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La reprise des transports publics compliquée par la nécessaire distanciation

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Alors que la SNCF et la RATP jugent difficile d’appliquer la distanciation d’un mètre dans les transports publics, le Conseil scientifique vient de réaffirmer que le masque seul ne suffisait pas à éviter les contaminations.

Les recommandations du Conseil scientifique sont venues compliquer la donne pour les transports publics, alors que les opérateurs espèrent que le port du masque pourra les affranchir des règles de distanciation lorsque les passagers reviendront à la fin du confinement.

Le PDG de la SNCF Jean-Pierre Farandou a été l'un des premiers à poser publiquement le problème, lors d'une audition au Sénat le 15 avril. Dans les trains de banlieue d'Ile-de-France par exemple, a dit le dirigeant de la SNCF, "si on nous impose de mettre un mètre ou un mètre et demi entre chaque passager, avec 100% des trains on ne transporte que 20% de ce qu'on transporte d'habitude... Donc ça ne marche pas!"

Réduction des places de 60 à 80%

Garder ses distances dans un métro, un tramway ou un bus réduit la capacité maximale de 60 à 80%, selon les différents acteurs qui se sont exprimés sur la question depuis. Une gageure, alors que les Français devraient reprendre le chemin du travail ou des boutiques à partir du 11 mai. D'autant que les transports publics, souvent surchargés en temps normal, ne fonctionneront pas encore à plein régime.

Jean-Pierre Farandou a donc plaidé pour que l'obligation de porter un masque puisse lever à bord les règles de distanciation. "Il faudra un avis médical pour le confirmer", a-t-il remarqué, ce qui n'empêcherait pas de "renforcer l'application des règles barrières pour sécuriser complètement le dispositif". Et bien sûr de désinfecter avec soin véhicules et stations.

Son avis est partagé par l'ensemble de la profession. On cite notamment à la RATP les exemples de Berlin, Hong Kong et Shanghai. "Le port obligatoire du masque dans un espace public partagé viendrait ainsi en substitution claire et logique pour tout un chacun à la règle de distanciation sociale", ont écrit au Premier ministre la fédération des opérateurs UTP, la RATP, la SNCF, Transdev, Keolis et l'association des transporteurs indépendants Agir.

Opter pour le port du masque obligatoire "sans mesure contraignante de distanciation sociale entre les voyageurs nous semble la condition fondamentale d'une sortie réussie du confinement. A défaut, nous craignons un chaos potentiel", ont insisté les signataires.

Contaminations, masque ou non

Le port du masque sera "probablement" obligatoire dans les transports en commun, a déjà fait savoir l'Elysée avant même qu'Edouard Philippe ne détaille le plan de déconfinement du gouvernement, mardi après-midi à l'Assemblée nationale. Mais porter un masque ne saurait affranchir de la distanciation, selon le Conseil scientifique.

"Le principe est le respect des distances minimales (1 mètre au moins de chaque côté) permettant d'éviter une contamination respiratoire et manuportée par gouttelettes. Ce principe doit être respecté dans tous les lieux publics, les commerces et les transports en commun", a-t-il écrit dans son avis rendu public samedi. 
"Le non respect des règles de distance physique d'un mètre de part et d'autre, que les usagers portent ou non un masque de protection, constitue un vecteur important de la transmission du virus", a-t-il argumenté.

Avis contradictoires

Pour embrouiller la situation, le Haut Conseil de la santé publique, qui conseille les pouvoirs publics, a publié dimanche son propre avis: lui va dans le sens des opérateurs en préconisant que "les professionnels des transports publics et les passagers portent systématiquement un masque grand public dès lors que la distance d'un mètre ne pourrait être respectée".

Les opérateurs contactés disaient lundi attendre les annonces du Premier ministre. Avec un certain nombre de questions: comment faire respecter cette distanciation, si elle est décidée? Faudra-t-il filtrer les gens à l'entrée des rames et des stations, au risque de les entasser sur un quai ou un trottoir? Pourra-t-on empêcher quelqu'un de monter dans un bus?

Et avec l'impression que l'avis du Conseil scientifique ne va pas aider les transports publics à surmonter la peur de la promiscuité dans la population tant que le virus continuera à circuler. 

De nombreux Français devraient choisir de prendre le volant. Parmi les mesures envisagées pour éviter la thrombose, les autorités veulent garder le plus d'employés possible en télétravail, décaler les horaires pour "lisser" les heures de pointe et favoriser la pratique du vélo. Le HCSP recommande officiellement d'"utiliser si possible un véhicule individuel propre (vélo, trottinettes...) pour ses déplacements professionnels".

N.G. avec AFP