Changements d'enseignes, fermetures... Ces commerces accusés de blanchir l'argent du narcotrafic marseillais

Une boulangerie qui se transforme en épicerie du jour au lendemain. Un kebab qui change plusieurs fois d'enseignes et de propriétaires. Un magasin dont les portes restent fermées... Plusieurs petits commerces marseillais sont soupçonnés d'être utilisés pour blanchir de l'argent issu du narcotrafic.
Sur l'avenue Saint-Just, située dans le 13e arrondissement, certains établissements de restauration rapide sont étonnamment fermés y compris lors de la pause méridienne, censée être le moment clé pour faire croître le chiffre d’affaires.
"Un qui ferme, un qui réouvre"
"Quand il y en a un qui ferme, il y en a un qui réouvre", commente Christine, auprès de BFM Marseille Provence, à propos des nombreux snacks présents dans son quartier. Joëlle, de son côté, s'"étonne" du nombre de coiffeurs pour les hommes dans une même zone.
"Les magasins qui vendent des gâteaux et des trucs comme ça... Je me demande comment ils peuvent travailler", confie-t-elle au micro de BFM Marseille Provence. Claude, qui habite aussi dans le 13e arrondissement, partage la même analyse et "se pose des questions".
La majeure partie de l'argent du narcotrafic est blanchie à l'étranger, notamment au Moyen-Orient. Mais pour les "petites mains" du trafic de drogue, l'achat d'un petit commerce pour transformer l'argent sale en chiffre d'affaires est souvent la solution choisie.
Les soupçons des autorités ne se limitent pas à l'avenue Saint-Just ou au 13e arrondissement. Les doutes concernent aussi des locaux commerciaux présents dans des quartiers touristiques et actifs, comme sur le Vieux-Port.
"On a de plus en plus de petits commerces qui ont pignon sur rue et qui se trouvent en centre-ville, pas très loin du Vieux-Port" assure Bruno Bartoccetti, secrétaire du syndicat Unité Police, à BFM Marseille Provence. D'après lui, "ils sont là pour blanchir" de l'argent sale.
"Il y a du mouvement, la population évolue dans les rues et autour du Vieux-Port", poursuit-il.
Gérald Darminin veut "taper au portefeuille"
Selon Bruno Bartoccetti, "les Marseillais ne viennent pas dans ces petits commerces", où les produits sont "très chers" et ne sont "pas vendus". "On sait que ces fonds de commerce sont là pour blanchir de l'argent", conclut-il.
Les sommes à blanchir sont généralement importantes, puisqu'un point de deal marseillais peut engranger près de 50.000 euros par jour.
Début janvier, le ministre de la Justice Gérald Darmanin dévoilait son intention de "taper au portefeuille" les membres du narcotrafic, en ciblant le "blanchiment d'agent".
"La question du blanchiment doit être la plus importante de nos actions dans les prochains temps, c'est là qu'on pourra avoir très rapidement des actions rapides, et c'est là que nous pouvons faire mal aux narcotrafiquants", déclarait-il le 2 janvier, se félicitant de la saisie de 41 millions d'euros en 2024 dans les Bouches-du-Rhône.
Le garde des Sceaux martelait également sa volonté de "généraliser" la loi qui permet de saisir des biens "avant même le jugement", qu'il s'agisse de "délinquants du quotidien" ou de "grands bandits".