Marseille: le guano de gabians responsable de la pollution des eaux de baignade?

Un goéland leucophée sur l'île classée de l'archipel de Riou, au large de Marseille (Bouches-du-Rhône), le 18 avril 2002. (Photo d'illustration) - GERARD JULIEN / AFP
À Marseille, les eaux de baignade sont contrôlées chaque jour pour garantir leur conformité et autoriser à hisser les drapeaux verts sur les plages. Mais parfois, les plages sont fermées après la détection d'"anomalies". Des pollutions qui ont déjà été attribuées à de nombreux facteurs au fil des ans: la météo, les bateaux, les industries ou même les incivilités humaines.
Mais des analyses, relevées par La Provence et réalisées en 2024 près de la plage de Saint-Estève au Frioul, pointent du doigt un nouveau coupable: les gabians. Ce sont les déjections de cet oiseau marin côtier, aussi appelé goéland leucophée, qui contribueraient donc à polluer les eaux de baignades de la cité phocéenne.
L'an dernier, la plage a été fermée "quelques heures", après des analyses insuffisantes. Pourtant, la municipalité n'a pas réussi à mettre le doigt sur la cause de cette pollution. "Nous avions voulu comprendre: il n'y avait pas de problème de présence de bateau, pas de problème d'assainissement", explique à nos confrères Christine Juste, adjointe au maire de Marseille en charge notamment de lʼenvironnement et de la lutte contre les pollutions.
"Nous avons demandé des analyses génétiques complémentaires. Et elles ont révélé les traces de gabians", continue l'élue. Plus précisément, une quantité suffisante de bactéries intestinales provenant de ces oiseaux, mettant en cause leurs fientes.
Les spécialistes pointent du doigt les cadavres d'oisillons
Pourtant, des spécialistes de la biodiversité marseillaise interrogés par La Provence, restent dubitatifs quant à la culpabilité du guano de gabians sur la pollution des eaux de baignade.
Si beaucoup d'individus se trouvent sur les plages, le problème peut être plus profond selon Alain Mante, responsable du secteur "Littoral ouest et archipels" du parc national des Calanques. "Il y a une concentration de jeunes goélands (sur les premières plages proches des îles, NDLR), dont la quantité de fiente peut avoir des conséquences sur la qualité des eaux", admet-il dans les colonnes du journal local.
Mais "il ne faut pas négliger le phénomène de mortalité des jeunes individus sur l'arrière de la plage", pointe Alain Mante. "Leurs cadavres dégradés pourraient aussi expliquer les analyses."
Aujourd'hui, rien ne prouve donc que les bactéries intestinales détectées proviennent de déjections, de cadavres, ou de plusieurs autres facteurs.
Une régulation de la population de gabians depuis 2024
Aujourd'hui, les recensements font état de 12.000 couples de gabians à Marseille, contre une centaine il y a 100 ans. En janvier 2024, face à une population toujours exponentielle, la préfecture avait publié un arrêté permettant à la ville de mettre en place des mesures pour la réguler.
Une opération de stérilisation des œufs de gabians avait été recommandée, notamment par la Ligue de protection des oiseaux. Des nids ont également été pris en charge.
Toutefois, l'association demande aussi depuis des années une meilleure gestion des déchets dans la cité phocéenne, l'une des causes principales de la multiplication des gabians, qui s'est adapté aux habitudes humaines.
Alors que cette opération de régulation des oiseaux est toujours en cours au moins jusqu'en 2026, la ville de Marseille continue d'analyser quotidiennement ces eaux. Un coût annuel de près de 180.000 euros pour la ville.