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Sécurité à Marseille: élus et préfecture de police s'opposent sur les renforts déployés

Un policier est de faction devant les locaux de l'Hôtel de police de Marseille, le 05 octobre 2010.

Un policier est de faction devant les locaux de l'Hôtel de police de Marseille, le 05 octobre 2010. - ANNE-CHRISTINE POUJOULAT

Dans un tweet depuis supprimé, Yannick Ohanessian, adjoint au maire de Marseille, a interpellé Gérald Darmanin pour demander de nouveaux renforts de police. La municipalité affirme que ce courrier "n'avait pas été entériné, ni administrativement, ni politiquement".

"L'insécurité dans notre ville n'a pas reculé". Dans un courrier envoyé au ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, les maires du 1er, 2e, 3e, 4e et 8e secteurs de la cité phocéenne réclament un renfort de 600 policiers dans la cité phocéenne.

Ce courrier a été relayé ce mercredi après-midi par Yannick Ohanessian, adjoint au maire de Marseille en charge de la tranquillité, via son compte Twitter. Le message a depuis été supprimé, mais il suscite depuis de vives réactions notamment de la part de la préfecture de police des Bouches-du-Rhône.

"M. Ohanessian a retiré rapidement son tweet en expliquant qu'il s'agissait d'une erreur. Ses mots ont certainement dépassé sa pensée, au vu des efforts inédits qu'ont consenti le Président de la République et le ministre de l'Intérieur pour Marseille", souligne la préfecture dans une réponse envoyée à BFM Marseille Provence.

"Il s'agit d'un courrier qui n'avait pas été entériné, ni administrativement, ni politiquement", indique de son côté la ville à BFM Marseille Provence.

"Un pansement sur une plaie ouverte"

Dans ce courrier, les maires d'arrondissements regrettent que l'Etat n'ait pas respecté ses engagements, notamment sur les renforts de police.

"Nous constatons, en tant qu'élus locaux, que l'insécurité de notre ville, elle, n'a pas reculé. Pour rétablir l'égalité républicaine avec les autres communes françaises, 600 policiers nationaux supplémentaires doivent être déployés dans les 240km2 qui composent notre ville", ont écrit les élus dans ce courrier à destination de Gérald Darmanin.

Alors que 300 policiers nationaux sont arrivés en renfort dans la cité phocéenne, les élus ont tenu à saluer les efforts "consentis (...) depuis deux ans".

"Les 300 policiers venus grossir les rangs de la Direction départementale de la Sécurité Publique des Bouches-du-Rhône procurent aux policiers et aux habitants, une bouffée d'oxygène", affirment-ils. Cependant, "force est de constater qu'ils ne sont qu'un pansement sur une plaie ouverte et béante", ajoutent-ils.

La préfecture de police se défend

Ces 300 policiers supplémentaires ont "permis de doubler le nombre de patrouilles de police secours dans les trois divisions, de doubler les BST du Nord, de créer deux nouvelles unités dans le Centre", détaille de son côté la préfecture de police des Bouches-du-Rhône.

Trois compagnies de CRS sont présentes "tous les jours depuis 18 mois, soit 200 policiers" et "fidélisées à Marseille", poursuit-elle rappelant également que des moyens matériels exceptionnels ont été attribués pour la police judiciaire et la direction départementale de la sécurité publique.

Deux nouveaux commissariat et hôtel de police seront créés "pour près de 150 millions d'euros d'investissements".

30 morts par balle en 2022

Pour appuyer leurs propos, Yannick Ohanessian, Sophie Camard, maire du 1er secteur, Anthony Krehmeier, maire du 2e, Didier Jau, maire du 3e, Pierre Benarroche, maire du 4e et Nadia Boulainseur, maire du 8e, évoquent la recrudescence des fusillades.

"Alors que Marseille a déjà trop souffert par le passé de la délinquance et du narco-banditisme, nous subissons en effet depuis plusieurs mois une résurgence de la violence avec des rafales de kalachnikovs qui retentissent de plus en plus près du centre-ville et de plus en plus tôt dans la journée", alertent-ils.

La dernière fusillade mortelle remonte au 8 décembre dernier, dans le 3e arrondissement. "Avec cette nouvelle tragédie, depuis le mois de janvier, plus de 30 Marseillais, dont certains n'ont pas vingt ans, ont ainsi trouvé la mort dans les règlements de comptes", regrettent les élus.

Et d'ajouter: "dans la deuxième ville de France, un Marseillais, tous les dix jours, succombe de ses blessures, sur fond de trafic de drogue".

"Une insécurité quotidienne"

Outre les fusillades mortelles, les élus ont fait part à Gérald Darmanin de "l'insécurité quotidienne" qui "pourrit la vie de tous les jours de nos concitoyens".

"Cambriolages, vols à l'arraché, désossages de véhicules, coups et blessures (de plus en plus souvent à l'arme blanche), rixes sur la voie publique, regroupement dans les halls d'immeubles sources de nombreuses nuisances", exposent-ils.

"Nous croyons que les Marseillais ont aussi le droit de vivre en toute insouciance, sans craindre pour leur vie, pour celles de leurs proches et de leurs enfants. Ils ont le droit à la tranquillité publique", ont écrit les élus.

Courrier qui "ne reflète pas la réalité"

Face à cette insécurité, la municipalité a pris la décision de "renforcer les effectifs de la police municipale", consolider son "dispositif de médiation sociale" ainsi que le développement de la vidéoprotection. Cependant, les élus attendent un soutien dans la lutte contre la délinquance.

"Face à l'insécurité que subissent beaucoup de quartiers, la municipalité ne peut pas tout. C'est la raison pour laquelle nous vous avons demandé de ne pas abandonner la deuxième ville du pays à son triste sort", ont écrit les maires.

Pourtant la préfecture de police affirme que "les résultats sont là: jamais autant de saisies et interpellations en matière de stupéfiants et jamais autant d'armes saisies."

"Ce courrier, retiré par son auteur, ne reflète pas la réalité de la situation et du travail engagé conjointement par l'Etat et la Ville", conclut-elle.

Martin Regley