"Le combat continue": Donald Trump rétablit une partie des sites fédéraux après une décision de justice

Une première victoire. Comme le rapporte The Verge, l'administration Trump a été contrainte de rétablir une partie des données clés de santé qui avaient été supprimées en masse au début du mois.
En effet, dès le 1er février, des données importantes concernant l'environnement, le genre ou la santé publique avaient été supprimées de certains sites gouvernementaux. Donald Trump avait ainsi réclamé à ses fonctionnaires de mettre fin aux initiatives de diversité, d’équité et d’inclusion, en supprimant toute référence publique à "l'extrémisme idéologie de genre" avant le vendredi 31 janvier.
Certaines données à nouveau accessibles
Résultats, des pages web entières du gouvernement avaient disparu. Au total, depuis le début du mois de février, 8.000 pages auraient été désactivées selon une enquête du New York Times. Informations liées aux vaccins, sur les maladies et infections sexuellement transmissibles (IST), sur la maladie d’Alzheimer ou sur les crimes haineux anti-LGBTQ... La liste des thèmes est longue. Des pages sur la santé mentale, l’addiction, les comportements discriminatoires raciaux à l’école, le harcèlement scolaire ou encore les politiques environnementales ont, elles aussi, été suspendues.
Une catastrophe pour les chercheurs. Plusieurs organisations, comme Doctors for America (DFA), American Federation of Teachers et Minority Veterans of America ont intenté des poursuites contre plusieurs agences gouvernementales pour bloquer ces mesures. Le Centre pour le contrôle et la prévention des maladies, l'agence américaine du médicament (FDA) étaient notamment mentionné.
Selon les plaignants, cette suppression aurait obligé des praticiens à "chercher des ressources alternatives pour les guider dans leur traitement des patients, à ralentir leurs pratiques cliniques ou à réduire la quantité d'informations qu'ils peuvent transmettre aux patients lors de visites à durée limitée", précisent-ils.
Et le processus a porté ses fruits. Ce 11 février, un juge fédéral a accordé une ordonnance de restriction temporaire, fixant un délai à ces agences pour rendre ces informations à nouveau disponibles en ligne. Résultat, plus d'une douzaine de pages internet contenant des données clés sont à nouveau en ligne.
"Le combat continue" a réagi sur X une médecin, retweetant la "victoire" de la DFA.
"On court au désastre"
Une première étape, loin d'être suffisante. Des milliers d'autres données clés ne sont toujours pas accessibles. "Le citoyen moyen devrait considérer cela comme de la censure", lance Georges Benjamin, directeur de l'American Public Health Association auprès de NBC News. "Ils examinent systématiquement tous les documents fédéraux... et suppriment les mots qu'ils trouvent offensants."
"Pour élaborer une politique de santé publique rationnelle et efficace, il faut disposer de données de santé publique précises et complètes. Si l’on supprime ces données, on court tout droit au désastre", s'alarme Charles Gaba, analyste des données sur les soins de santé.
Un avis partagé par l’épidémiologiste Katelyn Jetelina. "Les données de santé publique sont aussi précieuses que l’or, pour protéger la vie des Américains." En dehors de la santé, de nombreuses entreprises dépendent des données gouvernementales américaines pour comprendre leurs clients et gérer leurs activités.
La résistance se poursuit
Face à ces suppressions, les chercheurs ne sont d'ailleurs pas laissés faire. En dehors de la plainte, plusieurs d'entre eux se sont lancés dans une "course folle pour tenter de sauvegarder ces données", souligne Amy O'Hara, chercheuse à l'Université de Georgetown auprès d'AP.
C'est le cas de Charles Gaba. L'analyste a créé un index de toutes les pages du CDC grâce à Internet Archive, la bibliothèque numérique connue pour son travail d'archivage du web. ACASignups, un autre site géré par Charles Gaba, a ainsi préservé 7.200 pages statiques, PDF et autres feuilles de calcul concernant l'Affordable Care Act (l'Obamacare).
Des organisations tentent d'en faire de même. Ainsi, l'Association américaine des maladies sexuellement transmissibles a publié des données fédérales sur les MST, toutes récupérées à la hâte sur les sites du gouvernement avec leurs suppressions.
"Les décrets présidentiels ne changent rien à la situation des personnes atteintes d’IST", fustige Abigail Norris Turner, chercheuse et présidente de l'association. "Nous voulions nous assurer que des informations rigoureuses continuaient d’être mises à la disposition des personnes pour leur fournir les meilleurs soins possibles."
"Le public mérite d'y avoir accès"
Du côté des données climatiques, l'Environmental Data and Governance Initiative (EDGI), créé après le premier mandat de Donald Trump, avait, en amont; sauvegardé les données de l'indice de vulnérabilité sociale et de l'indice de justice environnementale du CDC et les partage sur un autre site web en libre accès. Ces deux outils sont à nouveaux accessibles sur les sites du gouvernement. Le Public Environmental Data Project a également archivé l'outil de sélection de la justice climatique et économique (CEJST) sur la qualité de l'environnement.
Comme le rappelle Katie Hoeberling, directrice des initiatives politiques au Open Environmental Data Project, certains de ces outils ont été financés par les contribuables. "Le public mérite d'y avoir accès, que ce soit à des fins de recherche, de plaidoyer ou de litige, ou simplement pour aider les gens à mieux comprendre leur environnement", insiste-t-elle pour NBC News.
Le hic, c'est que même si ces données sont archivées, elles ne sont pas aussi utiles si elles ne sont pas mises à jour. "Tout ensemble de données a une durée de vie utile" rappelle Dan Pisut, ingénieur principal senior chez Esri interrogé par The Verge. "Mais c'est mieux que rien."
D'autant que les processus de sauvegarde ne sont pas infaillibles. Par exemple, Internet Archive peut ne pas avoir entièrement enregistré une page web si un logiciel malveillant est détecté ou si le serveur hôte est mis hors service.