Les droits de douane concernent aussi les lingots d’or: un nouveau coup dur pour la Suisse, déjà dans le collimateur de Trump

La Suisse n'est décidément pas épargnée par les droits de douane américains qui frappent plusieurs pans majeurs de son économie. Après l'horlogerie, le fromage, les machines industrielles, les appareils médicaux ou encore le chocolat, voilà que l'or est aussi concerné, rapporte le Financial Times.
Selon le quotidien britannique, qui a consulté une lettre de l'Agence des douanes et de la protection des frontières (Customs Border Protection), les lingots d'or d'un kilo et de 100 onces (un peu plus de trois kilos) sont aussi soumis aux surtaxes douanières décidées par Donald Trump et entrées envigueur jeudi.
Une mauvaise nouvelle donc pour la Suisse, leader mondial du raffinage d'or avec quatre des sept plus grandes raffineries du monde implantées sur son sol. De quoi permettre au pays de raffiner environ deux tiers de l'or de la planète. Surtout, les lingots d'or d'un kilo représentent l'essentiel de ses exportations de lingots vers les États-Unis.
L'élection de Donald Trump avait pourtant souri à l'industrie puisque les exportations suisses d'or, valeur refuge de référence, vers les États-Unis s'étaient envolées, passant d'une dizaine de tonnes en novembre 2024 à plus de 195 tonnes en janvier 2025, lorsque le président républicain a été investi.
La Suisse dans le viseur de Trump
La décision américaine de frapper les lingots vient contrarier les espoirs de l'industrie qui s'attendait à ce que les lingots d'or héritent d'un code douanier exempté de surtaxes. Mais c'est plus largement un nouveau coup dur pour la Suisse qui semble être l'une des principales cibles de la politique commerciale de Donald Trump.
Berne s'est en effet vu imposer des droits de douane punitifs de 39% qui toucheraient près de 60% des exportations de biens suisses aux États-Unis (les produits pharmaceutiques sont exemptés). Le président américain a justifié son geste -qui a pris les autorités suisses par surprise alors qu'elles pensaient avoir un accord cadre bien plus favorable- par l'excédent commercial de plusieurs dizaines de milliards de dollars de la Suisse vis-à-vis des États-Unis.
John Plassard, spécialiste en investissement chez Mirabaud & Cie, rappelle toutefois dans une note que "les exportations de pierres précieuses faussent souvent la lecture du déficit commercial bilatéral entre la Suisse et les États-Unis car elles sont très volatiles, peu liées à un production domestique et souvent sans réelle valeur ajoutée suisse".
Il ajoute qu'en 2024, "ces flux représentaient environ 15 milliards de dollars, soit près d'un quart des exportations suisses vers les États-Unis. Mais il s'agit majoritarement d'or de transit ou de reconditionnement, passant par la Suisse pour des raisons fiscales, logistiques ou de sécurité, avant d'être reexpédié". Un commerce qui "gonfle artificiellement les excédents suisses dans les statistiques américaines".
Les autorités suisses espèrent encore pouvoir obtenir des surtaxes plus faibles
Quoi qu'il en soit, le Conseil fédéral (gouvernement) suisse s'est dit "déterminé à poursuivre les discussions avec Washington afin de faire diminuer au plus vite ces droits de douane", selon un communiqué.
"Nous voulons une relation règlementée" avec les États-Unis, "mais pas à n'importe quel prix", a déclaré la présidente de la confédération Karin Keller-Sutter, tout en affirmant que le gouvernement fédéral n'envisage pas de prendre des contre-mesures douanières "pour l'instant", les jugeant contre-productives.
Dans une note publiée mercredi soir, Adrian Prettejohn, économiste chez Capital Economics, souligne pourtant que ces droits de douane de 39% pourraient réduire le produit intérieur brut de la Suisse "de 0,6% à moyen terme".