurs. Mais il faut avouer qu'ici, tout semble un peu plus intuitif et "naturellement posé là".

Les Orion se commandent de la main et du regard, mais aussi possiblement de la voix avec le soutien de Meta AI embarqué. A l'aide des différents capteurs des lunettes et des caméras, l'assistant vocal de Meta parvient à comprendre l'environnement, définir les objets autour de vous et offrir une assistance en conséquence. Nous avons par exemple pu "scanner" de nos yeux plusieurs aliments sur une table. Nous avons alors demandé à Meta AI ce que nous pouvions faire comme recette. Une photo prise, une analyse à l'IA et les noms des aliments apparaissent en surimpression au-dessus des objets avant qu'une fenêtre contextuelle propose une recette et comment la suivre pour réussir son plat.

Orion, les lunettes de réalité augmentée de Meta.
Orion, les lunettes de réalité augmentée de Meta. © Meta

La reconnaissance d'objet et d'image par Meta AI existe déjà sur les Ray-Ban Meta, mais on peut ici visualiser la réponse. Le potentiel de ce véritable environnement augmenté empli d'informations complémentaires laisse présager de bonnes choses dans les possibilités éducatives, informatives et autres. Mais ce n'est pas le seul atout des Orion qui se reposent aussi énormément sur les services maison (Instagram, WhatsApp ou Messenger). Il est possible d'envoyer des messages façon SMS ou messagerie, de les "liker", d'y répondre grâce à la dictée vocale ou encore de passer des appels vidéo. Le tout est d'ailleurs assez stable et il est agréable de le faire en ayant les mains libres. On voit son interlocuteur en appel vidéo, mais lui ne nous voit pas. Un avatar à la Meta Horizon devrait être affiché à l'avenir pour ne pas donner la sensation d'une communication à l'aveugle pour l'un des deux interlocuteurs.

Pour ses Orion, Zuckerberg n'a pas caché qu'il cherchait un dispositif capable de mettre l'humain au centre d'un environnement technologique. Il y est et, pour parfaire le tout, il faut qu'il y soit à l'aise. L'affichage sera son grand soutien et ces écrans ajoutés sous nos yeux doivent se fondre dans la réalité pour mieux l'augmenter.

On peut passer un appel vidéo avec les Orion et votre interlocuteur apparaît comme en visio
On peut passer un appel vidéo avec les Orion et votre interlocuteur apparaît comme en visio © Meta

L'interface répond de manière extrêmement réactive aux commandes et au suivi des yeux. Il n'y a quasi aucune latence. On peut même ouvrir plusieurs applications et les disposer dans son environnement comme bon nous semble. On a ainsi mis des vidéos sur Youtube depuis le navigateur embarqué, continué de naviguer parmi les Reels d'Instagram tout en ayant la messagerie ouverte sur notre droite. Il est amusant de noter que le son profite d'une forme de spatialisation et du suivi de la tête. Si vous bougez chez vous, les écrans restent en place dans votre environnement et le son se fera alors distant dès que vous vous en éloignez. Libre à vous d'un pincement avec le pouce et le majeur de tout remettre dans votre champ de vision.

De la polyvalence, mais encore beaucoup trop attaché aux services Meta

Sur les premiers usages montrés par Meta lors de notre session de test, on constate donc que les Orion font un peu déjà de ce qu'on avait aperçu avec un casque Meta Quest sur la tête (multi-tâches, polyvalence des usages, audio, vidéo, contrôle vocal…) ou des lunettes Ray-Ban Meta (utilisation de Meta AI pour scanner l'environnement et le comprendre, prise de photo future, appels, etc.). Mais de manière plus intuitive et naturelle. Comme le Quest, il est possible de jouer avec les lunettes AR et même avec un autre possesseur de lunettes Orion en réalité augmentée via un QR Code à scanner.

Les Orion fonctionnent avec un bracelet haptique pour les commandes gestuelles
Les Orion fonctionnent avec un bracelet haptique pour les commandes gestuelles © Tech&CO

Le gros avantage des Orion, c'est de savoir se faire oublier facilement. Le bracelet haptique n'est pas gênant et ajoute des capteurs au produit global, libérant du poids à la monture. Il ne faudra donc pas oublier le module central. Il n'est pas filaire et nous n'avons aucune idée de l'autonomie réelle qu'il proposera. Mais sans lui, vous vous retrouverez avec de simples lunettes, un réflexe qu'il faudra avoir à moins que Meta ne trouve une alternative au fil du temps. Car les Orion sont encore un prototype. Interrogés sur le sujet, les représentants de Reality Labs ne donnent pas de fenêtre de disponibilité. On évoque 2030, c'est à la fois loin et près pour ce type d'appareil qui évolue à vitesse grand V ces dernières années.

Orion a encore une marge de progression sur la qualité d'affichage, la richesse de contenus et sur un affinement global de la monture encore un peu massive. Mais le futur débarrassé du smartphone se dessine bien ici: un appareil que l'on porte et que l'on oublie, qui comprend et se fond dans nos habitudes pour mieux les enrichir et jouer les assistants hors pair pour la productivité, les loisirs et le quotidien. Et finalement, n'est-ce pas ce que le smartphone a réussi à devenir ? Les lunettes nous libèreront les mains en prime pour en faire toujours plus. Le tout sans nous enfermer dans un casque pour cacher nos émotions et perdre le contact avec la réalité qui ici ne s'efface pas derrière le virtuel.

Melinda Davan-Soulas