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Les États-Unis vont-ils bientôt manquer de vis et de boulons? Taïwan qui est le premier producteur mondial est étouffé par les droits de douane de Trump

Des vis, des clous et des embouts (photo d'illustration).

Des vis, des clous et des embouts (photo d'illustration). - Photo par PASCAL BOUCLIER / Photononstop / Photononstop via AFP

Depuis 50 ans, les États-Unis achètent leurs vis et leurs boulons à Taïwan. Or, les usines y sont actuellement asphyxiées par les droits de douane imposés par Donald Trump sur les importations d'acier et d'aluminium.

Et si les États-Unis venaient un jour à manquer d'objets aussi basiques que des vis? Cette possibilité ne peut être écartée alors que la politique commerciale agressive de Donald Trump est en train d'asphyxier Taïwan, le premier fournisseur des entreprises américaines.

L'île n'est pas seulement la patrie des semi-conducteurs, elle est aussi le royaume des vis, des clous, des écrous et des boulons. C'est même sur cette industrie de la fixation que Taïwan s'est appuyé à partir des années 1950 pour moderniser son économie. Son essor a été favorisé ensuite par la guerre du Vietnam, alors que les fabricants taïwanais fournissaient l'armée américaine.

Ces derniers assurent 13% de la production mondiale, selon des données de 2022, et sont les premiers fournisseurs de l'Amérique du nord. Problème, ces fabricants se trouvent aujourd'hui dans une situation économique critique.

"Tout est en pause. Beaucoup de nos clients nous ont dit: 'On verra bien', mais nous n'avons pas reçu beaucoup de commandes", glisse le patron de la société Sheh Fung Screw au New York Times.

En un an, ses commandes ont chuté de 20%. Les entreprises taïwanaises sont prises dans un étau. D'un côté, elles subissent de plein fouet les conséquences du tournant de la politique américaine. Depuis juin, leur production est frappée par des droits de douane à 50% décrétés par Donald Trump pour l'acier et l'aluminium. De plus, la monnaie locale s'est appréciée de 10% par rapport au dollar américain depuis le début de l'année.

De l'autre côté, les entreprises taïwanaises sont confrontées à la concurrence croissante des entreprises chinoises, qui proposent des tarifs 30 à 50% plus faibles. Conséquence: les dépôts de bilan s'enchaînent. Un responsable politique local indique au New York Times qu'une douzaine d'usines de sa circonscription a fermé ces derniers mois.

Perturbations aux États-Unis

Les conséquences sont déjà visibles sur le sol américain. Fin mars, les prix des clous avaient augmenté de 4% selon le Wall Street Journal. L'augmentation des coûts perturbe les chaînes d'approvisionnement, dans des secteurs aussi divers que l'électroménager, l'automobile ou la construction. Or, pour l'heure, ces perturbations sur les importations ne peuvent pas être compensées par une production américaine.

"La capacité de production dont nous avons besoin n'existe pas ici aux États-Unis", tique Gene Simpson, président de Semblex, un fabricant de fixations basé dans l'Illinois, dans le Wall Street Journal.

Les tensions sur les approvisionnements engendrent dès lors des surcoûts et des prix volatils. Conjuguée à des taux d'intérêts élevés, la hausse du prix des matériaux de construction -et notamment des fixations- pèse lourdement sur le secteur immobilier américain. En août, la construction de logements neufs a chuté de 8,5% aux États-Unis, selon le cabinet KPMG.

Pierre Lann