"Des profits au détriment de la sécurité des États-Unis": le géant européen ASML visé par Washington pour ses liens avec la Chine

Le logo d'ASML. - AFP
Cinq grands fabricants d'équipements pour semi-conducteurs, dont l'européen ASML, ont vendu des technologies essentielles à la Chine pour 38 milliards de dollars en 2024, y compris à des entreprises considérées comme une menace pour la sécurité des États-Unis, selon un rapport parlementaire américain publié mardi 7 octobre.
Ce rapport, publié par une commission spéciale sur la concurrence "entre les États-Unis et le Parti communiste chinois", met en lumière l'ampleur des liens commerciaux qui persistent, malgré les restrictions américaines, entre la Chine et l'industrie mondiale des puces, cruciales dans la course à l'intelligence artificielle (IA).
"Les entreprises concernées par cette enquête sont des producteurs à grande échelle d'équipements que la Chine utilise pour alimenter ses ambitions militaires. Elles accroissent leurs profits au détriment de la sécurité nationale des États-Unis", a déclaré le président de la commission spéciale, John Mooelenar (Parti républicain).
La Chine représente ainsi 39% du revenu des cinq principaux fabricants de machines-outils très rares et complexes destinées à l'usinage des puces électroniques, selon ce document.
Il cite les sociétés américaines Applied Materials, KLA Corporation et Lam Research. Mais il épingle surtout le néerlandais ASML et le japonais Tokyo Electron, accusés d'avoir profité d'un renforcement des restrictions d'exportations américaines à des entreprises chinoises pour augmenter très fortement leurs ventes à ces dernières.
Les parlementaires poussent de nouvelles restrictions
Cinq entreprises chinoises, soupçonnées par Washington d'être liées à l'armée, figuraient parmi les 30 principaux clients de ces fournisseurs entre 2022 et 2024. Parmi elles se trouve SMIC, principal fabricant chinois de puces.
En 2024, ASML a notamment vendu 70 % de ses systèmes de lithographie par ultraviolets (DUV) à la Chine, contre 26 % en 2022, selon le rapport. Ces outils sophistiqués sont indispensables pour graver les circuits sur les plaquettes de silicium des semi-conducteurs, utilisés dans l'IA et le développement militaire. Au total, l'entreprise néerlandaise a reçu un tiers de ses revenus de Chine selon ce rapport.
"La Chine met tout en oeuvre pour développer une industrie nationale de semi-conducteurs qui soit autonome", prévient le rapport, soulignant que cette technologie pourrait être utilisée pour des projets militaires menaçant les États-Unis.
"Les fabricants de machines-outils vendent de quoi forger des armes et des outils de surveillance du futur", alerte-t-il notamment. Les livraisons de ces équipements sont cruciales pour les efforts chinois visant à contourner les restrictions américaines et rester à la pointe de la course à l'IA.
"Il est plus que temps que les fabricants d’outils commencent à traiter le Parti communiste chinois et ses champions nationaux comme des menaces pour la longévité de leur entreprise, plutôt que comme des clients précieux", insistent les auteurs de ce rapport.
La commission recommande de limiter drastiquement les exportations à la Chine en étendant les restrictions non plus seulement aux composants des puces les plus avancées mais, en amont, à tous les outils de fabrication de ces composants. Les parlementaires américains appellent également à une meilleure harmonisation des contrôles à l'exportation entre les alliés des États-Unis, en particulier les Pays-Bas et le Japon.