Ce que l'on sait sur les accusations de harcèlement sexuel chez les pompiers du Nord

Le Service départemental d'incendie et de secours (Sdis) du Nord a ouvert une enquête interne lundi, après des accusations de harcèlement sexuel chez les pompiers.
L'affaire a été révélée en début de semaine, par La Voix du Nord qui a publié le témoignage de plusieurs femmes, pour des faits de 2018 et 2019.
•Deux témoignages
Une des jeunes femmes âgées de 29 ans raconte avoir été harcelée et décrit même une "descente aux enfers" en 2018, dans une caserne de la métropole lilloise. Pour cause, son compagnon et collègue aurait fait circuler un cliché intime d'elle.
"On ne me parlait plus que pour m’insulter ou me rabaisser, y compris en intervention", déclare-t-elle, à La Voix du Nord. Elle alerte alors son supérieur qui lui répond: "Tout ça, c'est de ta faute. Ici, on n'aime pas les aguicheuses." "Je n’avais jamais été aussi humiliée de ma vie", confie la jeune femme.
Un autre témoignage est édifiant. Il s'agit d'une jeune femme devenue pompier volontaire, en 2019, à 19 ans. En service dans la métropole lilloise, elle affirme avoir subi des attouchements, notamment il y a six mois, quand elle a été bloquée par un collègue plus âgé qu'elle.
"Il m’a dit que si je ne couchais pas avec lui, il ferait de ma vie un enfer", se souvient, la jeune femme.
Là encore, elle alerte son supérieur, en vain. Ses collègues l'accusent alors d'être "une balance". "Ils me disaient que j’étais une balance, raconte-t-elle. Que pour me punir, j’allais passer à la casserole, c’est-à-dire finir dans leur lit. Je venais à la caserne avec la boule au ventre." A nouveau, la jeune femme affirme avoir fait la démarche d'avertir son supérieur.
•Enquête interne
Le Sdis du Nord a indiqué lundi avoir ouvert une enquête interne "concernant ces deux sapeurs-pompiers féminins dont les dossiers étaient jusqu'alors inconnus de la hiérarchie".
"Quelques cas individuels ne peuvent remettre en cause le travail incroyable réalisé par plus de 7200 agents, tous status confondus. Savoir se remettre en question, c'est aussi cela la force des sapeurs-pompiers", insistent-ils dans un message posté sur Twitter.
•Le suicide d'une sapeur-pompier en 2020
Cette affaire intervient après le suicide en novembre 2020 d'une sapeur-pompier volontaire de la caserne d'Haumont. Quelques jours avant de commettre son geste, la jeune femme de 23 ans aurait évoqué des faits de harcèlement lors de ses gardes.
Selon le Sdis, l'enquête de police a "mis en lumière de très graves manquements", de la part des collègues, dont certains sont soupçonnés d'avoir diffusé une vidéo à caractère sexuel de la jeune femme.
À la suite de ce drame, des sanctions ont été prises: deux agents ont été révoqués, un troisième a été écarté six mois sans traitement. Il y a également eu résiliation pour trois volontaires ainsi qu'un blâme pour un quatrième, pour "harcèlement et agressions sexuelles", a indiqué la direction du Sdis.
•Une plateforme anti-harcèlement lancée
Le Service départemental d'incendie et de secours tente de rémédier à ces agissements, via une plateforme d'alerte anti-harcèlement qui a été lancée en avril dernier.
"Le service départemental d'incendie et de secours du Nord a mis en place une procédure d’alerte éthique à destination de l’ensemble des collaborateurs, indique le Sdis du Nord, sur son compte Twitter. Il leur permet de signaler, via une plateforme en ligne tous faits répréhensibles dont ils auraient été victimes ou témoins."
"Ces signalements sont traités en toute confidentialité par une référente extérieure au Sdis", ajoute-t-il.
La direction du Sdis indique qu'il s'agit d'une structure extérieure gérée par Delphine Pollet, professeure de droit à l'Université catholique de Lille. Elle aura notamment pour mission de "recueillir les signalements, de les qualifier et de les instruire dans le strict respect de la confidentialité".
À noter que le Sdis souhaite également accélérer la féminisation du personnel. Actuellement, le département du Nord compte une centaine de femmes pompiers.