"Ce médicament nous a réduits à néant": victimes du Mediator, des Nordistes témoignent de leur colère

"Le laboratoire a vendu un poison, il doit payer pour ce qu'il a fait". Un an après la condamnation, en première instance, des laboratoires Servier, la colère ne retombe pas parmi les victimes du Mediator.
Une colère qui s'est ravisée depuis ce lundi, avec l'ouverture du procès en appel du scandale sanitaire du Mediator, ce médicament des laboratoires Servier accusé d'avoir causé la mort de centaines de patients, devant la cour d'appel de Paris.
Mis sur le marché comme antidiabétique en 1976, mais indûment prescrit comme coupe-faim jusqu'en 2009, le Mediator a entraîné de graves effets secondaires sur des milliers de patients souffrant de pathologies cardiaques ou pulmonaires et parfois entraîné leur mort. Durant ses trente-trois ans de commercialisation, il a été prescrit à environ cinq millions de personnes.
"On ne peut plus rien faire"
À Liselles, dans le Nord, les membres de l'association de défense des victimes du médicaments se réunissent régulièrement. La plupart se sont vus prescrire du Mediator dans les années 2000. Près de 25 ans plus tard, les séquelles physiques persistent.
"Ce médicament nous a détruits, nous a tués, nous a réduits à néant. On ne peut plus rien faire. Je ne peux même plus me promener avec mes petits-enfants, je dois me promener avec une canne. Je ne sais plus marcher, je suis obligée de mettre des chaussures spéciales", confie Marie-Paule Vercoutre, secrétaire de l'association, au micro de BFM Grand Lille.
En première instance, le 29 mars 2021, les laboratoires Servier et Jean-Philippe Seta, anicen numéro 2 du groupe, ont été reconnus coupables de tromperie aggravée et d'homicides et blessures involontaires. Servier a été condamné à une amende de 2,7 millions d'euros et Jean-Philippe Seta à une peine de quatre ans de prison avec sursis, assortie à une amende de 90.600 euros. Le groupe a été en outre condamné à verser un total de plus de 183 millions d'euros de dommages et intérêts aux victimes.
Le deuxième laboratoire français avait en revanche été relaxé des délits d'obtention indue d'autorisation de mise sur le marché et d'escroquerie, au préjudice notamment de la Sécurité sociale, ce qui a conduit le parquet de Paris et des parties civiles à faire appel. Dans leur sillage, le groupe pharmaceutique a lui aussi formé un appel.
"J'espère que la justice penchera du bon côté"
Une faible consolation pour les victimes, qui attendent de la justice plus de fermeté. "J'attends au moins la confirmation de la décision du 29 mars 2021. Peut-être même plus, parce que je souhaite qu'ils soient plus punis. Avoir du sursis, ce n'est pas normal", estime le président de l'association, Michel Deraed.
"Le laboratoire a vendu un poison, il doit payer pour ce qu'il a fait. Il le savait, il doit payer. J'espère que la justice penchera du bon côté", tonne de son côté Marie-Paule Vercoutre.
Très diminués, les membres de l'association ne se rendront pas à Paris pour suivre le procès, qui doit durer six mois. Le verdict sera rendu le 28 juin prochain, à raison de deux journées et demi d'audience par semaine.
Au-delà de la peine, les membres de l'association réclament également une décision symbolique: le retrait, à titre posthume, de la Légion d'honneur accordée à Jacques Servier en 2009.