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Louis Gallois: "Le marché seul n'est pas toujours capable de faire les bons choix"

Louis Gallois, coprésident de La Fabrique de l'industrie.

Louis Gallois, coprésident de La Fabrique de l'industrie. - BFM Business

L'ancien dirigeant d'Airbus et de la SNCF estime sur BFM Business que l'Etat doit piloter la politique industrielle de la France.

Est-ce à l'Etat de piloter la réindustrialisation de la France? Alors que le gouvernement s'apprête à dévoiler un nouveau plan de relance, certaines voix s'élèvent contre ce dirigisme économique citant le "plan Calcul" de 1966 qui a échoué à faire de la France un champion de l'informatique.

Un débat qui n'a pas lieu d'être selon Louis Gallois. Aujourd'hui co-président du think tank La Fabrique de l'industrie, l'ancien dirigeant d'Airbus, de la SNCF ou encore de Safran estime sur BFM Business l'Etat a bien un rôle à jouer.

"Je ne pense pas que le marché soit seul capable de faire les bons choix, assure-t-il. Ce n'est pas le marché qui aurait fait le choix d'Airbus. Lorsque vous parlez ordinateur quantique, intelligence artificielle ou hydrogène, il faut que l'Etat indique dans quelle direction il veut aller et les acteurs économiques vont s'orienter dans ce sens."

Alors qu'aux Etats-Unis, le secteur privé empiète de plus en plus sur les anciennes chasses gardées du public, notamment dans la conquête spatiale, Louis Gallois estime que sans l'Etat, ces industries n'auraient jamais décollé.

"Vous avez vu l'argent que les Américains ont mis? M. Musk a reçu 10 milliards de dollars, rappelle Louis Gallois. L'effort de santé et de recherche dans la santé est programmé par la Barda (autorité liée au ministère de la Santé américain. NDR), ils ont leurs instruments."

"Mon modèle, c'est la Corée du Sud"

Pour autant, les Etats-Unis ne sont pas le modèle de prédilection de Louis Gallois qui regarde davantage du côté de la Corée du Sud.

"Ils ont les mêmes caractéristiques que la France, du point de vue taille, qui n'a pas de matière première, qui est entouré par des voisins aussi "amicaux" que la Chine, le Japon, la Russie et qui réussit formidablement."

Un modèle qui sera difficile d'égaler. En Corée du Sud, l'industrie représente selon les données de la Banque Mondiale près de 33% du PIB contre 16,3% pour la France selon ces mêmes données.

"Le pays a compris les dégâts de la désindustrialisation et a compris qu'il fallait se réindustrialiser, note Louis Gallois. On s'est aperçu [pendant la pandémie] qu'il manquait des choses essentielles notamment les principes actifs pharmaceutiques et il y a bien d'autres domaines où il nous manque des pans entiers d'économie."

Pour autant l'ancien patron d'Airbus ne pense pas que la réindustrialisation du pays passera par les relocalisations d'entreprises parties dans des pays à bas coûts.

"Je suis toujours un peu hésitant sur le terme "relocalisation" pour deux raisons: la première c'est que si on a délocalisé ce n'est pas pour rien, il y a des raisons de coûts ou d'accès à des marchés et on ne va pas relocaliser facilement. Si on veut vendre des avions aux Etats-Unis, il est très bon de produire aux Etats-Unis, si vous voulez vendre des voitures en Chine, vous devez les produire en Chine, rappelle le coprésident de La Fabrique de l'industrie. La deuxième c'est "relocalisation" rappelle l'industrie qu'on a connu, ce n'est pas celle-là dont on a besoin. L'industrie de demain a trois caractéristiques: elle est technologique car nous sommes un pays à coûts élevés, elle est numérisée et elle est éco-responsable."
Frédéric Bianchi
https://twitter.com/FredericBianchi Frédéric Bianchi Journaliste BFM Éco