Lille: la colère des travailleurs transfrontaliers après la suppression "ubuesque" de trains vers Bruxelles

Vont-ils devoir se rabattre sur la voiture? Sur le bus? Les "navetteurs", ces femmes et ces hommes qui vivent d'un côté de la frontière belge et qui travaillent de l'autre, le craignent.
S'ils sont inquiets, suffisamment pour avoir organisé une manifestation en gare de Lille Europe ce jeudi, c'est parce qu'à compter de lundi, deux des liaisons ferroviaires qu'ils empruntaient quotidiennement vont disparaître.
Le train de 19h17 entre Bruxelles et Lille -le dernier de la journée-, va être supprimé, obligeant les travailleurs transfrontalier à prendre celui de 18h17. Dans l'autre sens, c'est le TGV de 18h08 qui ne roulera plus. S'ils manquent la correspondance de 17h30, ils devront patienter jusqu'à 20h08.
"Ce sont nos vies, notre travail"
Cette décision, la SNCF la justifie auprès de La Voix du Nord par une volonté d'"améliorer la production et la régularité" et de "répondre aux clients longue distance, plus nombreux". Elle ne sera pas sans conséquences pour les près de 600 personnes qui font la jonction entre Lille et Bruxelles (350 dans ce sens, 250 dans l'autre).
Karima Delli, nordiste et présidente de la Commission transports au Parlement européen, s'indigne de ce qu'elle considère comme "un véritable scandale".
"Nous avons besoin de ces lignes parce que, réellement, ce sont nos vies, notre travail notamment, a-t-elle affirmé au micro de BFM Grand Lille en marge de la mobilisation de jeudi. Nous sommes des transfrontaliers. On vit entre la Belgique et la France donc on a besoin de ces lignes."
"Beaucoup de douleur"
Aux côtés de l'élue européenne, les "navetteurs" rassemblés ce jour-là ont brandi des pancartes fustigeant la décision de réduire les liaisons ferroviaires. "No train, no gain... And yet a lot of pain", peut-on lire sur l'une d'entre elles ("Pas de train, aucun avantage... Et pourtant beaucoup de douleur")
"C'est une organisation professionnelle que je n'avais pas envisagée à court terme, et puis aussi personnelle, familiale, reconnaît une usagère quotidienne de la liaison France-Belgique. Ça pose énormément de problématiques: je ne peux pas rentrer à la maison, être avec la famille."
Un autre travailleur transfrontalier apporte un argument supplémentaire: "Le problème, c'est qu'on va concentrer le nombre de personnes dans un seul train, ce qui va faire que les personnes ne pourront même plus prendre le train pour rentrer de leur travail. On est vraiment dans une situation complètement ubuesque".
Pas de quoi faciliter la vie des "navetteurs", qui ne bénéficient notamment plus de l'arrêt des Thalys à Lille depuis 2019.
La Région prévoit d'interpeller le ministre des Transports
Thierry Masson, conseiller des Français de l'étranger installés en Belgique, a pris part à cette mobilisation avec les manifestants. Comme Julien Poix, conseiller régional, Franck Dhersin, vice-président de la région Hauts-de-France en charge des transports, n'a pas pu faire le déplacement. Il a cependant apporté son soutien aux "navetteurs" via son compte Twitter.
L'élu promet de "porter la parole" des travailleurs transfrontaliers auprès des responsables de la SNCF et au ministre des Transports, Clément Beaune.