Pêches, cerises, abricots: il y aura peu de fruits français cet été, et ils seront plus chers

Les productions de pêches, d'abricots et de cerises ont été touchées par les épisodes de gel au début du mois d'avril. - PIERRE ANDRIEU / AFP
Un été… sans abricots ni cerises? S'ils ne seront pas complètement absents des étals des supermarchés, ils ne seront pas non plus très nombreux: après les épisodes de gel qui ont touché les vergers au début du mois d'avril, la production française de fruits d'été sera bien en-deçà des années précédentes. Environ 47.000 tonnes d'abricots devraient être produits en France en 2021, contre un peu moins de 84.000 tonnes l'année précédente, qui avait déjà été une mauvaise récolte. Soit une chute attendue de 43% de la production, et même de 64% si l'on compare à la moyenne 2015-2019.
Du côté des pêches et des nectarines, plus résistantes face au gel, la production a été un peu moins éprouvée par la vague de froid, même si elle est loin d'avoir été épargnée par la météo. Sur le terrain, c'est la vallée du Rhône qui a le plus souffert, notamment la Drôme ou le Vaucluse.
"On devrait être autour de 20% de la production habituelle de pêches et d'abricots dans la vallée du Rhône, contre environ 50% dans la région Gard/Crau et plus de 70% dans le Roussillon", précise Raphaël Martinez directeur de l'Association des organisations de producteurs (AOP) Pêches et abricots de France.
"Des producteurs ont tout perdu"
Pour les cerises, les producteurs devraient ramasser l'équivalent d'un tiers de la récolte d'une année normale, selon des premières estimations. Mais il est encore difficile d'évaluer les conséquences précises pour la saison entière, car le gel attaque aussi les fruits sur le long terme, pas seulement sur les bourgeons ou les jeunes fruits. Certaines cerises vont continuer à se développer sur les branches jusqu'à un certain stade puis vont noircir et tomber de l'arbre avant d'être mûres. Le verdict final pour la récolte 2021 est donc encore inconnu pour le moment.
"Les variétés précoces semblent avoir été plus affectées que les variétés tardives, ce qui veut dire que les volumes qui sont mis aujourd'hui sur le marché ne sont pas représentatifs de la saison entière", estime Jean-Christophe Neyron, président de l'AOP Cerises de France.
D'autant qu'il y a aussi des différences selon les territoires où les cerises n'arriveront pas à maturité au même moment, contrairement aux années précédentes où la production était plus groupée. "Des producteurs ont tout perdu cette année tandis que d'autres auront 50% de leur récolte habituelle", ajoute-t-il.
Pour les pommes et les poires, dont les plus précoces n'arriveront qu'en d'août, l'heure n'est pas encore aux prévisions chiffrées. Ce que l'on sait déjà, c'est qu'elles n'ont pas été épargnées et que la récolte sera moindre que prévue. Mais la très forte floraison, exceptionnelle cette année, pourrait limiter en partie les pertes. Par ailleurs, "le pommier peut faire une deuxième floraison la même année, et même si ce sont des fruits plus petits, cela permet d'ajouter une deuxième récolte", avance Vincent Guérin, responsable des affaires économiques de l’Association nationale pommes poires (ANPP).
Plus de fruits "moches"?
Dans ce contexte, faut-il s'attendre à une hausse des prix des fruits français? Avec une offre moindre, et une demande toujours haute en été, elle semble inéluctable – mais ce n'est pas forcément une bonne nouvelle pour les producteurs. "En récoltant 20% de la production habituelle, et en prenant en compte tous les coûts fixes, ce ne sera pas possible de rattraper les pertes cette année, même avec des prix plus élevés", assure Raphaël Martinez. L'Etat a déjà promis un milliard d'euros d'aides via un "fonds de solidarité exceptionnel" pour les vignes et les vergers ravagés par le gel.
Les pommes, elles aussi, seront plus chères. Puisqu'elles se conservent plusieurs mois, elles sont consommées presque toute l'année: à défaut de pêches et d'abricots, les consommateurs pourraient se rabattre sur les pommes et les poires, créant une tension sur le marché. Si on ne veut pas se passer de fruits cet été, ou si on veut manger autre chose que des pommes, il faudra payer plus cher ou se tourner vers les productions des pays voisins. Encore faut-il qu'ils en aient suffisamment: la production d'abricots devrait chuter de 13% en Espagne cette année et de près de 30% en Grèce.
Du côté de la grande distribution, pour assurer l'approvisionnement en fruits français, beaucoup d'enseignes ont revu leur cahier des charges pour alléger les contraintes sur l'aspect des fruits. Des fruits un peu moins beaux, et qui pourront être vendus moins chers à leurs clients.