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Traversée de la Manche: Utopia 56 dénonce l'impact de la sécurisation de la frontière franco-britannique

Des migrants tentent de traverser la Manche pour rejoindre la Grande-Bretagne sur le canot pneumatique d'un passeur, sur la plage de Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 15 janvier 2025

Des migrants tentent de traverser la Manche pour rejoindre la Grande-Bretagne sur le canot pneumatique d'un passeur, sur la plage de Sangatte, près de Calais, dans le nord de la France, le 15 janvier 2025 - BERNARD BARRON

Le rôle de la surveillance policière a été pointé du doigt par l'association Utopia 56, ce mercredi 5 mars, lors d'une conférence de presse sur les drames migratoires à la frontière franco-britannique.

L'association d'aide aux migrants Utopia 56 a dénoncé mercredi l'intensification de la surveillance policière à la frontière franco-britannique, réaffirmant qu'elle contraint les migrants à prendre toujours plus de risques pour traverser la Manche, au péril de leurs vies.

En 2024, l'association a reçu 428 appels de migrants en difficulté sur des embarcations, soit "plus de 15.000 personnes concernées", contre 182 appels en 2023, a déclaré Célestin Pichaud, coordinateur de l'antenne de Grande-Synthe d'Utopia 56, lors d'une conférence de presse à Calais.

Des embarcations "de plus en plus surchargées"

"Les embarcations sont de plus en plus surchargées et les conditions de départ de plus en plus difficiles", a souligné Angèle Vettorello, coordinatrice de l'association à Calais. Elle a pointé notamment la "répression" sur l'acheminement du matériel nautique, qui réduit le nombre d'embarcations disponibles alors que "le nombre de personnes tentant de traverser vers le Royaume-Uni reste le même, voire augmente".

Les interventions policières sur les plages, visant à empêcher les départs, "créent un stress intense et une panique parmi les exilés", a-t-elle encore déploré. Face au durcissement sécuritaire, certains tentent désormais de partir depuis des zones plus éloignées au sud, "jusqu'à Dieppe". "La distance de traversée est alors multipliée par trois, augmentant les risques notamment d'hypothermie et de collisions", a rappelé Mme Vettorello.

"Un guichet de demande d'asile" demandé

Sur les plages, les forces de l'ordre sont équipées "comme pour faire du maintien de l'ordre", avec "boucliers, casques, gaz lacrymogènes et LBD". Pourtant, ce sont "les seuls acteurs présents pour répondre à des situations de détresse humanitaire" a-t-elle encore relevé. Yann Manzi, cofondateur d'Utopia 56, a plaidé pour "l'ouverture de routes sûres" et la création "d'un guichet de demande d'asile à Calais" afin que ces réfugiés puissent être accueillis en France.

L'association a aussi dénoncé des entraves à son action par les forces de l'ordre, pointant de "nombreux contrôles" de ses bénévoles. Elle a annoncé avoir porté plainte mardi auprès du parquet de Dunkerque pour des violences policières subies par ses membres à Gravelines (Nord) en 2024, selon elle.

Un signalement au procureur

L'association a par ailleurs adressé un signalement au procureur de Boulogne-sur-Mer après qu'une exilée aurait perdu connaissance sous une embarcation qui aurait été percée par les forces de l'ordre en novembre, d'après des témoignages de passagers recueillis par Utopia. Les traversées maritimes vers l'Angleterre depuis le littoral français à bord d'embarcations de fortune ont coûté la vie à 78 migrants en 2024, un record dans cette zone.

Le nombre de migrants secourus en mer dans le nord de la France a bondi de près de 30% en 2024, totalisant 6.310 personnes, selon un bilan annuel publié le 13 février par la préfecture maritime de la Manche et de la mer du Nord.

Pour les gouvernements français et britannique, les seuls responsables de la hausse de la mortalité l'an dernier sont les passeurs. Jeudi dernier au Touquet (Pas-de-Calais), le ministre de l'Intérieur français Bruno Retailleau et son homologue britannique Yvette Cooper ont dit vouloir intensifier la coopération entre Paris et Londres contre ces "dangereux groupes criminels".

A.V. avec AFP