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Lyon: de Vénissieux à l'Afghanistan, deux anciens détenus de Guantanamo témoignent

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Mourad Benchellali et Nizar Sassi ont vécu les camps d'entraînement jihadistes en Afghanistan et l'incarcération à Guantanamo en 2001. Vingt ans plus tard, ils racontent l'envers du décors en BD.

De Vénissieux à Guantanamo. Dans une BD intitulée "Le Jour où j'ai rencontré Ben Laden" (éditions Delcourt/Encrages), l'auteur Jeremie Dres raconte l'histoire de Mourad Benchellali et Nizar Sassi, deux jeunes originaires du quartier des Minguettes à Vénissieux qui se sont retrouvés dans un camp d'entraînement d'Al-Quaïda en Afghanistan. Le premier est issu d'une famille pratiquant un islam conservateur, le second se passionne rapidement pour les armes.

À l'été 2001, juste avant les attentats du 11-Septembre, les deux jeunes âgés de 18 ans s'envolent en Afghanistan, influencés par leur entourage. "On est partis à l'instigation d'un de mon grand frère (...) avec beaucoup de naïvité et d'ignorance puisque nous nous sommes retrouvés sans l'avoir choisi dans un camp d'entraînement et c'est là que nous allons connaître l'embrigadement", raconte Mourad Benchellali au micro de BFM Lyon.

"C'est absolument pas ce que nous avions prévu au départ. On s'est retrouvés dans une filière qui nous a amené dans ce camp", ajoute Nizar Sassi.

C'est là qu'ils rencontrent Ben Laden, l'instigateur de l'attaque des tours jumelles le 11 septembre 2001 à New-York. À ce moment-là, les deux Lyonnais ne le connaissent pas: "On avait l'impression d'avoir affaire à un prédicateur (...) et c'est quand il va être assez clair en expliquant qu'il prône les attentats-suicides qu'on comprend qu'on ne s'est pas simplement retrouvés embarqués dans un camp paramilitaire mais plutôt dans un camp terroriste", détaille Mourad Benchellali.

Passage par la prison de Guantanamo

Les deux Français quittent l'Afghanistan peu après l'attentat du 11-Septembre, et sont arrêtés par l'armée américaine en passant au Pakistan. Soupçonnés d'être des jihadistes (ce qu'ils ont toujours réfûté), ils sont envoyés dans la célèbre prison de Guantanamo, au sud-est de l'île de Cuba. "On s'est dit que c'était le début (...) de la fin du cauchemar, même si après on a compris que les choses allaient être plus complexes", se souvient Mourad Benchellali.

"On s'est rendu compte que les Américains étaient complètement perdus, ils ne savaient pas qui était qui. Le temps qu'ils fassent le tri, ils allaient mettre des années", complète Nizar Sassi.

Raconter l'envers du décor aux jeunes

En 2004, ils sont libérés et reviennent en France, où ils sont de nouveau emprisonnés un an à Fleury-Merogis avant d'être libérés. Depuis, les deux amis consacrent leur temps à faire de la prévention auprès des jeunes tentés par le jihad: "La première de nos actions ça a été de témoigner, d'abord parce qu'on avait remarqué que des jeunes pouvaient s'identifier à nos histoires pour les mauvaises raisons (...) On s'est dit que ça serait bien de raconter cet envers du décors", explique Mourad Benchellali.

La situation a-t-elle changé en vingt ans pour les jeunes Français radicalisés? "Les conditions qui ont rendu vulnérables certains à partir existent toujours (...) On a toujours des jeunes qui peuvent être attirés", conclut Mourad Benchellali.

"Le Jour où j'ai rencontré Ben Laden" est paru le 25 août en librairie. Un tome 2 est en cours de préparation et devrait paraître d'ici l'été 2022.

Elodie Poyade avec Louis Chahuneau