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"Éviter que la Syrie explose": pourquoi les États-Unis et l'Europe lèvent les sanctions contre Damas

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Alors que la Syrie poursuit sa reconstruction, Donald Trump a annoncé une levée des sanctions sur la Syrie. On vous explique pourquoi.

"Je vais ordonner la levée des sanctions contre la Syrie afin de donner une chance de grandeur aux Syriens. C’est maintenant le temps de briller pour eux." Le 14 mai, lors du forum pour l’investissement en Arabie saoudite, Donald Trump a annoncé la levée immédiate des contraintes qui pesaient sur l’économie syrienne et s'est entretenu avec le président syrien Ahmad al-Chareh.

Mis en place par les États-Unis en 2019, le dernier train de sanction américain était contenu dans la loi César. Elle empêchait l’accès pour la Syrie aux marchés internationaux, aux transactions financières et punissait toute entreprise ou État qui voulait s’implanter ou investir en Syrie. Avec l’annonce de la fin des sanctions américaines, l'Europe a emboîté le pas: la suspension progressive et conditionnelle des sanctions en février dernier est devenue une levée totale et immédiate.

Redonner du souffle à la Syrie

Mais au-delà des déclarations faites à Riyad, les mécanismes de levée des entraves vont prendre un peu de temps. David Rigoulet-Roze, chercheur associé à l'Iris, explique à BFM Business que "la décision de principe de la levée des sanctions a un caractère immédiat, mais ses modalités pratiques n’ont pas encore été détaillées car une telle disposition est théoriquement validée par le Congrès. Ce qui ne devrait pas poser de problème pour Donald Trump". Toutefois, il explique que les dispositions prises vont permettre à la Syrie de respirer.

"La fin des sanctions va entraîner deux conséquences: le dégel des avoirs de la banque centrale syrienne et la possibilité pour le nouveau régime d’avoir accès au marché international de capitaux pour financier le redémarrage économique."

Une aide précieuse à l'heure où les tensions s'exacerbent dans le pays. Malgré des accords de normalisation avec les milices druzes et les YPG (les milices arabo-kurdes du nord-est syrien, NDLR), la méfiance demeure entre les différents acteurs. D’autant plus après les massacres à l’encontre des populations alaouites en mars.

400 milliards de dollars nécessaires

C’est pour pallier cette situation et éviter que d’autres pays soient entraînés dans la chute de la Syrie que les occidentaux ont accéléré leurs démarches. Bien conscient des risques en cours, Marco Rubio déclarait lors de sa dernière audition au Sénat américain que "la Syrie pourrait être a quelques semaines d’une guerre civile à grande échelle".

Caroline Loyer : Syrie, l'épreuve de vérité pour Al-Chareh - 10/03
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Un position pragmatique donc, mais pas seulement. La levée des sanctions permettrait aux pays du Golfe d’investir dans la reconstruction syrienne et d'étendre leur influence. Pour David Rigoulet Roze, le retrait des sanctions a été demandé par le président turc et le prince héritier saoudien au président américain: "C’est une demande concomitante de Mohammed ben Salmane et d’Erdogan, avec un fort appui du prince héritier saoudien auprès du président Trump dont il a l'oreille".

"L'objectif est d'éviter que la Syrie ne s'effondre."

"Le financement à moyen et long terme de cette reconstruction estimée à quelque 400 milliards de dollars par la Banque mondiale mobilisera sans doute un pool d’argentiers pour partie issu des pétromonarchies du Golfe."

Le chercheur associé à l’Iris conclut que "le défi pour Ahmad al-Chareh c’est que la population voit une amélioration de ses conditions de vie et qu’une forme de sécurité se rétablisse". Un élément prioritaire pour rebâtir une stabilité dans ce pays au bord de l’éclatement.

Lucien D'Armagnac de Castanet