ÉDITO. Les conséquences économiques du bras de fer avec l'Algérie

Quels pourraient être les conséquences économiques du bras de fer entre Paris et Alger?
Avec 4,8 milliards d'exportations en 2024, l’Algérie représente le deuxième marché d’exportations en Afrique pour la France, derrière le Maroc (7,4 milliards) et devant la Tunisie (3,4 milliards). Des exportations qui avaient bien repris en 2024, avec une progression de 6,6%. On y exporte surtout des produits industriels (40%), beaucoup de matériel de transport (24%), des produits électriques et électroniques aussi.
Les tensions entre les deux pays menacent-elles la reprise des échanges? La réponse est clairement oui.
En novembre dernier, après la reconnaissance par Emmanuel Macron de la "souveraineté marocaine" sur le Sahara occidental, des instructions informelles avaient été données aux responsables de banques publiques algériennes et privées étrangères –dont certaines françaises– pour ne plus traiter les opérations d’import/export de et vers la France.
Même si Alger s’en défend, aujourd'hui les entreprises françaises en Algérie risquent à nouveau d’être écartées des appels d’offres, voire d'être la cible de sanctions ciblées. Des informations font état de l'exclusion des entreprises françaises de certains appels d'offres, pour l'importation de blé par exemple.
Cette menace est-elle importante pour l’économie française?
La réponse est non, pour plusieurs raisons. D’abord l’Algérie représente moins de 1% des 598,3 milliards d'euros d'exportations françaises enregistrés en 2024.
Le sujet le plus sensible concerne l’importation des hydrocarbures. La France a importé pour cinq milliards de pétrole et de gaz algérien l’année dernière. Mais Alger n’y touchera pas. Les rétorsions sur les hydrocarbures, c'est l'équivalent de la menace nucléaire. À manipuler avec précaution. On n'en est pas là.
Un sujet moins grave mais qui pourrait quand même poser problème: l’interdiction du survol de l'espace aérien algérien pour les avions civils français. Une interdiction justement envisagée par la France comme mesures de rétorsion dans notre "riposte graduelle".
L’idée est de limiter l’accès des Algériens par les airs en interdisant Air Algérie et par la mer en limitant l’accès au port de Sète. En retour, des mesures de rétorsion sont envisagées côté algérien contre Air France, Corsica Ferries ou encore CMA-CGM (propriétaire de BFM Business). C’est peut-être là que la sanction financière serait la plus douloureuse car l’Algérie est une porte importante sur l’Afrique.
Pour l’heure, on est plutôt sur une guerre de visas côté français, qui cible notamment l’élite algérienne. Des mesures patrimoniales pourraient aussi être prises à l’encontre des intérêts des dignitaires. Des discussions sont en cours entre le ministère de l’Intérieur, le Quai d’Orsay, Bercy et le ministère des Transports.
Côté algérien, la menace se limite à l’immobilier de la France. Les autorités menacent de revoir les conditions de location de 61 biens occupés par la France en Algérie, dont le siège de l'ambassade de France à Alger, la chambre de commerce algéro-française ou bien encore le lycée français. On reste dans l'ordre du symbole.